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Anthologie permanente : Pierre Peuchmaurd

Par Florence Trocmé

Laurent Albarracin publie un Pierre Peuchmaurd, dans la collection Présence de la Poésie, aux Éditions des Vanneaux.  

Pour Antoine et Guillaume 
Reprends l’armure que tu as quittée à l’âge de raison 
(André Breton et Paul Eluard

J’ai longtemps vécu d’inanition. Souvenirs des brumes, du rose et d’un sommeil d’épines – des ours qui me léchaient la langue. J’ai longtemps vécu d’appréhension : les ours mouraient parfois. Cendre et charbon et longs poils bleus, je rangeais dans des boîtes ce qu’il me restait d’eux. Je n’avais pas d’oiseaux.  

Comme au profond résonne (neige et sang, eau du monde) le pas de l’enchanteur, comme au profond l’amour perdu, l’amour futur, comme l’osselet d’or dans la forêt – je n’avais pas d’oiseaux mais j’avais de l’enfance. 

Et de l’enfance. Des cernes et du poison, du plaisir à le croire. J’étais le vieil enfant des principes ; je ne mentais jamais aux ours 

Le fils de l’ours et de la pluie, le chevalier rouillé, c’était moi. De la ruine à la ruine, le chevalier mouillé, l’otite et le jeudi. 

La mer éteinte, il y avait des ours bleus dans les îles et le roi s’appelait comme eux et maintenant il dort.  
 
Pierre Peuchmaurd, extrait de Arthur ou le Système de l’Ours, L’éther vague/Patrice thierry éditeur, 1994, in Laurent Albarracin, Pierre Peuchmaurd, Éditions des Vanneaux, 2011, pp. 104 et 105 
 
|•| 
 
Dimanche de ruines,  
  d’arbres dans l’eau 
Dimanche de froid dans la machine 
  le pain gèle dans la bouche 
 
  Couche protectrice d’oiseaux 
  rames vertes sur la mer pourpre 
 
Dimanche de sang dans la vitrine, 
  de prunelles basses et,  
  confit, le trésor 
 
Tout le cadre chaud de la machine froide 
le visage comme d’une rousse, 
  craché 
  Le dimanche 
  stades d’automne et Ra- 
  vel dans l’auto, la voiture 
  sur la pente, 
  dans la mare 
 
Dimanche comme un lapin 
  tiède à l’échine 
  à machine rousse 
la tête crachée près de la mare 
et la langue dans sa 
  grotte 
  l’alcool blanc et les murs de l’auberge 
 
puisque dimanche 
  puisque 
les pièges à l’horizon et trop 
près de l’oreille 
  le vers blanc sur les lèvres rousses 
 
  Le voile et la clôture 
Ravel à Port-Royal 
[...] 
 
Pierre Peuchmaurd, extrait de La Rousse, Pierre Mainard, 2006, in Laurent Albarracin, Pierre Peuchmaurd, Éditions des Vanneaux, 2011, pp. 180 à 182
 
 
Pierre Peuchmaurd dans Poezibao 
bio-bibliographie, Parfaits dommages et autres achèvements (parution), sa mort (un article de L. Albarracin), extrait 1, extraits 2
 
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