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Quand Brecht adapte Molière...

Publié le 31 janvier 2011 par Fousdetheatre.com @FousdeTheatre

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A l'heure où de plus en plus de théâtres privés parisiens  affichent  "Mon Cul Sur La Commode" et autres "Clans Des Divorcées", le Théâtre de l'Oeuvre poursuit avec courage et conviction une politique de programmation exigeante et de qualité qu'il faut saluer (Bravo Gérard Maro!). La preuve en est une nouvelle fois avec ce "Don Juan" de Brecht dont j'ignorais l'existence, à l'affiche depuis la semaine dernière, interprété par la Compagnie Liba Théâtre. Si le spectacle n'est point parfait, il possède au moins le mérite d'être riche en propositions artistiques. 

Il y a soixante ans, Brecht décidait donc, aidé de Beno Besson, de "réinventer" Don Juan. Conservant la structure narrative imaginée par Molière (presque scène par scène), il rend le personnage moins grand seigneur et le situe plus près du peuple, plus fripouille et davantage libre jouisseur que libre penseur, nous dit-on, tirant l'ensemble vers la comédie.

OK. Mais difficile de ne pas voir cela déjà dans l'oeuvre de Molière , et la version de Brecht, plus courte, plus simple, certes plus légère et plus vive, semble parfois un véritable digest de la pièce originelle...

Dans l'esprit du théâtre de tréteaux, parfois du clown, empruntant également à l'art de la marionnette, les six comédiens, dotés d'un talent certain, interprètent l'ensemble des rôles avec une belle énergie, changeant de personnage rapidement à l'aide d'un  accessoire (chapeau, jupon, manteau, panier...) pioché dans l'élégant bric à brac disposé de part et d'autre de la petite piste au centre de laquelle se déroule l'intrigue. 

Pierre Val (Don Juan) et Sylvain Katan (Snagarelle) forment un duo convaincant, drôle, efficace auquel on pardonnera deux imitations pas très heureuses de Chirac et Sarkozy, qui à mon avis n'ont pas grand chose à faire ici (les Deux Anes se situent à quelques minutes de l'Oeuvre, mais tout de même...). Le choeur de quatre comédiens qui les entoure  (Valérie Alane, Charlotte Rondelez, Guy Segalen, et Cédric Villenave) les accompagne impeccablement dans cette épopée.

D'où vient alors ce curieux sentiment d'inachevé qui freine un enthousiasme pourtant pas si lointain ? Difficile à dire.

De la pièce de Brecht peut-être, pour les raisons évoquées plus haut. Et probablement d'une exploration des différents genres théâtraux  pas toujours aboutie, ou trop rapide, de la part des comédiens. Je pense notamment à un usage des marionnettes, joli mais un peu timide, qui mériterait d'être développé.

Le travail est cependant réellement intéressant, charmant, intelligent, rigoureux, de qualité, souvent drôle, et donc à voir.



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