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Poezibao a reçu, n° 168, dimanche 24 avril 2011

Par Florence Trocmé


Cette rubrique suit l’actualité éditoriale et présente les derniers ouvrages reçus par Poezibao. Il ne s’agit pas de fiches de lecture ou de notes critiques et les présentations font souvent appel aux informations fournies par les éditeurs.  Une présentation détaillée des livres est accessible en cliquant sur "lire la suite...."
 
Bernard Noël, L’outrage aux mots, Œuvres II, P.O.L. 
Jean-Louis Giovannoni, Envisager, Lettres Vives 
Revue Fusées, n° 19 
Antonio Porchia, Voix éparses, Érès 
Claude Dourguin, Ciels de traîne, José Corti 
Jean-Paul de Dadelsen, Goethe en Alsace, Jérôme Do. Bentzinger 
Jacques Ancet, Portrait d’une ombre, Érès 
Jean-François Chevrier, La trame et le hasard, L’Arachnéen 
Jean-François Chevrier, Les relations du corps, L’Arachnéen 
Alireza Rôshan, jusqu’à toi combien de poèmes, Érès 
Trois poètes norvégiens, Éditions du Murmure 
Guy Allix, Survivre et mourir, Rougerie 
Revue Arpa, « Un cent d’encre », n° 100/101 
Jean-Claude Tardif, Guanahani, éditions Clarisse 
Guénane, La ville secrète, Rougerie  
Yves-Jacques Bouin, Par celle, éditions Clarisse 
Christophe Esnauld, Isabelle à m’en disloquer, Les doigts dans la prose 
Bruno Berchoud, La beauté du geste, éditions Clarisse 
 
Notices détaillées de ces livres et revues en cliquant sur « lire la suite... »  

  

Bernard Noël 
L’outrage aux mots 
Œuvres II 
P.O.L., 2011 
688 p - 30 € - sur le site de l’éditeur (lire les premières pages) 
 
Ce deuxième tome des Œuvres de Bernard Noël comprend ses principaux écrits politiques dispersés au gré de publications éphémères ou de livres épuisés. On y découvre une pensée proprement révolutionnaire, radicale, et qui trouve une part de ses origines dans une analyse extrêmement fouillée de l'histoire de la Commune de Paris, de l'espoir qu'elle souleva et qui semble n'être pas tout à fait retombé, même aujourd'hui. L'autre origine de la pensée politique de Bernard Noël se situe dans la langue proprement dite, dans une analyse de plus en plus fine de la violence infligée à la langue par l'emploi qu'en ont fait de tout temps ceux qui aux yeux de l'auteur ont confisqué le pouvoir à leur profit  en privant le peuple de ses droits élémentaires. Plus loin encore, il y a ce que Bernard Noël appelle « la sensure », c'est à dire la privation de sens, qu'elle s'opère par le détournement du sens des mots ou par son brouillage (communication, télévision, etc.).
Mais quand il théorise l'oppression, Bernard Noël ne cesse jamais d'être un écrivain. C'est ce qui confère à cet imposant volume où se côtoient les genres les plus divers, du poème au théâtre, du pamphlet à la fiction, son autorité, son évidence et sa beauté. (site de l’éditeur
 
 
Jean-Louis Giovannoni 
Envisager 
sous les portraits de Gilbert Pastor 
coll. Terre de Poésie, Lettres Vives, 2011 
18 € 
 
« Envisager est un titre à prendre au pied de la lettre, c’est l’acte de « prendre visage », d’emménager chez l’autre, d’entrer sous les portraits du peintre Gilbert Pastor. Cette nouvelle exploration de sa peinture, entamée par l’auteur en 1996 dans Chambre intérieure (Éditions Unes), est un nouvel angle d’approche, ou un fil conducteur pour revenir sur ce thème récurrent et inépuisable dans son œuvre qu’est celui du corps et du visage dans leur rapport intériorité/extériorité, une approche dans laquelle tout l’univers de Giovannoni se déploie avec une rare intensité, retenue, tension, angoisse, singularité. Le corps est bien là, et le visage aussi, dans son effroi, captif et traversé par l’étrangeté de son regard. » (communiqué de presse)
 
 
Revue Fusées 
n° 19  
15 € 
 
Au sommaire de ce nouveau numéro Jean-Claude Montel, Jacques Villeglé, Yann Esnault, Ernst Jandl et dans la section Travaux en cours, Pierre Ouellet, Jean-Claude Pinson, Shoshana Rappaport-Jaccotet, Jeanne Gatard, Michaël Batalla, Mathieu Brosseau et Mathias Pérez.  
 
