Plus qu' une saga, Jim Fergus nous offre, avec Marie-Blanche, une extraordinaire fresque familiale. L'auteur de Mille femmes blanches confirme son exceptionnel talent de conteur et s'affirme comme l'un des plus grands écrivains américains.
Sur un peu plus de 600 pages, Jim Fergus nous raconte l'histoire de sa famille, d'origine aristocratique française. Le découpage de son roman rend le récit très dynamique. Il arrive même à insufler du suspens, car chapitre après chapitre, les tranches de vie qui nous sont révelées distillent les secrets de cette famille hors du commun à travers les portraits de deux femmes dans la tourmente. Il s'agit de Renée, la grand-mère de Jim à qui il rend visite en 1995, dans la région des Grands Lacs, alors qu'elle n'est même plus en état de rester assise sur un fauteuil et parralèlement, de Marie-Blanche, la mère de Jim, dont il reconstitue une sorte de journal intime. Internée en 1966 dans un asile de Lausanne, elle se souvient de sa vie et tente en quelque sorte de pardonner Renée, femme froide et tyrannique, qui a brisé la vie de son entourage et en particulier celle de sa propre fille.
Ces deux vies sont extrêmement touchantes. Au fil du roman, l'on comprend pourquoi et comment Renée est devenue ce qu'elle est. Filles d'aristocrates français sur le déclin, mariée trois fois, elle mènera une vie absolument singulière, de son village natal à côté de Senlis aux Etats-Unis, en passant par l'Egypte.
Le théâtre de sa vie se
déroulera en effet à travers un siècle et trois continents.
Quant à Marie-Blanche, sa vie aurait pu être un conte fées, mais elle tournera assez vite à la tragédie...
Jim Fergus s'inspire ici de son histoire personnelle – son avant propos est explicite- et fait preuve d'une force de narration impressionante. Emouvante et touchante, sa plume ne joue jamais avec le mélo ou les bons sentiments. Au contraire, à l'instar de son ami Jim Harrison, Fergus emploi un style direct et élégant, et "tient" ses personnages du début à la fin de l'histoire. Il a consacré cinq années à l'écriture de Marie-Blanche, son troisième roman, après Mille femmes blanches (le cherche midi, 2000) et La Fille sauvage (le cherche midi, 2004).
L'histoire, les personnages, l'écriture, tout dans ce roman est prenant. Vous vous attacherez à ces deux femmes, dont on a le sentiment qu'elles ont subi leur sort et leur condition. Vous détesterez un certain Gabriel, personnage puissant, tyranique, caractériel, dangereux, malsain, qui détient un pouvoir énorme et contrôle sa famille au gré de ses envie et de ses humeurs, sorte de dictateur domestique.