Sur une planète brûlée par les rayons de deux soleils, des colons d’un autre temps traînent leur misérable existence dans de petits villages qui rappellent le Far West américain. Voici des centaines d’années qu’un vaisseau les a débarqués sur cette terre aride et poussiéreuse. Ils connaissent un peu leur histoire, mais personne ne sait d’où provient cette technologie perdue qui leur permet encore aujourd’hui de cultiver un sol pourtant désertique. Vash The Stampede appartient à ce monde sans foi ni loi.
Grand, blond, costaud et les cheveux coiffés en pétard, il porte le doux surnom de Typhon Humain. Accusé d’avoir anéanti des villes entières, de terroriser les femmes et d’avoir commis des actes innommables, sa tête est mise à pris pour 60 milliards de dollars. Il est par ailleurs aussi recherché par Meryl et Milly, deux jolies agents de la société d’assurance Bernardelli et chargées de prévenir ses futures catastrophes pour éviter que leur compagnie fasse faillite. Le pire, c’est que Vash est un grand pacifiste incapable de faire de mal à une mouche, mais sa maladresse atteint des sommets…
Ce qui ressort de façon assez évidente dans Trigun, c’est l’hommage aux pop cultures américaines. Si le genre western saute aux yeux, on y discerne aussi quelques clins d’œil à d’autres spécificités états-uniennes, telles que les super-héros ou encore la dominance des commandements bibliques à travers le personnage de Wolfwood, entre autres… Aussi semble-t-il normal d’entendre une bande son qui sort de l’ordinaire, en retranscrivant d’ailleurs à merveille ce sentiment de liberté et d’évasion qui exsude de ces vastes territoires désertiques ; rien à voir avec Ennio Morricone cependant car Trigun se veut à la fois plus moderne dans la facture et plus « musclé » dans la narration.
D’autres références de l’Ouest sauvage avec les noms des personnages Meryl Deringer et Milly Stungun, foncièrement anglo-saxons, ou bien les gigantesques « trains du désert » Sand Steamer, réinterprétation originale du design des vieilles locomotives Pacific, mais aussi, bien sûr, dans le duel final, qui atteint des sommets du genre. Des clins d’œil aussi, à des productions comme Akira – le manga (1982), pas le film (1988) – pour le « trou » dans la cinquième lune de Gunsmoke, mais aussi au film culte Vidéodrome (1983) de David Cronemberg pour le « bras d’ange » de Vash, ou encore des character designs qui ne vont pas sans rappeler l’œuvre d’un certain Philippe Druillet – un gage de qualité… Bref, on trouve dans cette production un ensemble d’éléments visuels et artistiques non seulement tout à fait réussis mais qui posent aussi une ambiance certaine, car efficace, à défaut de se montrer véritablement originaux et personnels – des épithètes par ailleurs bien souvent galvaudés. Trigun se place donc de toute évidence dans le registre de l’hommage.
L’anime se voulant surtout humoristique, la narration prend son temps pour arriver à la « substantifique moelle » et peut-être un peu trop d’ailleurs, d’autant plus que cette seconde partie de la série n’est pas exempte d’épisodes de remplissage ni de flashbacks. Si elle se montre plus prenante, cette deuxième moitié se veut aussi plus conventionnelle, reprenant le thème un peu éculé des dolls à travers un design qui ne va pas sans rappeler le travail de Masamune Shirow en général et Black Magic M-66 (1987) en particulier, mais en proposant aussi son lot de poésie, comme les « êtres qui vivent hors du temps », concept tout à fait intéressant qui restera hélas à peine effleuré par le récit même si on comprend assez vite que Vash fait partie de ce peuple mystérieux – on aurait apprécié que Trigun ne fasse pas que flirter avec le transhumanisme mais au contraire s’y plonge plus franchement pour proposer une réflexion supplémentaire sur ce qui s’annonce peut-être comme un des plus grands défis de l’avenir, au lieu d’en perpétuer les clichés les plus éculés.
Malgré toutes ses nombreuses qualités, Trigun se veut surtout un spectacle divertissant et y réussit plutôt bien en dépit de quelques lourdeurs ici et là mais aussi d’une surabondance de super deformeds qui lasse un peu… Vous ne perdrez pas votre temps à le regarder mais vous voudrez peut-être vous consacrer à autre chose si vous êtes plus porté sur la réflexion que le pur spectacle. Les fans du manga original, quant à eux, ont fait leur choix depuis longtemps.
Notes :
Cet anime est une adaptation du manga éponyme de Yasuhiro Nightow, paru en 1996 au Japon et disponible en deux volumes chez Tonkam. Une seconde série, Trigun Maximum, disponible chez le même éditeur en 14 tomes, lui fait suite.
Selon les déclarations de Nightow, l’anglais est la langue officielle des habitants du monde de Gunsmoke.
La lettre D dans Nicholas D. Wolfwood signifie Dokonokuminomonjawaresumaki- nishiteshizumetarokakora. Sans rire… Quant à sa croix, elle s’appelle Punisher.
Le comics Spiderman eut une importante influence sur Nightow. Le personnage de Monev la Galle fut inspiré par celui de Venom : en fait, le nom de Monev n’est rien d’autre que Venom écrit à l’envers…
Ep.09 : on peut voir clairement que la croix de Wolfwood se trouve sur le toit du bus avant qu’il ne soit retrouvé dans le désert.
Ep.10 : le nom de Vash sur le tableau est épelé Stanpede au lieu de Stampede.
Ep.12 : on peut voir que l’arme de Vash est un Colt .45.
Quand la production de l’anime commença, Nightow travaillait encore sur le second volume du manga. Ainsi, à partir de l’épisode 16, l’anime suit un récit différent de celui de la version papier.
Le titre Trigun vient de ce que Vash « porte » trois armes : son revolver, son bras artificiel et son « bras d’ange ».
La chanson que Rem avait l’habitude de chanter à Vash est la même que celle que chante le garçon du train.
Trigun, Satoshi Nishimura, 1998
Dybex, 2010
26 épisodes, env. 40 € l’intégrale 15 ans Edition Limitée & Numérotée
Cette chronique fut à l’origine publiée sur le site Animeka