 
Antonio Porchia 
Voix éparses 
Nouvelle traduction de l’espagnol (Argentine) par Danièle Faugeras 
coll. PO&PSY, Érès, 2011 
10 € - site de l’éditeur 
 
« Les pensées de ce volume vont beaucoup plus loin que le texte écrit ; elles ne sont pas un aboutissement mais un commencement. Elles ne cherchent pas à produire un effet. Nous pouvons présumer que l'auteur les a écrites pour lui-même sans savoir qu'il traçait pour les autres l'image d'un homme solitaire, lucide et conscient du singulier mystère de chaque instant. » Jorge Luis Borges
« Je crois que Porchia est sur la ligne fondamentale où se rejoignent la pensée et l'image, la poésie et la philosophie, dont la séparation artificielle constitue peut-être un de nos plus grands lests. » Roberto Juarroz (site de l’éditeur) 
 
 
Claude Dourguin 
Ciels de traîne 
José Corti, 2011 
19 € - site de l’éditeur 
 
Livres, moments — ici-bas regarder, s’occuper de la terre, écrire, voyager, musiques, paysages, peintures, rencontres qui ont ébranlé, perturbé, il s’agit de traces laissées et de ce qui vient après, perspective neuve, décapée, mieux visible, déroutante parfois, ce qui s’installe à leur suite : des rêveries et leurs cours. Il s’agit de bonheur — l’esprit trouve là son plus heureux régime, rapide, vif plein de surprises — et de reconnaissance. Car le mouvement, l’élan, davantage, le pouvoir germinatif c’est à l’extérieur de soi qu’il se trouve, presque toujours c’est à d’autres que nous le devons. Aussi vers, réflexions, nulle lassitude jamais à les faire revenir, les écouter, se laisser habiter par leurs « petite(s) phrase(s) » (site de l’éditeur) 
 
 
Jean-Paul de Dadelsen 
Goethe en Alsace 
Dr Goethe im Elsàss 
Traduction en alsacien de Gérard Leser 
Jérôme Do. Bentzinger, 2011 
14 € 
 
Le texte de Jean-Paul de Dadelsen a paru à titre posthume en 1965 dans la revue Saisons d’Alsace. Il a été réédité en 1982, puis 1995. Cela fait donc 15 ans qu’il n’a plus été publié et il manquait une transposition en langue alémanique d’Alsace. (4e de couverture) 
 
 
Jacques Ancet 
Portrait d’une ombre 
coll. PO&PSY, Érès, 2011 
10 € - site de l’éditeur 
Une écriture poétique simple et claire pour dire l'énigme d'exister, pour tenter de rendre visible cette part de non-visible qui nous constitue (aussi) et nous accompagne comme une ombre. (site de l’éditeur) 
 
 
Jean-François Chevrier 
La Trame et le hasard 
L’Arachnéen, 2010  
20 € 
 
Ce livre fait partie d’une collection de sept livres de Jean-François Chevrier. À partir de ces deux termes, « trame » et « hasard », l’auteur entreprend dans l’essai principal du livre un récit de l’art moderne (Ernst, Arp et Taeuber, Cage) et contemporain (Kelly, Polke) qui croise la littérature (Mallarmé, Nietzsche, Musil, Walser) et l’art issus du surréalisme (collage, improvisation, combinaison aléatoire, hallucination, etc.). 
La seconde partie du recueil rassemble quatre textes qui portent respectivement sur un écrivain, deux artistes femmes et un tandem d’architectes. Des énoncés éclatés de Cobble Stone Gardens de William Burroughs, aux projets de l’agence suisse Herzog et de Meuron qui associent structure et ornement, en passant par les grilles graphiques et chorégraphiques de Sophie Tauber-Arp et la redécouverte par Anni Albers des miniatures mexicaines du Mexique, Jean-François Chevrier file la métaphore de la trame et du hasard par-delà les disciplines et le temps. 
 
