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Oscar du lyrisme et d’une certaine nostalgie

Par Borokoff

A propos de Revenge de Susanne Bier 3 out of 5 stars

Oscar du lyrisme et d’une certaine nostalgie

Anton, un médecin suédois en train de se séparer de sa femme Marianne qu’il a trompée, travaille entre le Danemark et l’Afrique. Son fils Elias, âgé d’une dizaine d’années, s’est fait un nouvel ami à l’école, Christian. Très marqué par le récent décès de sa mère, morte d’un cancer, Christian se lie rapidement d’amitié avec Elias, persécuté par d’autres élèves. Mais Christian commence à exercer une influence très néfaste sur Elias, à qui il met en tête de fabriquer une bombe…

Dans une note d’intentions, la réalisatrice Susanne Bier parlait de « désordre », de « chaos » et de « comportements archaïques » qu’une société moderne occidentale pouvait étrangement et paradoxalement engendrer y compris chez des enfants de 12 ans. Pourtant, ce n’est pas ce que l’on retient de son nouveau film, récompensé par l’oscar du meilleur film étranger.

Car il y a une matière romanesque et poétique qui prévaut dans son film. Une puissance dramatique qui le hisse au-delà de ces considérations. Malgré quelques longueurs et maladresses, Revenge tient bien les 2 heures qu’il dure pratiquement. Parfois, en rajouter dans le dramatique, dans l’affect convient bien à un film. C’est le cas dans Revenge, qui s’ouvre sur un plan d’un médecin blanc arrivant dans un camp africain pour soigner des réfugiés victimes d’une guerre civile.

La photographie et les paysages sont superbes, le ciel orageux fait écho aux gros plans sur le visage tourmenté d’Anton, à l’inquiétude qu’il semble avoir, si loin de son pays. La musique de Johan Söderqvist, les ralentis même un peu maladroits sur ces enfants africains courant derrière une camionnette en criant « How are you ? », parviennent à installer une ambiance, à créer une tension dramatique qui ne se démentiront pas.

C’est que Revenge s’appuie sur une mise en scène et un scénario solides. Deux enfants liés par deux traumatismes familiaux. Christian est la forte tête, beaucoup plus solide qu’Elias, enfant frêle et fragile perturbé par la séparation de ses parents et martyrisé à l’école par ses camarades. Froid, calculateur, Christian n’a pas de mal à manipuler Elias. Christian est rongé par le ressentiment qu’il éprouve à l’égard de son père, qu’il traite de « menteur » et juge responsable de la mort de sa mère.

Ce qui est étonnant dans ce film, c’est que tout en racontant l’histoire d’amitié de deux enfants malheureux et seuls au final, Revenge parvient à parler de tout autre chose. Dans ces plans en Afrique, le refrain entêtant du film, cette scène du cerf-volant immobile dans le ciel, il y a comme un parfum de mélancolie voire de nostalgie. Comme si le scénario du film était prétexte à convoquer en creux des souvenirs intimes et sentimentaux, toute une mémoire affective et amoureuse pour la réalisatrice.

La véritable force de Revenge tient dans la photographie de Morten Søborg, dans ces plans sur la nature et la campagne danoises. Il y a une poésie dans l’attention que porte Bier aux paysages qui la rapproche parfois d’un Malick. Ce n’est pas le scénario qui prime encore une fois dans Revenge, ni la morale de l’histoire. C’est la beauté des images, les souvenirs qu’ils convoquent derrière ce que le scénario raconte. Anton appelant sa femme pour s’excuser de l’avoir trompée, Anton tenant ses fils dans ses bras, assis dans un champ, au bord de la mer au soleil couchant, etc… La matière dramatique et picturale de Revenge, la beauté des plans, la poésie et le pouvoir d’évocation qui en émanent sont bien des arguments de cinéma.

www.youtube.com/watch?v=dmxrNcJnd_c


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