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Le gifle de Christos Tsiolkas

Par Sylvie

AUSTRALIE

 

La gifle

Editions Belfond, 2011

 

L'une des révélations étrangères de cette rentrée 2011. Un roman australien, première originalité. Ecrit par un auteur australien d'origine grecque, deuxième originalité. Ce dernier nous fait découvrir les échecs du melting pot australien, cette île immense si à part, qu'on ne connaît pas "son envers du décors".

 

Et c'est justement le grand mérite de ce roman de faire un portrait sans concession d'une société malade de surconsommation et de racisme ; La gifle a déjà remporté un énorme succès en Australie (Prix du Commonwealth, Man Booker Prize). Il vient d'être réédité une deuxième fois en France ; 1ère traduction en France, pour un auteur dont  l'oeuvre ne nous est pas tout à fait inconnue puisqu'il est l'auteur de Head On, adapté au cinéma par Fatih Akin.

 

Les critiques évoquent l'influence des Correctionsde Jonathan Franzen ; c'est vrai que l'on y retrouve un beau portrait de groupe, microcosme d'une société occidentale malade. Mais même si ce roman est de bonne facture, il n'a pas la qualité littéraire nécessaire pour "durer". Mais le thème et l'intrigue ont de quoi faire oublier ce petit bémol.

 

 

Le prétexte qui donne son titre au roman : une gifle donnée lors d'un repas entre amis, lors d'une soirée barbecue à Melbourne. Chez Hector et Aïcha, respectivement immigrés grecs et indiens, couple modèle de l'intégration réussie, se réunissent la famille et les amis. Tout à coup, une dispute éclate entre deux enfants. Le plus petit, insupportable tient une batte de base-ball. Ne supportant pas le laxisme des parents de Hugo, Harry lui administre une belle gifle.

 

C'est la déflagration...Les parents, Rosie et Gary, attaquent en justice Harry. Et les uns et les autres prennent partie pour l'un des deux camps....

 

A travers cette péripétie éminemment théâtrale, ce fait divers digne des journaux télévisés, se joue une réflexion générale sur l'éducation, et la vision de la société. L'auteur prend bien garde de ne pas trancher : il explore avec brio les travers de chaque camp : entre Harry, le garagiste parvenu, richissime, raciste qui crâne sur sa terrasse devant la mer et Rosie et Gary, le couple soixantuitard, laxiste et sans ambition, le lecteur est bien partagé....

 

Le principal intérêt de ce livre (et c'est en cela que l'auteur révèle son talent) est que Tsiolkas se met dans la peau de chaque personnage ; chaque section du roman est consacrée à un personnage et l'histoire est racontée à travers son regard. L'auteur se met aussi bien dans la peau d'un retraité (une vieil immigré grec) que d'une mère, une femme célibataire, un adolescent mal dans sa peau, un homme qui a la crise de la quarantaine. Et à travers ces chapitres, il questionne aussi bien le passé (l'arrivée des "métèques" grecs et européens de l'Est en Australie), le présent (la génération gâtée, blasée d'avoir tout obtenu) et le futur (à travers les ados, micro société de la drogue et du sexe).

A travers toutes ces générations, c'est l'échec de la société occidentale qui est visé : racisme, échec du melting pot, absence d'éducation, frustrations en tout genre, extrême solitude aussi bien des vieux que des jeunes).

 

On attend un drame, une catastrophe dans le genre des faux thrillers. Elle ne viendra pas. Tsiolkas se contente juste de faire un constat amer brillamment orchestré.

 

Dépaysant par le pays qu'il décrit, ce roman ne fait finalement que nous renvoyer vers nous mêmes, occidental déchu...


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