 
Jean-François Chevrier 
Les relations du corps 
L’Arachnéen, 2011  
25 € 
 
Jean-François Chevrier aborde le thème des « relations du corps » avec humour, contre le cynisme « post-humain » et le pathos compassionnel. Il dégage deux thèmes : celui de « l’académie hors d’elle-même », et celui du « monstre » altéré sous l’effet des jeux de l’imagination ou de la perception. Son approche privilégie l’esprit de jeu, l’expérimentation, la remise en cause d’une vision du corps stable, centrée sur l’identité et l’appropriation de l’espace. Ce parti pris lui permet d’associer des œuvres historiques majeures et des travaux des années 1970 ou contemporains moins en quête d’objets que d’expériences sur l’espace, le corps et le langage. 
Un entretien avec le grand médiéviste Jurgis Baltrusaitis, historien des anamorphoses et des dérèglements, ouvre le livre. Il est suivi d’un long essai inédit sur l’œuvre d’Henri Matisse, dans lequel Jean-François Chevrier propose une analyse sexuée du tracé comme emprise, et met l’accent sur l’« attraction des corps » ordonnée/désordonnée par l’artiste à partir de la verticalité du fil à plomb. Un entretien, un essai et un cahier d’images sont ensuite consacrés à l’œuvre du critique-artiste-photographe John Coplans, aux variations plastiques savantes et infinies qu’il fait subir à son propre corps, à ses jeux tragi-comiques sur la régression archaïque ou l’ambivalence sexuelle. Après cet hommage à Coplans, il s’entretient avec deux artistes majeurs de la scène des années 1970, Vito Acconci et Klaus Rinke, qui mettent leurs corps l’un à l’épreuve du langage ou de la page, l’autre à l’épreuve de l’ubiquité de l’eau. Ces expériences trouvent un écho dans les photographies d’enfants de la rue d’Helen Levitt et dans la vision « périphérique » du corps de Marina Ballo Charmet. L’auteur consacre enfin deux essais à Raoul Hausmann : le premier décrit les étapes qui ont conduit l’artiste de ses expériences de photomontages dadaïstes à une conception de la photographie antimécaniste et anti-illusionniste, et met en relief ses recherches sur la multisensorialité ; le second se concentre sur le partage entre l’audible et le visible, mis en rapport avec la tentative de Joyce (dans Ulysses) de créer une « épopée du corps humain ». Le recueil s’achève, via la cinéaste Maya Deren, par un éloge savoureux des miasmes, des démons et du « contact insolite ».  
 
 
Alireza Rôshan 
jusqu’à toi combien de poèmes 
coll. PO&PSY, Érès, 2011 
10 € - site de l’éditeur 
 
Une poésie jeune, actuelle, concrète, qui n'en rejoint pas moins les grands thèmes universels - ici cette inévitable mixture de désir/séparation/souffrance qui fait le charme et la plaie de l'existence humaine et que la poésie, partout et de tout temps, s'est employée à transcender. (site de l’éditeur) 
 
 
Trois poètes norvégiens 
Øyvind Rimbereid, Hanne Bramness et Torild Wardenær 
Présentations et traductions par Anne-Marie Soulier 
Éditions du Murmure 
20 € 
 
Les trois poètes présents dans cet ouvrage, malgré leurs différences, ont en commun le lien quasi païen qui unit tout Norvégien aux paysages qu’il parcourt régulièrement (« gå på tur ») dans des « promenades » d’une durée  déconcertante même pour ses voisins nordiques. Vents et eaux, ravins et montagnes, neige, fleurs, forêts, buissons, bien loin des clichés habituels, sont vécus comme des héritages sacrés. Poète est celui qui sait en déchiffrer les signes et témoigner de ces métamorphoses du présent. Un autre point commun à ces auteurs est une vision du monde certes très personnelle, mais nourrie du même insatiable appétit d’exploration pour tous les ailleurs, autres pays, autres cultures, autres mondes, y compris le passé des mythologies et un avenir qu’on ne pressent encore que dans des formules mathématiques. Physique et métaphysique, infime et infini, sont donc simplement des expériences différentes de l’univers et du temps. Les scaldes d’autrefois, déjà, ne se contentaient pas de célébrer leurs rois, ils étaient mages, interrogeaient les dieux, méditaient sur les mythes et sur le sort du monde. Héros de nos temps incertains, Kafka, Apollinaire, Giordano Bruno, Cartier-Bresson, parmi d’autres poètes, savants, philosophes, artistes, vont surgir dans ces pages pour attester que l’étrangeté n’est finalement qu’une illusion de nos pensées trop courtes, que la poésie est affaire non d’oisiveté mais de courage face à une autre immensité, celle des craintes et des ignorances. (4e de couverture) 
 
 
Guy Allix 
Survivre et mourir 
Rougerie, 2011 
15 €  
 
Errer infiniment dans le désordre de tes os 
Et racler cette folie comme une écuelle 
 
