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Rue de la Maréchale : Balades à La Rochelle (35)

Publié le 31 mars 2011 par Sheumas

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   Les princes ont leurs favorites et leur témoignent de galantes attentions plus ou moins tapageuses. Dans la proximité de la modeste rue de la Maréchale, pas de villa de la Favorite comme à Palerme, pas de splendide palais, mais une simple fontaine que le mari, très amoureux, avait fait ériger à son épouse pour qu’elle pût, au moment de la promenade, y laisser souffler son cheval.

   La délicatesse et la galanterie de ce maréchal de Chamilly avaient sans doute inspiré des passions puisque pour ironiser sur son manque d’esprit et de conversation, le célèbre mémorialiste Saint-Simon avait fait courir le bruit que la malheureuse épistolière des célèbres « Lettres portugaises », religieuse affolée rencontrée dans sa jeunesse au Portugal, aurait envoyé au beau militaire ces lettres d’amour éperdues restées sans réponses.

Asseyons-nous près de la fontaine et lisons-en un extrait :

On est beaucoup plus heureux, et on sent quelque chose de bien plus touchant, quand on aime violemment, que lorsqu'on est aimé

Je ne sais pourquoi je vous écris, je vois bien que vous aurez seulement pitié de moi, et je ne veux point de votre pitié ; j'ai bien du dépit contre moi-même, quand je fais réflexion sur tout ce que je vous ai sacrifié : j'ai perdu ma réputation, je me suis exposée à la fureur de mes parents, à la sévérité des lois de ce Pays contre les Religieuses, et à votre ingratitude, qui me paraît le plus grand de tous les malheurs : cependant je sens bien que mes remords ne sont pas véritables, que je voudrais du meilleur de mon coeur, avoir couru pour l'amour de vous de plus grands dangers, et que j'ai un plaisir funeste d'avoir hasardé ma vie et mon honneur ; tout ce que j'ai de plus précieux, ne devait-il pas être en votre disposition ? Et ne dois-je pas être bien aise de l'avoir employé comme j'ai fait : il me semble même que je ne suis guère contente ni de mes douleurs, ni de l'excès de mon amour, quoique je ne puisse, hélas ! me flatter assez pour être contente de vous ; je vis, infidèle que je suis, et je fais autant de choses pour conserver ma vie, que pour la perdre. Ah ! j'en meurs de honte : mon désespoir n'est donc que dans mes Lettres ? Si je vous aimais autant que je vous l'ai dit mille fois, ne serais-je pas morte, il y a longtemps ? Je vous ai trompé, c'est à vous à vous plaindre de moi : Hélas ! pourquoi ne vous en plaignez-vous pas ? Je vous ai vu partir, je ne puis espérer de vous voir jamais de retour, et je respire cependant : je vous ai trahi, je vous en demande pardon : mais ne me l'accordez pas ? Traitez-moi sévèrement ? Ne trouvez point que mes sentiments soient assez violents ? Soyez plus difficile à contenter ? Mandez-moi que vous voulez que je meure d'amour pour vous ? Et je vous conjure de me donner ce secours, afin que je surmonte la faiblesse de mon sexe, et que je finisse toutes mes irrésolutions par un véritable désespoir


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