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Kadhafi, le dernier roi d’Ecosse ?

Par Jazzthierry

On trouve dans l’opéra de Verdi, un moment tout à fait étrange, qui ne figure pas vraiment dans la pièce de Shakespeare. Des exilés écossais, malmenés par le tyran Macbeth, s’arrêtent un instant au milieu d’une forêt, pour former ce choeur et chanter “Patria opressa”. On songe évidemment au plus célèbre “Va pensiero” de Nabucco exaltant de façon similaire les sentiments patriotiques pour inciter les Italiens qui ne formaient pas encore une nation, à continuer la lutte contre l’opresseur autrichien. Aujourd’hui, lorsque je vois ces combattants libyens qualifiés tantôt de terroristes ou bien de rebelles, ces hordes de réfugiés fuyant les bombardements pour réjoindre la frontière tunisienne, je crois que la comparaison avec Macbeth n’est pas la moins pertinente. D’autant que la Libye comme le souligne nombre d’observateurs, n’est pas vraiment une nation, néanmoins on peut se demander si elle n’est pas en train de le devenir actuellement…

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Hisham Matar, opposant de longue date, rappelait dans les colonnes du Monde, combien le peuple libyen s’était senti uni et soudé contre l’impérialisme italien de Mussolini. Le même homme considère que la très lourde page de la dictature de Kadhafi, nouvelle figure grotesque de Macbeth, est déjà presque tournée et qu’actuellement il est de nouveau fier de son pays. Mais encore plus significatif, il parle de “l’âme” du peuple libyen et là j’ai immédiatement pensé à la fameuse conférence de Renan, publiée initialement en 1869 et qui tentait de définir le concept de nation. Il écrivait “une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui à vrai dire, n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis. L’homme messieurs ne s’improvise pas. La nation, comme l’individus, est l’aboutissant d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements.” Kadhafi en tirant sur son peuple, est en train de créer une nation. Rien de moins.


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