Laisser encore quelques vaines empreintes 
 
…. Même si le souffle est consumé 
 
Tu restes tout au bord 
Tu hésites le dernier pas 
(p. 48) 
 
 
Revue Arpa 
« Un cent d’encre » 
Numéro 100/101 
11 e 
 
au sommaire de ce numéro anniversaire, notamment François Cheng, Guillevic, Pierre Oster, Jude Stéfan, Pierre Chappuis, Pierre Dhainaut, William Cliff, Cédric Demangeot, Jacques Réda, Christian Hubin, Jean-Yves Masson, Gérard Titus-Carmel, Pierre Maubé, Antoine Emaz… 
 
 
Jean-Claude Tardif 
Guanahani 
Editions Clarisse, 2011 
10 € 
 
Guanahani était le nom indigène de San Salvador lorsque Colomb y aborda. Désignant un monde nouveau, rêvé mais déjà habité, ce nom guide le poème de Jean-Claude Tardif. C’est à une forme de genèse qu’il s’attèle ici : la redécouverte des sensations simples et brutales d’un être écartelé entre désir et nostalgie, mais aussi l’exploration complexe de ce qui fonde une humanité, paraphrasant Éluard : l’amour la poésie. Exister et écrire étroitement entrelacés. Dans ce vaste souffle de forge et de vents, Jean-Claude Tardif, né en 1963, éloigné depuis plusieurs années de la présentation publique de son travail de poète pour se consacrer à une oeuvre de prosateur, en appelle à une cosmogonie de mots et de sens. Il réinvestit tout en blancs et déliés l’espace de la parole qui bâtit, fut-ce « jusqu’à la mort peut-être / pour trouver suite à notre histoire / et la sculpter – Mirage ». 
 
 
Guénane 
La ville secrète 
Rougerie, 2011 
13 €  
 
Éteins la terre 
deviens île 
rien que la mer 
laisse-la t’emplir 
pars en étoile 
tu abrites un abîme 
ne démaquille pas les mots qui le masquent.  
(p. 57) 
 
 
Yves Jacques Bouin 
Par celle 
Éditions Clarisse 
5 €  
 
« C’est une vingtaine de poèmes, qui n'ont de relation que leur resserrement ; mais leur forme et leur rythme sont voisins, parfois leur objet commun ; de vers en vers, des mots reviennent souvent y chanter, que l’on prononce à satiété, pour le plaisir. C’est une vingtaine de pièces comme ces petites portions de terre, séparées des terres voisines et appartenant à un propriétaire différent ; on aime les contempler d’en haut ; et comment lire, sinon le nez au-dessus de la page ? On la survole, on y plonge... (prière d’insérer) 
 
 
Christophe Esnault 
Isabelle à m’en disloquer 
Les doigts dans la prose, 2011 
11 €  
 
Dominée par l’ombre psychotonique de Sarah Kane, cette performance poétique de Christophe Esnault oscille entre deux fièvres sans remède : la passion amoureuse et la passion d’écrire. 
Isabelle, à m’en disloquer renouvelle en la radicalisant la double quête du beau et de soi dans l’autre, au fondement du lyrisme amoureux. Les accès fébriles de la syntaxe, quasi asthmatique, laissent entendre mezzo tinto les éclats d’une voix douce, inquiète, confiante dans la fonction rédemptrice de l’écriture poétique – et voir la présence du monde quotidien.
Témoin érotique et texte littéraire d’une Grande Passion, Isabelle, à m’en disloquer propose quatre interventions de la dédicataire, échos intimes de l’autre voix amoureuse mêlée à celle du poète. (site de l’éditeur, où l’on peut lire quelques pages du livre) 
 
 
Bruno Berchoud 
la beauté du geste 
Éditions Clarisse 
5 € 
 
Du ressouvenir. Ce mot, frissonnant, semble parcourir l'ensemble des « gestes » que Bruno Berchoud partage dans ses poèmes, avec la pincée juste de nostalgie, d'émerveillement, de gratitude. Gestes de mère, de père, de femme, d'inconnus, d'enfant… le poète guette, ou retrouve ces moments simples d'existence, vitaux ou futiles, toujours nécessaires, quand on se travaille, soi parmi les autres. Par petites touches de regards portés, furtifs ou soutenus, dans le son et les couleurs, sans forcer la mémoire, la maintenant intacte, comme on commente un album de photographies, Bruno Berchoud s'arrête. 
 


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