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Le meilleur de 2010 – Acte I

Publié le 26 décembre 2010 par Gootsy @gootsy

Chaque année amène son lot de disques, d’artistes à découvrir ou à redécouvrir. De grands moments pour les oreilles. De grandes déceptions également, quand parfois on met tous ses espoirs dans un disque qui promet d’être le joyau des joyaux (et souvent avec l’aide de ses auteurs jurant que la galette est « le meilleur truc qu’on ait fait, on n’a jamais été aussi loin, promis juré, allez, achetez-le, faites-nous confiance, merde, on sait que c’est la crise, mais notre disque c’est du bonheur en tranche« ). Comme tous les ans, je n’ai malheureusement pas eu le temps d’écouter certaines sorties, ou je les ai écoutées un jour où les conditions météorologiques, psychologiques et matérielles n’étaient pas réunies pour les voir sous leur bonne lumière. Ce n’est pas grave, le temps bonifiera ces oeuvres, et un beau jour on a la surprise de s’apercevoir que ce qui était sous notre nez depuis des années et qu’on n’a jamais vraiment écouté est vraiment très bien, comment ça se fait qu’on soit passé à côté pendant autant de temps ?
Établissant un palmarès, je me suis retrouvé avec deux heures de musique, que j’ai séparé grossièrement en deux parties; une première assez traditionnelle, intemporelle et parfois pourrait-on dire réactionnaire par le son vintage qui semble s’en dégager, il est indéniable que c’est une grande tendance du moment (notamment dans la soul où l’on délaisse de plus en plus les machines et – dieu merci – l’autotune pour revenir au son organique des productions des 60′s et 70′s). La deuxième partie en revanche, tout en respectant la musique qui l’a précédée, est plus marquée par son époque, par des mélanges de styles plus éclectiques, ou tout simplement par un son plus moderne ou terriblement remuant. Je commencerai donc la rétrospective de cette année 2010 avec cette deuxième playlist.

 
Pour accompagner musicalement cette chronique, vous pourrez écouter cette playlist grâce au widget 8tracks ci-dessus.

Grace Potter & The Nocturnals  - Paris (Ooh La La)

(Grace Potter & The Nocturnals)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Et la rétrospective de l’année commence avec les pêchus Grace Potter & The Nocturnals. Naïvement, je pensais que cet album éponyme était leur premier, mais que nenni ! Le groupe en est déjà à son troisième (sans compter les lives et un album solo pour Grace). Deux titres bien bruts se dégagent de l’album : « Medicine » et ce « Paris », tous deux aux refrains aussi infectieusement bougeant qu’il fut difficile de les départager pour cette sélection. Le reste de l’album oscille entre soul et ballades pop moins convaincantes.

0Arcade Fire – The Suburbs

(The Suburbs)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Cet album-là, tout le monde l’attendait. Arcade Fire, c’est le groupe qu’il faut écouter pour faire bien. Sauf que si par contradiction on décide le boycott, on passe à côté de quelque chose. Un univers bien à eux, un style qu’on aurait du mal à définir, ce n’est pas étonnant qu’ils aient l’approbation de David Bowie. Souvent élu album de l’année, et malgré des titres fort intéressants (comme celui-ci), j’ai personnellement trouvé ce troisième opus trop long. Auraient-ils oublié que la plupart des grands albums ne dépasse pas les 45 minutes ? Less is more, my friends…

Ok Go – Wtf?

(Of The Blue Colour Of The Sky)

Le meilleur de 2010 – Acte I
OK Go se sont fait connaître par internet. Ont-ils voulu renvoyer l’ascenseur avec ce titre emprunté au vocabulaire du web ? Toujours est-il que l’ouverture de Of The Blue Colour Of The Sky (et encore, on a échappé à « The Influence of the Blue Ray of the Sunlight and of the Blue Colour of the Sky« , livre qui a inspiré le titre de cet album) nous prouve qu’OK Go ne sait pas que faire des chorégraphies au fond de leur jardin, ou sur des tapis roulants, ou faire des systèmes bizaroïdes-où-les-éléments-actionnent-d’autres-éléments-de manière-complètement-tordue (ça s’appelle une machine de Rube Goldberg). En plus de tout ça, donc, OK Go fait de la musique. Et rondement bien, même.

