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Max | Armand

Publié le 14 mai 2011 par Aragon

losolvidaos.jpgFaut lire le dernier papier de DEB : "Basta, les petits !". Faut vraiment le lire. C'est du fort.  (*) J'y rajouterai rien en com. Rien à rajouter. Y'avait un mec dans le début des années soixante, chez moi, enfin chez moi, je veux dire dans mon bled.  Amou. S'appelait Armand. Un grand beau mec, beaucoup plus vieux que nous, la quarantaine quand nous on en avait quinze. L'avait une belle femme, blonde, maquillée, sexy, à Amou ça le faisait pas et puis ils étaient étrangers au village. Rédhibitoire ça. Z'étaient venus s'installer là quelques mois auparavant, bossait dans les assurances et nous qui étions de "là" on étaient de petits coqs cons dressés sur leurs minis ergots, sur le tas de fumier délimitant "le" territoire.

canne a peche.jpg
Il adorait la pêche Armand, c'était sûrement un mec très cool. Une rivière c'est bien car elle est encadrée par deux rives.  C'est rassurant pour des trouillards maniganceurs de coups fourrés. Armand pêchait d'un côté avec sa blonde et nous, une petite dizaine de moutards boutonneux on était de l'autre côté. J'sais plus qui a eu l'idée de balancer le premier caillou sur le bouchon.

Pas moi, j'ai toujours eu horreur du défoulement collectif de ces petits cons qui n'hésitaient pas à lapider des chats pour voir "ce que ça fait" ou à balancer des cailloux sur un bouchon de canne à pêche pour faire chier un mec, je dis pas ça pour me dédouanner ou pour me donner bonne conscience mais c'est vrai que je pouvais pas piffrer ces "jeux" de cons. Mais dans un bled y'a intérêt à se socialiser sinon on devient très vite un paria. Un anormal. J'étais avec eux bien que ne participant pas à ces conneries...

Donc, un caillou a giclé, puis deux, puis trois, puis dix et évidemment de l'autre côté du bouchon et de la canne à pêche Armand a réagi, il nous a demandé de lui fiche la paix , mais c'est tout le contraire qu'il s'est passé, la mayonnaise est montée, a bien pris, d'autant plus que de notre côté  à nous des noms d'oiseaux pleuvaient avec les cailloux,  les accompagnaient, allusions : à la longueur de son... de sa... heu... vous vous doutez de quoi, salaces à l'adresse de sa blonde, à tout, tout y passait. Puis en une seconde on a vu la scène western arriver comme un ouragan. L'a jeté sa canne dans le pré, a laissé sa blonde pantoise assise sur le plaid, a foncé comme un sprinter de 100 m aux JO jusqu'à sa caisse, une Simca 1500, je m'en souviens encore, et en une poignée de secondes il avait franchi le pont, s'était engouffré dans la place de la Técouère et dans un dérapage contrôlé qui aurait fait pâlir Mc Queen lui-même dans "Bullit"  a pilé sa bagnole au bord de l'eau où il restait encore quelques mômes tétanisés par la soudaineté de l'action, il est sorti comme un diable de sa boîte,  a couru, s'est jeté sur le premier  gamin qu'il a saisi au kolback pendant que les autres, tous, fuyaient comme des pleutres et lui a dit : "Et maintenant tu dis quoi ? Tu veux voir la longueur de ma queue... Ou tu veux te ramasser 800 grammes de viande fraîche sur le museau ?"

Histoire vraie. J'était là, j'ai tout vu, tout entendu, m'a rien fait Armand, l'avait vu que j'avais pas balancé de cailloux, que je l'avais pas insulté, et puis sa bourgeoise me connaissait et était cliente à l'épicerie de ma mère... J'étais quand même dans mes petits souliers... Je l'entends encore résonner. Il a collé une seule, unique et retentissante beigne au morpion qui est parti en chialant-courant essayer de retrouver les autres et est reparti pêcher l'Armand, je vous jure que c'est vrai...

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Au Quick de Bordeaux-lac, beaucoup plus tard, je mangeais une de ces cochonneries avec mon frère... On était peinard. Un petit gitan est venu s'asseoir  bien gentiment à un pas de nous avec son plateau, rien à redire, rien... nous, on bectait avec mon frangin. Le môme avait faim et mangeait sans nous regarder, c'est alors qu'un autre petit gitan est arrivé avec son plateau, s'est planté devant nous et a apostrophé son "coreligionnaire" en lui disant (vrai) à voix bien haute et distincte : " Lèves-toi, reste pas à côté de ces gadjos..." Et le môme s'est levé et ils sont partis se mettre seuls et plus loin pour becter...

On est tous le juif-allemand, le gnakoué, le bougnoule, le nègre, le rom de quelqu'un, c'est comme ça. Y'a toujours eu, y'aura toujours jusqu'à la fin des temps des "olvidados", des petits cons "jouant" au bord des rivières ou sur des trottoirs interlopes... La connerie ordinaire. Basta.

(*) http://domi33.blogs.sudouest.fr/




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