1-La dimension audiovisuelle : dans les théories de l'expérience audio-visuelle, il y a ce que l'on appelle les negative images et negative sounds pour désigner les images que l'on ne voit pas (engendrée par les sons) et les sons que l'on n'entend pas (générés par la dimension visuelle). Ces éléments invisibles, qui se présentent sous le mode de la hantise, sont pourtant au cœur de l'expérience esthétique d'une panoplie d'oeuvres d'art multimédia. Pour comprendre cette rencontre du sonore et du visuel, on peut étudier cet espace mixte, hanté, qu'elle génère.
"the visual and the audio refer to each other, they engage with an external space which does not belong to either of them, in order to signify the things that are beyond the visible and the audible." p.325"
2-La dimension (non) ontologique : pour les oeuvres numériques, l'ontologie devient ce que Derrida appelait une hantologie. Celle-ci permet d'étudier les signes instables de l'oeuvre d'art, véritables brèches pour l'imagination, comme "éléments essentiels". Les oeuvres numériques, tout comme la hantise, ont leur propre logique s'instaurant dans l'imaginaire du spectateur.
"By leaving room to imagination or dream, they [digital artworks] shadow the "Thruth" itself" p.3213-La dimension performative : l'expérience des oeuvres numériques comportent une dimension performative par la participation qu'elles engagent de la part de leur spectateur. Celui-ci construit un espace à partir de l'expérience multisensorielle de l'oeuvre et de ce qui le hante (éléments invisibles et inaudibles) au moment présent.
"a "performative" act of seeing, which offers an understanding of looking and listening as central to the process of inventive and creative interpretation of the world and the making of knowledge of the world" p. 320
4-La dimension indiciaire : les oeuvres numériques offrent des traces virtuelles, mais actuelles (effectives), se situant ainsi, de manière simultanée, dans un ici et un ailleurs, un passé et un présent. Cette présence actuelle d'un passé, une expérience propre à la hantise, engage d'emblée une réflexion historique ou, du moins, "temporelle".
"to engage with ghostliness and haunting is a matter of producing a hospitable memory-of encouring memory to become present in order to give a historical counter-response" p.329-330
6-La dimension de la résistance : la hantise permet d'étudier l'aspect insaisissable, fuyant, indomptable des oeuvres numériques.
"The "digital ghosts" in this chapter are what resist being domesticated or excluded" p.340
La posture de la hantise implique de ne jamais parvenir à "saisir" son "objet" d'étude sans d'abord se laisser saisir. L'historien hanté recrée, par sa reconstruction historique, un espace invisible et fuyant généré par l'expérience des oeuvres numériques. Son but est d'en transmettre l'expérience : une expérience temporelle dans la mesure où la hantise implique à la fois le présent et le passé. Et, surtout, la posture de la hantise lui permet de questionner et requestionner sans cesse le présent qui l'habite :
"[ghost] It is, though, capable of doing at least one thing successfully : making us feel that something is going wrong in the present. In so doing, it makes us question the present" p.32
BOO!