Par Julie Cadilhac- Bscnews.fr / Beaucoup d'émotion portée par des comédiens de grand talent.
L'intrigue? Geoffrey Firmin, consul britannique au Mexique, se noie dans ses idées noires et n'arrive à fuir la réalité qu'en s'enivrant de tequila ou de mezcal. Le jour de la Fête des trépassés, le 2 novembre 38, débarque son épouse dont il est divorcé mais qui tente désespérément une ultime réconciliation. Emporté dans une spirale infernale, Geoffrey ne saura pas profiter de cette main qui se tend.
Sous le volcan invite le spectateur à éprouver la lente descente aux enfers d'un être rompu par les remords et ayant perdu le goût de la vie....une vie qui reflète celle de son écrivain, Malcolm Lowry. Ce dernier y décrit une situation sentimentale similaire à celle qu'il a pu vivre avec sa première femme et immerge son récit dans des évocations multiples des pays où il a vécu : l'Angleterre d'abord, puisque Geoffrey est consul britannique, le Mexique où se déroule l'intégralité de la pièce, la France au travers de Jacques Laruelle, cinéaste et ami d'enfance de Geoffrey, Les Etats-Unis représentés par les tenues de cow-boy d'Hugh Firmin, demi-frère de Geoffrey mais aussi par les récurrents souvenirs du temps où Yvonne Constable, actrice déchue jouait à Hollywod et enfin le Canada où Yvonne rêve de construire une ferme avec Geoffrey, pour repartir sur de nouvelles bases saines.
La force du texte de Lowry naît de l'union intime entre l'individuel et l'universel : c'est en effet un roman qui évoque le destin particulier de deux époux , Geoffrey et Yvonne, qui traversent de graves problèmes matrimoniaux dus à l'ivresse permanente du mari. Mais c'est aussi un roman politique qui transpire l'indignation et l'angoisse face aux signes précurseurs partout dans le monde de la seconde guerre mondiale ( début de la guerre civile en Espagne, montée du fascisme au Mexique et de l'antisémitisme...)
La mise en scène de Guy Cassiers est prenante car il met la technologie visuelle au service de l'émotion. Les visages des comédiens s'expriment en gros plan sur l'écran transparent en fond de scène ou bien ce sont des décors exotiques et vivants qui respirent derrière les comédiens et créent tout à fait naturellement l'illusion d'un jardin ou d'une ballade en forêt....l'écran n'est pas seulement un prétexte à projeter : en usant de sa transparence, il crée parfois un double plateau, un "on" et un "off" et donne au spectateur l'impression d'entendre derrière les murs, augmente le plaisir voyeur de l'expérience théâtrale.
Servie par d'excellents comédiens dont Katelijne Damen qui est d'une sensibilité époustouflante alliant naturel et charme, cette pièce donne à voir des moments d'intense effervescence. On ne peut pas oublier , par exemple, la scène de tendresse émouvante entre Yvonne et Hugh, anciens amants, se prenant, un instant, à divaguer encore ensemble...l'espace fragile de quelques minutes arrachées à la souffrance des heures pénibles que leur concède la réalité. Jose de Pauw , en Geoffrey, exprime la déchéance d'une âme en peine avec beaucoup de justesse et il est même pénible de survivre avec lui à la lente agonie qu'il s'est programmée...
On regrettera simplement de ne pas parler néerlandais couramment et de devoir donc recourir aux sous-titres en français , contrainte qui diminue le plaisir de la représentation. La langue de Malcolm Lowry est en effet très métaphorique et nécessiterait plus de concentration sur les mouvements scéniques. L'occasion aussi d'avoir envie de se lancer dans la lecture de ce roman considéré comme l'un des grands ouvrages littéraires du XXème.
Sous le volcan
Roman de Malcolm Lowry
Adapté à la scène par Josse de Pauw
Mise en scène : Guy Cassiers
Le 1 et 2 février à 20h30 à la Scène Nationale de Sète ( Réservation au : 04 67 74 66 97 )
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