Vampire Weekend – Run

(Contra)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Cet album-là, tout le monde l’attendait. Vampire Weekend, c’est le groupe qu’il faut écouter pour faire bien. Bon, en dehors donc de leur réputation de groupe hype comme Arcade Fire, Vampire Weekend c’est le groupe qui fait de la musique comme les autres, c’est-à-dire en pompant allègrement à droite à gauche, mais eux le font intelligemment; leur cursus d’étudiants en musicologie leur permettant de piller des trucs qu’on n’aura jamais l’occasion d’écouter. Leur second album est fascinant, met en forme, et rend moins con. Et le karma étant une chose également fascinante, ils sont à leur tour allègrement pillés par la télé pour servir de musique de fond à des reportages sur les plantes (ou la déco, ou n’importe quoi d’ailleurs).

April Smith And The Great Picture Show – Terrible Things

(Songs for a Sinking Ship)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Ca commence comme dans un vieux film de gangster. Puis d’un coup, ça attaque à la guitare. Puis on repart dans les années 30. Ok, on a peut-être affaire au premier groupe de charleston alternatif du monde. Ou tout simplement quelqu’un qui aime autant écouter Tom Waits que Led Zeppelin. En attendant, Perez Hilton et Rolling Stone chantent les louanges de cette artiste qui autoproduit ses albums, et elle aussi comme ses voisins du dessus est pillée par la télé (cette fois pour annoncer une série ou nous vendre les appareils portatifs de la marque à la pomme).

My Chemical Romance – Na Na Na (Na Na Na Na Na Na Na Na Na)

(Danger Days: The True Lives Of The Fabulous Killjoys)

Le meilleur de 2010 – Acte I

Par moment, la musique a ce pouvoir de mettre dans ma bouche les mots de Danny Glover dans son personnage de Roger Murtaugh : « Je suis trop vieux pour ces conneries ». Mais je me dis qu’il suffirait de presque rien, peut-être quelques années de moins, et j’aurais été fan de My Chemical Romance. Et que peut-on enregistrer après un concept album comme The Black Parade ? Un autre concept album, moins sombre, plus pop. Et qui contient ce Na Na Na (avec son sous-titre Na Na Na Na Na Na Na Na Na, pour ceux qui n’auraient pas compris)  grand-guignolesque qui me renvoie à l’adolescence.

Avi Buffalo – What’s In It For

(Avi Buffalo)

Le meilleur de 2010 – Acte I

Et en parlant d’adolescence, l’éponyme Avi Buffalo est la première oeuvre d’un groupe qui vient de quitter le lycée. Ils y délivrent une pop à la fois nostalgique, acide et gonflée aux hormones. On les compare très (trop ?) souvent aux Shins et pour arranger les choses, ils sont sur le même label, Sub Pop. Mais même si on décèle un air de famille entre ces deux groupes, il faut bien reconnaître que là où les Shins plaquent des mélodies impeccables sur des paroles dérangeantes, Avi Buffallo mêle une musique détraquée et des paroles dignes d’un jeune Leonard Cohen du 21e siècle. Un groupe à découvrir et à suivre…

Mark Ronson And The Business Intl (feat. Boy George) – Somebody To Love Me

(Record Collection)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Version, l’album précédent de Mark Ronson secondé par un déluge de guests, avait engendré beaucoup de critiques, notamment sur deux points : 1/ c’était un album de reprises 2/ beaucoup de titres évoluaient autour du son des Dap-Kings, tout comme le Back To Black d’Amy Winehouse que Ronson avait produit l’année d’avant. Le DJ a donc changé tout ça pour son troisième album que l’on ne peut pas d’ailleurs considérer comme un simple album de DJ; il y a un groupe fixe, tout le long de l’album lui donnant une entité, si bien qu’on n’a plus cette impression d’écouter une compilation de remixs. Et on retrouve toujours autant de guests (Boy George sur ce titre, mais aussi Duran Duran ou D’Angelo).

Admiral Radley – I Heart California

(I Heart California)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Dans les années 70, on aurait appelé Admiral Radley un supergroupe, un groupe formé par des musiciens déjà connus et reconnus. En l’occurrence, le groupe se compose de deux membres de Grandaddy et de deux autres d’Earlimart. Et si, ne connaissant pas Earlimart, je ne peux pas me prononcer sur la filiation avec ce projet, j’entends en revanche très bien la patte Grandaddy dans cet album. Ne serait-ce que sur ce titre au ton indie pop mélancolique rappelant les plus belles heures du défunt groupe californien.

