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Notes sur la création : Carole Darricarère

Par Florence Trocmé


Dans le poème comme dans l’auto-portrait s’exprime une tentative désespérée de traverser le miroir, c’est-à-dire de mourir à la forme. 
 
L’auto-portrait est un portrait qui ne serait pas bordé. Un portrait que l’ombre portée d’un regard étranger n’atteint pas. 
 
Le poème est un texte qui n’aurait pas de bords. 
 
J’appelle moderne l’authentique magicien qui sème aveuglément un centre dans la nuit des siècles, aveuglément c’est-à-dire à peine grâce ) lui-même. 
  
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Certains mots sont éminemment modernes depuis qu’ils sont tombés en parfaite désuétude, le mot âme, qu’une pudeur les retiendra encore longtemps d’écrire, car les chiens sont pour l’heure trop nombreux qui ont été dressés à manger sans faim. 
 
D’autres mots tomberont en désuétude pour s’être vidés de tout sens. Tu es libre de choisir ton camp. 
 
Et maintenant sors et vis car le Poème est aussi pétri de chair (le Poème ne vit pas dans les livres), et que l’os et l’air sont liés fiévreusement et contemporains d’un même temps. 
 
Tout ce qui scientifiquement s’ensuit n’est pas forcément complet. 
  
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Les mots dont le sens a été galvaudé, ou pillé, ou perverti, ou encore, contrefaçonné (à la mode à la mode), sonnent comme des œufs clairs. 
 
Les mots-racines tombés en désuétude, voués aux oubliettes, méprisés ou bannis, sonnent comme du bois silicifié dont l’énorme trousseau de veines plonge à pic le terreau phréatique reptilien. 
 
En art la mode est ennemie de la modernité comme l’apparence l’est de l’apparition. 
  
 
Carole Darricarère, Demain l’apparence occultera l’apparition, éditions Isabelle Sauvage, 2009, pp. 74, 80 et 84. 

[Jean-Pascal Dubost] 



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