Il fut un temps où on ne mangeait pas dans la rue, ça ne se faisait pas, on prenait ses repas à heures fixes et à table, dans la cuisine ou dans la salle à manger et jamais devant la télé. Ces repas étaient constitués d'une entrée (crudités au déjeuner, potage ou soupe au dîner), d'un plat de viande ou de poisson (en tout cas le vendredi) avec des légumes ou des féculents, d'un laitage ou d'un fromage et d'un dessert (des fruits en semaine, un gâteau le dimanche)…
Il fut un temps où on mangeait en respectant de bonnes manières…
- Il y avait du pain sur la table : on devait en manger, sauf avec les pâtes et le riz ;
- On n'avait pas le droit de grignoter avant de passer à table ;
- On attendait que tout le monde soit servi pour commencer son assiette ;
- On devait demander la permission avant de se resservir ;
- On se faisait gronder par Papa ou Maman quand on mangeait trop vite ;
- Si on ne terminait pas ses légumes, on n'avait pas droit au dessert ;
- On ne parlait pas la bouche pleine ;
- On devait s'essuyer la bouche avant de boire ;
- On buvait essentiellement de l'eau ; les enfants avaient droit à une goutte de sirop parfois dans celle-ci, juste pour colorer ;
- Biscuits, chocolat et autres « friandises » étaient enfermés dans le placard : on n'avait pas le droit de se servir tout seul : Maman ou un adulte distribuait ;
- On ne plongeait pas non plus dans le réfrigérateur.
Il fut un temps où il y avait très peu d’enfants trop gros…
Est-ce parce que l'alimentation était encadrée par ces bonnes manières que certains auraient maintenant tendance à qualifier de ringardes et qui sont oubliées de beaucoup ?
Lorsqu'on lit « Manger : Français, Européens et Américains face à l'alimentation » (Édition Odile Jacob), résultat d'une formidable étude menée par Claude Fischler, sociologue spécialiste de l'alimentation, et Estelle Masson (psychologue sociale), on peut se poser la question !
On y constate - entre autres - que les Américains mangent vite, partout, à n'importe quelle heure, en faisant autre chose en même temps, sans grand souci de convivialité. Ils sont d'ailleurs sidérés par la rigidité des bonnes manières françaises, de ces repas pris à heures fixes, à table, avec un menu. Or, l'obésité règne, on le sait, depuis des décennies aux Etats-Unis.
En France, l'obésité et surtout celle des enfants suit une courbe tristement ascendante. Mais elle ne rejoint pas encore l'importance de celle qui frappe les Américains. On peut se dire que nos bonnes manières sont un rempart efficace contre la prise de poids et qu'elles n'ont vraiment rien de ringard !
Par Paule Neyrat, Diététicienne - http://www.e-sante.fr/