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Penser "out of the box"

Publié le 14 janvier 2011 par Paule @patty0green
Il y a quelques instants, Penelope Trunk, star du Web aux États-Unis et la seule blogueuse de management (ex-net-artist, mentionnons-le) que j'adore lire, publiait un billet intitulé "How to Think Out of the Box?". Celui-ci apporte peut-être un semblant de solution (et une panoplie de questionnements, pour ma part) en ce qui a trait à la réconciliation entre créativité et innovation dans la recherche académique, un sujet sur lequel je me suis penchée dans un billet précédent.
Trunk affirme, elle aussi, et en s'opposant aux théories du management, que tout le monde est créatif. C'est là quelque chose de fondamentalement humain :
The only thing we really have in this world is the ability to craft a life.
Mais le problème, en ce qui a trait à l'innovation (elle n'emploie pas ce terme, mais plutôt celui de la nouveauté), et je paraphrase, est qu'il faut d'abord connaître "la boîte" pour penser en dehors d'elle et apporter une véritable contribution. À cela, elle renchérit que :
most often, people waste their creativity thinking about stuff they know nothing about. So they have no idea if they are in the box or out of the box.
Je suis d'accord sur l'ensemble de l'affirmation, particulièrement pour les recherches en ce qui a trait aux productions de la cyberculture, sauf pour un mot : "waste". Si l'on met, par plaisir ou pour son propre apprentissage, son énergie créative dans quelque chose qui a été fait mille fois, ce n'est pas du gaspillage. Sur cette idée, j'ai envie de mettre la citation que l'on retrouve à l'entrée du blog de Lucrecia Bloggia :
The time you enjoy wasting your time is not wasting time.
Bertrand Russel

Pas très académique, j'en conviens.
Mais Trunk le mentionne : pour connaître la boîte, il faut d'abord s'y mouler,
la connaître, suivre les règles :

John Cage studied music and thought
about music for decades before he could
recognize his ability to create music by
annoying the audience with silence.

Le problème advient lorsqu'on prétend faire quelque chose de nouveau, out of the box, alors qu'il n'en est rien. On peut convaincre les autres, mais ce n'est pas très gratifiant. Lorsqu'on s'intéresse à des objets d'étude émergents, mouvants et dont les productions scientifiques à leur sujet pleuvent comme dans le cas de la cyberculture, la question que j'ai envie de poser est : "how do we get to know the *&?&* box?" La moindre des choses est justement de reconnaître que l'on ne connaît "peut-être" pas la "boîte", de rechercher la voix la plus multiple possible, de rester ouvert, et surtout, de ne pas se donner une voix unique et autoritaire.
Petite histoire hyper résumée parmi TANT d'autres : l'an dernier, en France, était lancé un Digital Humanities Manifesto ne faisant aucune mention du Digital Humanities Manifesto créé en Stanford University, aux États-Unis, plusieurs années avant, mais en reprenant pourtant les grandes lignes de ce dernier. Le manifeste est une forme littéraire qui impose un programme d'actions avec des principes, on le souhaite (sinon à quoi bon faire un manifeste?), nouveaux. Ce manifeste porte sur la culture numérique donc, on l'espère, il est créé par des gens qui sont en mesure de manipuler des dispositifs comme des moteurs de recherche. C'est ce que j'appelle: ignoring the box! Le plaisir de la créativité, c'est de rebondir sur les autres, de participer à quelque chose d'un peu plus grand que notre desktop! Je ne suis pas en train d'accuser, mais plutôt de critiquer une posture, sans malice aucune, qui pourrait bien être liée à des motifs qui ne sont plus valides aujourd'hui, tel que le manque d'accès à l'information...
À l'ère World Wide Web, de la grande quantité d'informations qui y circulent, il est vrai qu'il est difficile "to know the box", mais il me semble également que l'accessibilité à l'information via Google, par exemple, offre une certaine facilité. Certaines choses deviennent plutôt injustifiables et d'autres deviennent primordiales pour la recherche sur la cyberculture (et même, peut-être, pour bien d'autres domaines d'études) :
Injustifiable :
-Ethnocentrisme (qui pouvait être lié, par le passé, au fait que les informations/publications ne circulaient pas autant)
-Deux sites ou projets de recherche ou manifestes portant le même titre...etc. (hum...Google svp!)
-Centro-centrisme (encore pire que l'ethnocentrisme, j'entends par-là les centres de recherche académique qui travaillent, faute de temps, avec des œillères)
-Prof-Centrisme ("J'ai une idée de génie, allez, travaillez-y les petites abeilles" : ça contamine le reste des étudiants qui oublient parfois que la même idée de génie peut avoir circuler un peu partout. Dans ce cas, on peut parler de gaspillage de créativité).
-Être intéressant (oui, je sais, c'est étrange. Mais je crois qu'avec le bassin de productions culturelles et scientifiques, on ne peut plus se permettre de vouloir à tout prix être intéressant et qu'il faut avant tout ÊTRE INTÉRESSÉ)
Primordial :
-Faire du Crowd Sourcing. (par-là, j'entends que malgré les connaissances académiques approfondies que nous possédons et surtout lorsque nous avons une posture d'autorité, il apparaît important -et il n'y a pas de honte- de citer des blogs d'amateurs, des articles d'étudiants ou des commentaires YouTube...etc. avant de dire "I know the box")
Excuses suprêmes pour faire des choses injustifiables et ne pas faire des choses primordiales en recherche sur la cyberculture :
-Je ne savais pas...(que ceci avait été fait)
-Je n'ai pas le temps...(il y a tellement de choses)
-J'ai besoin de subventions... (je dois donc convaincre de la nouveauté de ce que je propose)
Donc innovation = ignorance, rapidité et argent?
Soyons créatifs : ayons la volonté de participer à quelque chose qui nous dépasse plutôt que de prétendre dépasser! La véritable innovation suivra...

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