Bryan Ferry – You Can Dance

(Olympia)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Un album de Bryan Ferry, ça fait parler, mais pas toujours en bien. Je me souviens de cette immense déception que fut Dylanesque; déception quand Ferry, qui sait d’habitude très bien chanter Dylan, nous livre un album de reprises somme toute très mou du genou. Du coup, même le nombre d’invités sur cet Olympia pouvait laisser dubitatif, ne serait-ce que pour la présence de plusieurs membres de Roxy Music. Et finalement, cet album est une bonne surprise. Il ne faut peut-être pas s’attendre à Avalon, encore moins à Do The Strand, mais c’est un album solo de Bryan Ferry, très élégant, bien écrit, efficace.

Hot Chip – Hand Me Down Your Love

(One Life Stand)

Le meilleur de 2010 – Acte I

Entre un maxi de remixs enregistré avec Robert Wyatt, une pub avec Bernard Sumner et une collaboration avec Peter Gabriel sur une reprise de Vampire Weekend (encore eux !), Hot Chip a eu le temps de donner une suite à Made in the dark. Il manque peut-être sur ce nouvel album un moment fort comme Ready for the floor, mais l’album paraît un peu plus constant que le précédent et possède un son moins dancefloor. Cela en fait un album plus abordable pour des personnes non adeptes de l’électro, même si on peut regretter le déluge de styles présent sur Made in the dark.

MGMT – Song For Dan Treacy

(Congratulations)

Le meilleur de 2010 – Acte I

Aujourd’hui on le sait, le deuxième album est toujours celui qui est difficile à réaliser. Et encore plus quand le premier album réussit l’exploit à la fois de trouver son public et d’être encensé par la critique. Ainsi, Oracular Spectacular avait terminé sa course folle en étant sacré 18e meilleur album de la décennie 2000 par Rolling Stone, tout en étant certifié or ou platine un peu partout. Sans se reposer sur leurs lauriers en reproduisant la formule de ce qui avait marché, MGMT a préféré tenter l’option « album ambitieux qui montre qu’on sait faire autre chose même si on risque de perdre un peu le public ». L’album ne contient pas de Time to pretend au riff accrocheur, mais s’écoute, selon les auteurs, comme une oeuvre complète. Et même si écouter les 44 minutes d’une traite reste un peu indigeste (certains titres trop longs, un sentiment général de déjà vu…), cela reste une belle pièce psychédélique.

Gorillaz (feat. Lou Reed) – Some Kind Of Nature

(Plastic Beach)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Il semble que depuis quelques années, on ne croise plus Lou Reed qu’en guest star. Car en dehors de rejouer sur scène un album sorti il y a 30 ans, et dont on se demande toujours s’il se foutait de notre gueule ou non (Metal Machine Music, pour ne pas le nommer), ou sortir des disques de musique de fond pour Tai chi (et là, j’en suis persuadé, il se fout de notre gueule, mais personne ne m’écoute), son ombre plane sur les productions aussi diverses et inattendues qu’Antony and the Johnsons, les Killers, et, hem, un clip de Susan Boyle (quand je dis qu’il se fout de notre gueule…). Et coincée entre les participations de Mark E. Smith, leader des Fall et le rappeur Mos Def  (ça, ça ne s’invente pas, mais ça prouve juste que Damon Albarn a des goûts très éclectiques et que personne n’ose lui dire non), sa contribution au dernier Gorillaz a été la bonne surprise de l’année.

Phosphorescent – The Mermaid Parade

(Here’s to Taking It Easy)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Phosphorescent est un groupe alt-country, ce qui peut rebuter au premier abord. Car si dans d’autres pays, comme l’Allemagne, la musique country est rentrée dans les moeurs, en France on a toujours le cliché du cow-boy en Stetson. Pour en rajouter, leur précédent album était une collection de reprises de Willie Nelson. Mais l’un des grands secrets de la country, c’est que Willie Nelson est l’un des artistes les plus cool de la musique, tous styles confondus, et que des albums alt-country tels que le Yankee Hotel Foxtrot de Wilco doivent autant à Nashville qu’à Radiohead. Ainsi il ne faut pas être fan de line-dance pour aimer cet album aux couleurs de l’automne, à écouter comme les histoires d’un vieil ami près d’un feu de cheminée (et les Stetsons peuvent rester à la porte du saloon).

