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Débausch d’énergie (tribute to Pina)

Par Borokoff

A propos de Pina de Wim Wenders 3.5 out of 5 stars

Débausch d’énergie (tribute to Pina)

Au départ, Pina devait être une collaboration entre Pina Bausch (1940-2009) et Wim Wenders, un documentaire sur son travail et celui de sa troupe du Tanztheater de Wuppertal, créée en 1974. Mais la chorégraphe allemande est morte peu avant le début du tournage. Du coup, Pina, réalisé en 3D, est devenu une sorte d’hommage posthume à Bausch, où le réalisateur allemand fait la part belle aux chorégraphies et révolutionne la manière de filmer la danse…

Sans doute faudrait-il nuancer ce terme d’« hommage posthume ». Le mot a une connotation morbide alors que Pina est tout sauf une élégie funèbre. Il y a certes des plans en noir et blanc où l’on voit Pina Bausch reprendre à la fin de sa vie des chorégraphies de Café Müller (1978) et où elle ressemble à un spectre dansant, un pantin désarticulé, mais Pina est un film sur la danse d’abord, la danse et la vie.

Pour ce documentaire d’un genre nouveau, et dont Wenders aimerait qu’il soit considéré comme le « premier film d’auteur en 3D », le réalisateur allemand s’est entouré du stéréographe Alain Derobe et du superviseur 3D François Garnier. On sent bien que la première préoccupation du réalisateur de Les ailes du désir et de Paris, Texas dans Pina est de suivre les mouvements du corps du danseur, de capter l’énergie propre à cet art si particulier qu’a inventé Pina Bausch, entre danse et théâtre.

Et le résultat visuel va au-delà des espérances. La caméra de Wenders colle aux mouvements danseurs comme si elle devinait constamment la trajectoire de leurs corps sur scène, les arabesques qu’ils dessinaient dans l’espace. Donnant l’impression qu’elle s’efface littéralement au milieu d’eux, devenant une danseuse elle-même. Certaines scènes ont été tournées en live, fin octobre 2009 à Wuppertal, à la fin d’une tournée mondiale, ce qui obligea l’équipe à connaitre parfaitement les chorégraphies, tant l’erreur était « interdite ». D’autres scènes reprennent des répétitions de Kontakhof (2000), chorégraphie prévue pour être autant joué par des acteurs de 65 ans que des lycéens, et ont été tournées en steadycam compact en 3D.

Débausch d’énergie (tribute to Pina)

Mais le vrai tour de force vient des scènes de danse tournées en extérieur, en ville, sous le monorail suspendu de Wuppertal, dans des espaces industriels ou la nature apaisante du Bergisches Land (une région d’altitude de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie).  Pour ces scènes, Alain Derobe a mis au point un système de caméras sur grues 3D qui restitue la profondeur de l’espace et rend les scènes extrêmement réalistes, immergeant avec l’aide des lunettes 3D le spectateur au milieu des danseurs.

Que dire sur le contenu lui-même de Pina, ballet formel virtuose ? Que c’est un documentaire qui reste fidèle jusqu’au bout à son idée de départ, soit rendre avec le plus de réalisme possible l’énergie et la vie propres à la danse. On sent même comme de l’entêtement voire une obstination chez Wenders à trouver un vocabulaire visuel collant parfaitement à la fluidité, la grâce et la légèreté de la danse. Si les scènes de danse occupent la plus grande partie du film, Pina est construit autour d’images d’archives de Bausch dansant ou donnant ses conseils de chorégraphe et des témoignages des différents membres (de tous les pays !) de la troupe. Chose marquante dans leur discours, tous les danseurs évoquent la manière dont Pina Bausch a su les libérer d’une timidité et d’une pudeur qui les gênaient à leurs débuts.

Avec « ses yeux perçants » et qui semblaient « tout saisir de vous en un regard, y compris vos peurs les plus cachées » (dixit un danseur), Bausch avait une formidable qualité d’écoute et une compréhension innée de ses danseurs, dont elle arrivait à sortir le meilleur. Par des mots simples mais justes.

C’est ce que le documentaire fait ressortir, avec la même humilité qu’avait Pina Bausch dans son travail. Seul reproche que l’on peut faire à Pina, c’est la longueur et la répétition des scènes de danse dont la mise en scène semble avoir à ce point investi (et fasciné avec les possibilités infinies de la 3D) Wenders qu’il s’est un peu laissé emporter par la valse… Un peu comme la danseuse de Les Chaussons rouges

www.youtube.com/watch?v=cXpFD7gi8R0


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