A partir de la question de
savoir si engager un grand débat public sur l’Islam est judicieux ou non,
Corto
se demande plus généralement « si nous sommes aujourd'hui capables, en
France, d'aborder un sujet fondamental pour la cohésion républicaine et notre
Vivre Ensemble sans sombrer dans les dérapages, les invectives, les jugements
péremptoires et autres calculs électoraux ? »
Il me semble qu’il n’y a pas besoin de faire une analyse texte très fouillée
pour déduire de la manière dont est posée la question, que la réponse de Corto
est « non, nous ne sommes pas capables de … »
Et puisque Corto me fait le plaisir de solliciter mon avis sur cette
question, eh bien, je dirais, hélas, exactement la même chose et sans le point
d'interrogation !!!!...j’ai d’ailleurs eu souvent l’occasion de m’en plaindre
dans de précédents billets !
C’est bien simple, les grands débats de ces dernières années ont tous foirés
ou avortés !
Celui sur le projet de constitution européenne n’a été qu’une confrontation
entre les maladresses des uns et les affirmations péremptoires et simplistes
sinon mensongères des autres !
Celui du financement des retraites, sujet qui concerne pourtant tout le
monde, qui peut dire, sans rire, qu’il a été efficace !!!!
De part et d’autre, chacun est resté sur ses positions !...un débat à
l’issue duquel tout le monde reste sur ses positions, positions souvent
radicales de surcroit, est un débat raté !
Nous avons eu, d'un côté, ceux qui considéraient que le bruit médiatique,
les manifestations fleuves et les grèves à répétition pouvait faire office de
débat et de l'autre ceux qui ont tout fait pour limiter le débat à quelques
aspects précis du sujet, non négociables !
Souvenons-nous lorsque Martine Aubry avait
eu le malheur d’évoquer que peut-être, sous certaines conditions, il n’était
pas aberrant d’imaginer de relever l’âge légal de départ à la retraite de 60 à
61 voire 62 ans, le tollé général que ça a provoqué à Gauche !!!!
Pas l’ombre d’une discussion, d’un débat, même interne au PS, non, non, ça a
été immédiatement le tir au mortier sur la Martine qui s’est évidemment
empressé de faire une piteuse marche arrière !
Mais le pire, ce ne sont pas les débats ratés mais les débats qui n’ont pas
lieu ou qui n’ont lieu qu’à moitié, parce que le sujet a été déclaré, sans
débat préalable évidemment, tabou !
Le débat sur l’identité nationale en est un exemple parfait puisque ce n’a
été qu’invectives et anathèmes non pas sur le fond mais sur l’opportunité ou
non de débattre du sujet !!!
En Janvier de l’année dernière, sur ce sujet, je m’étais bien énervé
suite au coup mediatico-politique de Peillon qui avait, sans prévenir et au
dernier moment, refusé de participer à un débat organisé par France2 sur
l’Identité nationale.
Dans ce billet intitulé « Sans débat pas de démocratie », que je viens
de relire et qui 1 an après n’a malheureusement pas pris une ride, je répondais
déjà à la question de Corto (un petit extrait) : « (…) il faut en
avoir des certitudes et des œillères pour ne pas voir que sur beaucoup de
sujets autour de ce thème, comme l’immigration mais pas seulement, il y a de
nombreuses questions qui méritent d’être débattues pour que la collectivité
nationale fonctionne mieux et de manière plus apaisée !
Même si on se limite au sujet de l’immigration, au vu des réactions que
provoquent la moindre expulsion d’immigrés clandestins, pourtant opérée dans le
cadre de la Loi de la république, il y a clairement un manque de consensus sur
un sujet important !....Et comment peut-on le rechercher, sinon le trouver, ce
consensus, sans débat ?? »
Dans cette catégorie des non débats, on trouve un tas de sujets :
l’immigration évidemment, la TVA sociale, l’intégration, le communautarisme,
les banlieues, la délinquance ou l’islam qui est bien partis pour intégrer la
liste !
Or, refuser de débattre, surtout sur des sujets sensibles, c'est laisser la
place aux extrêmes, c'est les laisser exprimer leur populisme et leurs fausses
réponses sans contradictions !
Donc si on résume, entre les débats foirés pour cause de « dérapages,
invectives, jugements péremptoires et autres calculs électoraux » et les
débats qui n’ont pas lieu alors qu’on en aurait besoin, il ne reste pas
grand-chose pour faire fonctionner notre démocratie !
Et, je le répète, sans débat, pas de démocratie !
Ce qui amène tout naturellement à la vraie question que pose le billet de
Corto à propos de l’Islam mais qui peut être généralisée à beaucoup d’autres
sujets: Vaut-il mieux un mauvais débat plutôt que pas de débat du tout
?