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BLACK SWAN de Darren Aronofsky

Publié le 19 janvier 2011 par Celine_diane
BLACK SWAN de Darren Aronofsky
Dans The Wrestler déjà, la chair était sacrifiée, torturée, le corps supplicié, l’âme tiraillée et tourmentée. Même souffrance charnelle écrasante ici, exportée du ring de catch aux planches d’un ballet, même figure brutalisée, piégée dans la prison de l’enveloppe. Soit ici Nina, danseuse au New York City Ballet, incarnation- aux rages latentes- du cygne blanc qu’elle doit interpréter sur scène, en proie à ses horribles démons de réussite et de perfection. Toboggan cauchemardesque dans les dédales complexes des craintes d’une jeune femme, Black Swan s’impose comme ce qui a été fait de mieux autour du thème de la folie. Natalie Portman, éblouissante de noirceur, s’abandonne entièrement à cette altérité menaçante, aux refoulements fantasmés, combattus, assassinés (tous réalisés chez et avec la rivale) ; dans un duel acharné, combat magnifié d’une intense violence psychologique entre Eros et Thanatos, maîtrisé jusqu’à la perfection par un Aronofsky (Requiem for a dream, The Fountain) conscient de réaliser son chef d’œuvre. Au plus près des névroses de son héroïne, très lynchienne, il dissèque et matérialise les monstres d’une Nina étouffée, opprimée par des années d’entraves et de paralysie, d’inhibition et de déni. Sa métamorphose clairement métaphorique en cygne noir- double maléfique qui harcèle les acquis et convenances- devient alors véritable tourbillon sensoriel, cinématographique et intellectuel, un maelström visuel, sonore, physique aussi dérangeant que sublime, crescendo absolument épatant dans la tension et l’horreur. Mille thèmes s’entrechoquent (peur, aliénation, compétition, quête d’un idéal) parmi mille facettes du diamant noir qu’est Nina, ballotée entre pulsions de vie (sa passion, son émancipation bouleversante loin d’une mère furieusement possessive, sa transcendance dans l’art) et de mort (lutte véhémente et douloureuse entre soi et soi, aversion frénétique à l’égard de son propre corps, sexualité chaotique et libido reniée). Aronofsky, dans une œuvre aussi belle que démesurée, intime que colossale, malmène, défigure et massacre l’apparente pureté d’une femme-symbole (dénégation, illusion, obsession) et accumule les prouesses, techniques, sensitives, esthétiques. Erotisme morbide et vraie/fausse succube hallucinée formant un tout nouveau et traumatisant couple de cinéma, expression de l’étreinte irrésistible d’un film sadique, démentiel, supérieur- sorte d’autopsie viscérale d’une déchéance, en forme d’orgasme.
BLACK SWAN de Darren Aronofsky
Sortie France: 9 février 2011.

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