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127 Heures

Par Mg

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127 heures, de Danny Boyle, c’est l’histoire vraie d’Aron Ralston (James Franco), qui s’est retrouvé la main coincée par un rocher lors d’une randonnée dans le désert de l’Utah et qui, au bout de 127 heures, a décidé de se couper la main pour en réchapper. La scène d’amputation semble être le seul but du film, le morceau de bravoure tant attendu, et en effet, il faut avoir le cœur bien accroché, pas tant parce que la scène est réussie (elle ne l’est pas) que parce qu’elle est assez dégueulasse et que Boyle semble avoir eu pour objectif d’atteindre des sommets dans ce sens. Que ce qui est montré soit pénible à regarder n’est pas critiquable en soi, mais cela ne suffit pas à créer du sens et ne constitue pas en soi un projet de cinéma pertinent. Ici, le spectacle devient voyeurisme dans ce qu’il a de plus vulgaire.

Avant d’en arriver là, le spectateur a d’autres épreuves à subir : pour résumer, un mauvais film. Les effets de style inutiles, grossiers et de mauvais goût s’accumulent : pour les plus supportables, travelings accélérés, split screens ; au pire, gros plans dans la gourde à chaque fois que notre héros boit, avec la bouche qui fait schloup schloup en arrière-plan, et puis gros bouillons d’urine, une fois qu’il a la main entre deux rochers et n’a plus grand-chose d’autre à faire que pipi ou raconter à sa caméra qu’il ne fait pas caca. La bande-son est bruyante : musique envahissante, gloupf gloupf quand il boit, kriiiik kriiiik (et bien d’autres kriiiik encore) quand il essaie péniblement de se couper un nerf (bien sûr, il y arrive, puisqu’il repart sans la main), il ne manque plus que les gazouillis d’oiseaux quand il pisse. Inutile de dire qu’il n’y a pas grand suspens, puisqu’on sait d’emblée que les tentatives pour se dégager n’aboutiront pas avant 127 heures et le très attendu découpage de main. D’où l’inutilité totale de la fausse piste lancée lorsqu’on le voit se dégager à l’occasion d’un orage, traverser le désert, retrouver la civilisation… et non, ce n’était qu’un rêve…

Le personnage principal, de surcroît, est exaspérant (question de goût ?), et son narcissisme est d’autant plus insupportable qu’il n’est que trop symptomatique du narcissisme du film. Le spectaculaire est exploité sans état d’âme dans ce qu’il a de plus obscène et vide. Non, nous n’aurons même pas droit à la révélation de la petitesse de l’humain coupable de péché d’hubris face à la nature. On en est encore en deçà: au plus profond de sa remise en question, notre héros se dit qu’il a été très, très égoïste et que c’est pour le punir de s’être pris pour un super héros que ce rocher a été créé et a attendu pendant des millions d’années, rien que pour lui. Bref, la supposée sortie du narcissisme n’en est que le comble.

Pour meubler ces 127 heures (dont à peu près 126 nous sont épargnées, Dieu merci) et apporter un peu de variété, Danny Boyle a recours à quelques gadgets pour le moins peu originaux. Notre randonneur malheureux se filme avec sa petite caméra, ce qui nous vaut quelques regards caméra et passages obligés comme « nous sommes le samedi 32 de tel mois, il est 17h, je suis coincé depuis 4 heures, j’aime beaucoup mon papa et ma maman et je ne leur ai pas assez dit, etc ». Les flash-back sont aussi de la partie (par exemple, quand il enlève ses lentilles de contact pour les manger, on le voit le matin, quand il mettait ses lentilles). A voir notre héros se regarder sur l’écran de sa caméra, on imagine très bien Danny Boyle se délecter de ce qu’il filme, qui est on ne peut plus vide mais qu’il doit imaginer très spectaculaire, et c’est assez obscène.

Retrouvez la critique inverse de Mg sur Onlike.



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