Apocalypse sur commande

Regarde un peu ce qui est arrivé au monde [...] La violence, la laideur, la pollution, des présidents qui racontent des mensonges et qui violent la loi, des émeutes, des crimes, la pauvreté. Pendant ce temps-là, on a vécu ici dans la paix et l'harmonie, année après année, sans argent, sans rivalité sexuelle, sans règle conformiste. On soutenait que la seule chose nécessaire, c'est l'amour, et on nous traitait de naïfs. Mais nous avions raison, et eux avaient tort. Nous avons trouvé la bonne façon de vivre. Nous l'avons prouvé.

Je n'avais jamais lu de roman de Ken Follet, et à lire les commentaires élogieux parsemant la blogosphère littéraire (confirmés par les exclamations de mes collègues en salle des profs), je me suis dit que c'était sans doute un tort. Aussi, comme j'avais ce roman dans ma bibliothèque (ne me demandez pas comment il y est arrivé, je n'en ai pas la moindre idée...), je me suis décidée l'autre jour à combler cette lacune immense dans ma culture. Et je dois dire qu'effectivement, je ne regrette pas du tout cet essai.

Il s'agit d'un roman à double point de vue. D'un côté, nous avons une communauté paisible vivant de la viticulture dans un coin reculé de la Californie. Tout aurait pu continuer au mieux si le gouvernement, à qui ils louent leur lopin de terre, n'avait pas décidé d'inonder la vallée pour construire une centrale, ne leur laissant d'autre choix que de revenir vivre dans le monde, qu'ils exècrent. Aussi décident-ils de ne pas se laisser faire, et ils deviennent les "soldats du paradis", un groupe terroriste capable de provoquer artificiellement des tremblements de terre. Au départ, ils espèrent bien sûr que le gouverneur de Californie cédera sans même qu'ils aient besoin de mettre leur menace à exécution, puis qu'un tremblement de terre dans un lieu isolé suffira... mais voilà, les choses ne se passent pas comme prévu. De l'autre côté, nous avons Judy Maddox, agent du FBI qui, aidée du sismologue Michael Quercus, entend bien arrêter les terroristes.

Là où Follet est très fort, c'est que ce roman n'est absolument pas manichéen. J'avoue : j'ai ressenti une certaine compassion pour les terroristes, ou en tout cas j'ai compris leur point de vue, au départ. Et le roman montre très bien comment un projet pacifiste à la base, puisque ces gens (un peu illuminés, c'est certain, mais qui ne font de mal à personne et auraient continué à cultiver gentiment leur vin sans les projets de centrale) veulent juste qu'on les laisse en paix et ne veulent pas tuer qui que ce soit, s'emballe et devient une machine meurtrière. Comment, lorsqu'un idéal s'effondre, on peut devenir fou. Et bien sûr, dans les chapitres consacrés à l'enquête du FBI, on soutient le FBI. Du coup, les pages se tournent les unes après les autres, sans qu'on puisse s'arrêter. D'autant que le plus effrayant dans tout ça, c'est que la possibilité de créer artificiellement un tremblement de terre est scientifiquement plausible, et ça, c'est impressionnant.

Bref, une lecture très agréable, je renouvellerai à l'occasion l'expérience des romans de cet auteur !