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Pharoahe Monch : W.A.R.

Publié le 24 mars 2011 par Crazyhorus

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Dans le circuit depuis 1991, Pharoahe Monch peut s'enorgueillir d'être un des rares anciens à susciter encore de l'intérêt. Alors que de nombreux vétérans des 90's tentent tant bien que mal de garder la tête hors de l'eau, Troy Donald Jamerson s'est efforcé durant tout le long de sa carrière d'entretenir la flamme. Lyriciste de grande classe, adepte des métaphores filées et des rimes complexes, Pharoahe Monch a affolé l'underground new yorkais durant les années Oganized Konfusion grâce à des albums comme Organized Konfusion (1991), Stress : The Extinction Agenda (1994) et ses ogives dévastatrices que sont « Stray Bullet », « Stress » et « Let's Organise ». En 1997, après un dernier album honorable (The Equinox), le groupe soucieux de conserver sa qualité discographique se sépare. Ce qui aurait pu s'apparenter à une sonnerie de glas pour le MC du Queens s'avère être en réalité un immense champ des possibles qu'il exploitera avec succès en 1999 avec Internal Affairs et en 2007 sur Desire. Deux opus, et deux atmosphères radicalement différentes pour un résultat d'une efficacité rare. Si le premier érigé en classique de la fameuse période Rawkus colle parfaitement au style du label lui offrant au passage le volcanique « Simon Says », le deuxième s'est entiché d'une soul organique décapante parfaitement orchestrée. Inutile de préciser que ce nouvel album W.A.R. était attendu avec une impatience non feinte de la part d'un public toujours aussi insatiable.

En empruntant le sillon creusé quelques années plus tôt par Desire, W.A.R. s'inscrit dans une continuité sans pour autant s'engouffrer dans une copie conforme. L'équipe en charge de la production est d'ailleurs là pour le rappeler (M-Phazes, Marco Polo, Exile, Diamond D...). Autant de beatmakers qui ont su exactement coller au plus près des exigences du MC, chose parfois difficile à mettre en place pour obtenir un ensemble cohérent. W.A.R. se distingue alors de par la pertinence de la succession de morceaux frondeurs comme « W.A.R » (avec un Immortal Technique parfait dans son rôle d'agitateur politique) et « Clap » dont les claquements de mains ne sont pas sans rappeler le « Body Baby » de Desire. Deux titres décapants ponctués d'un envol fracassant de guitare électrique et de scratches acérés finement exécutés par DJ Boogie Blind. A la conclusion de ce doublon détonnant, « Black Hand Side » vient apaiser les esprits de son hook fraternel et avenant.

La direction artistique est une nouvelle fois irréprochable et la cohésion est de règle. On assiste ainsi à la mise en place de

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morceaux étincelants comme « Evolve », « Let My People Go », ou « Shine » pour lequel Mela Machinko fait montre d'une certaine mesure vocale sur un beat qui l'est tout autant. Un contraste qui sans dépareiller, tranche sensiblement, avec la fulgurance des deux productions d'M-Phazes que sont « The Hitman » et « Assassins » feat. Jean Grae et Royce da 5'9'' qui délivrent chacun un verse enflammé sur un scénario d'anticipation (« In 2013, the World Government placed sanctions against freethinking individuals in order to force people to adhere to one way of life...). Pharaoahe Monch quitte par la suite sa tenue d'assassin fugitif pour s'échapper vers la beauté exutoire de « The Grand Illusion (Circa 1973) », morceau investi d'une dimension planante qui passe le relais de manière admirable au chant de Jill Scott (« Still Standing ») gagné peu à peu par des cuivres aériens salutaires.

Le final est grandiose, et l'apothéose saisissante offre une conclusion pleine d'espoir. A juste titre W.A.R. est un album profondément subversif plongé dans un monde arbitraire soumis au pouvoir de l'argent. Pharoahe Monch se dote ainsi d'une dimension presque anarchique sur cet opus à la conscience éveillée et emprunt d'une finesse remarquable. W.A.R. est en quelque sorte le point final d'une discographique dressée comme un immense doigt d'honneur à la suffisance des technocrates.

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