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Somewhere, de Sofia Coppola

Publié le 19 janvier 2011 par Vivons_curieux

Somewhere, de Sofia CoppolaSofia Coppola a tout pour agacer. Un père cinéaste, internationalement reconnu, un frère producteur qui a d’ailleurs participé au film, une filmographie courte de quatre long-métrages déjà saluée par la critique, et un ex petit-ami (Quentin Tarantino) qui, en 2010, lui a décerné le 67ème Lion d’or de la Mostra de Venise en tant que président de jury. Sofia Coppola a tout d’une enfant gâtée, née avec une cuillère en argent dans la bouche, sans difficultés professionnelles encore moins financières. Le portrait d’une fille de qui ne manque de rien et qui pourrait en exaspérer plus d’un s’effrite pourtant devant Somewhere, un film intimiste et minimaliste à l’image de sa réalisatrice qui dépeint remarquablement la représentation idéalisée et superficielle du monde de la jet set, symbole contemporain de la réussite individuelle qui attire tant de convoitises.

En promotion pour la sortie de son prochain film, Johnny Marco (Stephen Dorff) est un célèbre acteur américain qui passe la plupart de son temps à errer, une bière à la main, dans l’une des chambres du Château Marmont, haut-lieu du show business hollywoodien. Entre deux lap dance de stripteaseuses pas vraiment inspirées, les conférences de presse aux questions inutiles, les soirées à l’hôtel où l’alcool coule à flots et les sorties en grosse cylindrée, l’arrivée de Cleo (Elle Fanning), sa fille âgée de onze ans va progressivement remettre en question les choix personnels de l’acteur. Contrairement à son père, Cleo mène une vie simple de jeune adolescente : elle cuisine, fait du patin à glace depuis trois ans, joue à la console de jeux vidéo et au tennis de table, remplit une grille de Sudoku quand elle accompagne son père, et doit partir en colonie de vacances depuis que sa mère a décidé de prendre un temps de réflexion avec elle-même. Confronté à ses responsabilités paternelles, Johnny Marco perd pied lorsqu’il s’agit d'affronter la réalité, un univers à mille lieues du monde dans lequel il évolue.

Pendant plus qu’une heure et demie, Sofia Coppola parvient à ennuyer son spectateur comme pour mieux traduire l’état d’esprit dans lequel se trouve son personnage principal. Un exercice de style audacieux qui peut déplaire et n’est pas sans nous rappeler l’atmosphère de son deuxième long-métrage - Lost In Translation – mais qui a le mérite de développer un sentiment réel d’empathie envers cet acteur qui ne semble à priori (lui non plus) manquer de rien.

Cette atmosphère singulière c’est la marque de fabrique de Sofia Coppola. Il se dégage toujours de ses films une certaine légèreté et fraîcheur de ses personnages, rendant les scènes plus lumineuses et plus cristallines, contrastant avec l’ambiance dans lequel le film évolue à l’instar d’Elle Fanning ici ou Kirsten Dunst dans Marie Antoinette et Virgin Suicides.

Rien de plus délicat comme choix que de faire du vide et de l'errance d'un acteur l'essentiel d'un long-métrage sauf quand ce dernier est signé Sofia Coppola. Discrètement, comme à son image, la réalisatrice américaine sait comme peu d'autres rendre son sujet intéressant car différent, et nous donne sans que l'on s'en aperçoive une vraie leçon de cinéma. Un moment de poésie comme de réflexion plus profonde.

Sortie en salles le 5 janvier 2011


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