La ville blanche a des formes généreuses, un visage souriant même lorsque la pluie ruisselle sur ses joues. Elle s’est révélée comme on me l’avait décrite : enjouée, affable, gourmande. Il faut aller à sa rencontre, l’explorer, s’y perdre jusqu’au bout de la nuit dans ses ruelles escarpées qui changent autant d’ambiances qu’il y a de quartiers. A peine arrivés, nous avons mis les pieds sous la table et avons goûté aux spécialités locales, ses sardines grillées, ses pasteis de bacalhau (beignets de morue) et sa sagres, parfaite pour consoler la soif des marcheurs. C’est ainsi que nous avons fait sa connaissance. En la sillonnant durant des heures, la grimpant, prenant la pause en haut des belvédères d’où l’on pouvait admirer, d’une vue imprenable, ses paysages, ses maisons aux couleurs pastels, ainsi que le calme du Tage sur lequel est érigé le pont du 25 avril, qui rappelle, comme ça, planté là, celui de San Francisco.
On s’arrête de temps en temps, reprendre son souffle, puis scotcher sur les inscriptions qui ornent les murs, sourire devant le linge suspendu, écouter le crépitement des sardines grillées tout en visitant les boutiques vintage, et voir le tram 28 passer, cahin-caha, souvent bondé de touristes. Parfois on baisse la garde, le guide au fond du sac, la marche en mode automatique. On se remémore des quartiers historiques à visiter ab-so-lu-ment, réminiscence des incontournables préconisés par le guide du routard : Alfama, Barrio Alto, le Chiado, mais on finit par vagabonder sans trop savoir où l’on va, tombant sur un château, une cathédrale, une pâtisserie japonaise, une rue commerçante, une brocante, un groupe d’allumés qui joue du tambour, vraiment par hasard.
Lisbonne mélange les décors de cartes de postales et ceux des tableaux pittoresques. On se sent aussi bien sur une terrasse que dans un ancien monastère converti en restaurant géant dans lequel on déguste des poêlés de crevettes sautées à l’ail et des pièces de boeufs goutues. Le premier soir, on a même mangé en écoutant du fado, ces chants portugais mélancoliques interprétés par des artistes à la voix puissante.
On reviendra la voir, changer de couleur, car on a trop souvent vu la pluie, deux jours sur trois. On prendra le temps de visiter Belem, prendre le bateau pour aller jusqu’au Cristo Rei, et manger plus de pastéis de natas.