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Notes sur la poésie : Pierre Chappuis

Par Florence Trocmé

Dédicace muette
Aussi soucieux soit-on de ne pas en appeler en droite ligne aux sentiments, c’est vers autrui — "mon semblable, mon frère" — que le poème se tourne. N’existent, somme toute, que des poèmes d’amour (s’il s’agit essentiellement d’échange, de partage), es pores risquant bien d’être ceux trop ouvertement donnés comme tels.

Champ libre
À la poésie (lecture ou écriture), que demander d’autre qu’être guéri de soi-même, tiré vers autre chose aussitôt reconnu non comme étranger, mais comme intime ? Ouverture alors d’un vaste champ libre ?

Vide, manque
Impression reçue, choc émotionnel ou fulgurance verbale, le poème — nulle distinction à faire là-dessus — naît toujours d’un appel, d’un manque.
Seule certitude à propos de la poésie : elle ne procède nullement d’un trop-plein dont se décharger., mais d’un vide auquel, incapable de la combler, elle ne cesse de renvoyer.

Habiter en poète
Quelque chose — la poésie — sans quoi, désorientée, l’existence n’aurait plus de sens, en quoi peut se résumer, qu’il ait choisi de parler de soi ou non, la Vita d’un uomo, pour reprendre le titre choisi par Ungaretti au moment de rassembler son œuvre poétique.

En prise directe
Ce n’est pas a pensée qui se fait dans la bouche (Tzara), c’est la poésie, en dépit de la pensée. Rien à attendre sinon , mais l’esprit y a — y aura — sa part.
Quelque nécessaire qu’elle soit par ailleurs, la réflexion fait obstacle à la poésie dont elle prétend saisir le sens et la portée, la destination, la pratique.
Pour être en prise directe avec ce qui l’a suscité, le poème n’a besoin que du champ de la page blanche.

Pierre Chappuis, La rumeur de toutes choses, José Corti, 2007, p. 11, 19, 41 et 70.


Une contribution de Tristan Hordé


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