Ted Leo And The Pharmacists – The Mighty Sparrow

(The Brutalist Bricks)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Ted Leo réussit cette incroyable contradiction d’être un vétéran de la scène punk. Ne le connaissant pas avant cet album, je m’attendais en consultant sa biographie à tomber sur un jeunot pas encore né quand les clash se sont séparés, alors que le bonhomme fêtait cette année ses 40 ans, et que ses pharmacists sortent des disques depuis plus de dix ans. Ce qui m’a induit en erreur est cette énergie dégagée dans l’ouverture de l’album; à vrai dire cela faisait longtemps que je n’avais pas entendu ce son bien simple et brutal, ce côté « prends toi bien ça dans ta gueule ! », et ça fait du bien de savoir que ça existe encore. Je me suis un peu perdu dans l’album, mais le dynamisme de cette première piste donne envie de mieux connaitre cet artiste et de le faire découvrir aux autres.

Lightspeed Champion – The Big Guns Of Highsmith

(Life is Sweet! Nice to Meet You)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Lightspeed Champion, alias Devonté Hynes, alias l’homme qui ne dort jamais. Touche-à-tout de génie, aussi à l’aise dans un groupe dance punk (si, ça existe) que dans un concert où il reprend intégralement la B.O. d’Harold et Maude (composée uniquement de titres de Cat Stevens), producteur de Solange Knowles, cinéphile averti… Le seul reproche qu’on puisse lui faire est qu’il est difficile de le suivre, et c’est à peu près le seul point négatif de ce second album. Car si au lieu de partir en feu d’artifices inspiré de pop baroque, de Motown et de choeurs grecs (je vous jure), il pouvait tout simplement se focaliser, il serait capable d’écrire un des grands disques des années à venir. En attendant, il y a de très grands titres sur cet album, à commencer par Marlene, Faculty of Fears, Dead Head Blues (une superbe version en français est sortie sur un single au début de l’année) ou ce Big Guns of Highsmith, qui démarre sans jamais vraiment démarrer, qui voudrait bien nous amener vers d’autres rives, et puis finalement non. Le mieux est encore de l’écouter pour comprendre. Et je conseille également d’écouter son premier, Falling off the Lavender Bridge, une des plus belles découvertes de la décennie précédente.

Sufjan Stevens – All Delighted People [classic rock version]

(All delighted people EP)

Le meilleur de 2010 – Acte I
Le problème avec les artistes prolifiques, c’est qu’ils se lancent parfois dans des travaux herculéens sachant très bien qu’ils ne seront jamais capables de les finir. Sufjan Stevens avait commencé il y a quelques années une grande épopée américaine : un album pour chaque état ! Mais après Illinoise,  deuxième volume de l’aventure sorti en 2005, on a eu droit en 2006 à un album de chutes d’Illinoise et un coffret de chants de noël (5 disques quand même, mais à moins qu’Obama n’annexe le pôle nord, ça compte pas dans le projet). Aujourd’hui avec 48 états à finir, on peut dire que c’est mort; et après un projet multimédia, Stevens sort cette année un album, The age of adz, précédé d’un mini-album. Enfin, un mini-album de 8 titres totalisant près d’une heure de musique, ce qui est nettement plus que chez certains artistes qui devraient d’ailleurs en prendre exemple (et tant qu’on y est, s’ils pouvaient aussi écouter un peu comment c’est agréable de mélanger les styles, de tenter d’être original, de prendre des risques… Tout ça quoi). Le « mini » album, donc, évolue autour d’une ballade, All Delighted People, présenté en deux versions. Et en écoutant la version Classic rock présente dans cette playlist, j’ai du arrêter toute activité pour écouter. Simplement écouter. LA synergie. Celle qu’on retrouve dans tous ces disques qui donnent des frissons, où les artistes tels des cuisiniers atteignent la parfaite dose de chaque élément pour composer un ensemble indissociable. Et même les huit minutes que dure le morceau ne rebute pas à le réécouter une fois le voyage terminé.
Le morceau de Sufyan Stevens offre une parfaite conclusion à cette playlist. 71 minutes entre rock alternatif, soul déjantée et pop inventive. La deuxième partie de la rétrospective 2010 viendra compléter cet état des lieux musical de l’année 2010.


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