Éditeur : Leo Scheer - Date de parution : 02/01/2011 - 254 pages tourbillonnantes...
Un dîner chic chez des gens chics. Pourrait-on dire. Un dîner avec des invités comme il faut pour une soirée réussie. Quand Edmond s’y rend, il pressent que le vent va tourner en sa défaveur. En effet, son meilleur ami le dédaigne, sa femme le délaisse. Benjamin, la trentaine, fils d’un chef d’entreprise croit que son jour de gloire a enfin sonné. Tout ce petit monde s’attend à une soirée convenue sans un mot de travers. Sauf que le ballet des petits-fours, des conversations, des amitiéset des amours va prendre une tournure inattendue…Et l’auteure a réussi un pari sans même le savoir. Vous savez tous que j’aime les écritures aux phrases courtes, concises. Pourtant le style de cette auteure est à l’opposé. Et qui dit phrases longues, dit « bibi qui se lasse et qui finit par décrocher au bout d’un moment ». J’admets qu’il m’a fallu me faire à ce style, l’apprivoiser. Pas longtemps. Le temps des deux ou trois premières pages et ensuite il s’agit de l’écriture de Sibylle Grimbert qui m’a accrochée. Pari gagné, renversement de situation comme l’histoire de ce livre (quelle transition réussie!). J’aime quand les personnes guindées sont bousculées, quand les convenances bobo sont malmenées, que tout ce petit monde bien propre, bien soigné et dûment installé sur ses lauriers de la réussite sociale soit remué. Les personnalités jusqu’ici muselées apparaissent, les langues se délient et les masques tombent. Le temps d’une soirée où Marianne voit ses invités se trémousser sur la danse des canards (oh, l’horreur !), où Edmond, éditeur, refuse un manuscrit qui finit dans un seau à champagne. Mais surtout le temps que Benjamin le fils écrasé et dominé par son père se donne l’illusion d’avoir les rênes en mains, le temps de croire qu’il peut exister par lui-même. Les amitiés changent de camps, on se toise puis oui on se soutient dans l’adversité. Mais une soirée est éphémère et quand chacun enfile son manteau, les « on s’appelle, promis ? » sont vite oubliés. Sibylle Grimbert décrit cette danse endiablée où les personnages s’entrechoquent, se heurtent et tombent. Pas à coups de couteaux de boucher mais avecune finesse grinçante d’ironie. Une belle découverte !Le billet de Livrogne.Il fallait s’observer avec le même regard que celui qu’on porte sur un étranger croisé dans la fils d’un bureau de tabac ou sur un passage piétons, avec indifférence, sans intériorité, sans ce ramassis d’espoirs et de déceptions, sans toutes ces histoires particulières qui nous rendent si singulières à nos propres yeux.