Magazine Cinéma
Une rencontre inattendue dans les toilettes, quelques sourires, un baiser, un coup de foudre. Ca se passe comme ça à Hollywood. Facile. Simple. Beau. The Adjustment Bureau raconte avant tout cet amour soudain, unique, cette union foudroyante de deux âmes sœurs, Elise (Emily Blunt, parfaite comme toujours) – danseuse à la carrière naissante- et David (Matt Damon, d’une belle sobriété), politicien archiconnu. Sauf qu’une mystérieuse assemblée d’hommes en costumes en a décidé autrement : ce n’est pas le plan que ces vies-là doivent suivre. Et pas question de dévier du plan. Adapté d’une nouvelle de Philip K. Dick, The Adjustment Bureau est un film séduisant. D’abord parce que George Nolfi- à la base scénariste (Ocean’s Twelve, The Sentinel, La Vengeance dans la peau)- s’en tire plutôt bien pour son premier long métrage, en soignant son regard sur New-York, captant les petits riens, au passage, les failles dans les regards, quelque chose d’authentique. Ensuite parce qu’il dirige ses acteurs avec classe : Damon ne se casse pas les dents dans le rôle difficile de l’amoureux, Blunt confirme toutes ses promesses depuis My Summer of Love. Enfin, parce qu’il teinte habilement sa romance de touches SF qui, si elles n’ont pas la complexité sublime de celles du dernier Nolan, offrent tout de même une belle marge de réflexion sur des thématiques toujours passionnantes (le destin, le libre-arbitre et autres dérivés).
Passée l’exacerbation allègre et naïve de cette conception très américaine- aussi irrésistible que nocive- d’un idéal amoureux et spirituel, l’œuvre est captivante, efficace, sublimée par un vent de romantisme paroxystique mais pas cucul pour un sou. Malgré tout, on y croit jusqu’au bout à notre fin, tragique et nuancée, qui ferait chialer dans les chaumières ! A la sauce In the Air de Reitman. Une idylle nourrie aux chimères du cinéma qui se casserait la gueule dans un rappel cruel à la réalité. En cela, l’ultime baiser possède cette puissance folle qu’offrent les tragédies- et, pour un bref instant....contente nos instincts sadiques. Avant la caresse dans le sens du poil, l’édulcoration du réel, le hara kiri monstrueux d’une œuvre qui se sabote toute seule. En dix minutes top chrono. Comme le dit coup de foudre, mais à l’envers.