Deux jours seulement (17 et 18) pour voir Cribles / Live, d’Emmanuelle Huynh au Centre Pompidou sur la musique Persephassa* de Iannis Xenakis. Six percussionnistes (Percussions Rhizome) sur des plateaux, quatre sur scène, deux dans la salle. Les danseurs (cinq hommes, six femmes) apparaissent un par un sur scène, courant, s’évitant l’un l’autre, feintant : un jeu de cour de récréation, de chat perché. Je ne sais lequel est l’ancre première, mais, dès qu’ils se touchent, des chaînes se forment, deux, trois danseurs se tenant par la main; les chaînes s’évitent, s’affrontent, se narguent, puis se rejoignent, formant une chaîne plus large. Les danseurs individuels restant tentent d’y échapper, se font attraper. Bientôt, il n’en reste qu’un seul, maigre, barbichu, en maillot rose. Dernier électron libre face à la meute, il tente d’y échapper, puis, coincé au terme d’un ultime combat, il doit les rejoindre. Fut-ce un jeu innocent ? ou une métaphore de prolifération, de contagion, de propagation d’un virus, médical ou moral ?
Alors se forme la ronde, animal unique à 22 jambes, lien qui jamais ne se rompt, où l’individualité de chacun se perd dans la communauté. Et les percussions tapent, tapent de plus en plus fort. Cette ronde rituelle, gaie et violente à la fois, évoque l’enfance, la fête, la victoire, la procession. Tantôt l’un entraîne, tantôt l’autre résiste; chacun est meneur tour à tour. Le groupe multiforme est toujours plus fort que chacun.
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* Pièce créée en 1969 pour le Festival de la Shahbanou à Persépolis/ Shiraz (on peut aussi penser à Perséphone, la déesse tellurique). Extrait à écouter (ou l’intégrale ici, là et là).
Photos courtoisie du service de presse ©Marc Domage.