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Je n'aime pas les spectateurs des Champs-Elysées

Par Tred @limpossibleblog
Je n'aime pas les spectateurs des Champs-ElyséesDe l’étranger, les Champs-Élysées évoquent le charme de Paris, sa splendeur et sa notoriété. On dit les parisiens chauvins de leur chère capitale, pourtant demandez-leur, et la plupart d’entre eux se feront un plaisir de démonter cette flatteuse réputation de la soi-disant plus belle avenue du monde. Je suis le premier à être amoureux de Paris, mais les Champs-Élysées, c’est bien souvent au-dessus de mes forces. Pour qui n’a jamais visité la capitale française, ne placez pas de trop hauts espoirs dans la fameuse avenue reliant la Concorde à l’Arc de Triomphe. Sa reconnaissance est bien usurpée.
L’une des caractéristiques de la voie parisienne, c’est notamment qu’elle regorge de cinémas. Bon, « regorger » n’est peut-être pas, peut-être plus, le terme approprié, puisque les salles à avoir fermé dans le quartier ces dernières années sont plus nombreuses que celles ayant ouvert. Tout de même, une trentaine d’écrans parsème l’avenue, plus une demi-douzaine sur les rues adjacentes, voilà de quoi occuper quelques après-midis cinéphiles. Pourtant plus le temps passe, plus j’évite les cinémas des Champs-Élysées. Ses grandes enseignes. Le Balzac et le Lincoln alentours ne sont pas inclus dans cette liste de cinémas devenant insupportables ou presque, tout comme l’agréable Publicis. Non, ce sont bien les Gaumont et UGC en cause, enfin, plutôt leurs spectateurs.
A une époque je fréquentais avec plaisir les salles des Champs-Élysées, particulièrement la majestueuse salle de l’UGC Normandie, mais au fil du temps, je suis devenu allergique au public fréquentant ces cinémas. Il ne s’agit point de snobisme, seulement du désir de voir les films dans le calme et le respect que je leur montre. Or, sur les Champs, il ne se trouve pas une séance sans qu’une poignée de spectateurs affichent un manque de respect exaspérant pour les films et les spectateurs qui partagent la salle avec eux. Du bruit, du bruit encore du bruit, cela résonne de partout entre les rangs des salles de l’avenue. C’est à cause de cela que j’ai déserté les cinémas du quartier, et à cause de cela qu’à chaque fois que je suis aculé à y retourner, ou que les circonstances m’amènent à y voir un film, mon exaspération se confirme.
Je n'aime pas les spectateurs des Champs-ElyséesVoici qu’une nouvelle expédition à l’UGC George V m’a une fois de plus convaincu que moins je fréquente les salles des Champs, mieux je me porte. C’était pour Tomboy, le joli film de Céline Sciamma, quelques années après le déjà réussi Naissance des pieuvres. Les circonstances m’ont amené à le voir dans cette salle, et je m’étais persuadé que cela ne devrait pas poser de problème puisqu’après tout, « c’est plutôt un film de cinéphiles tranquilles » pensais-je. Bah oui mais c’est con, j’avais oublié que ces données sont vaines dans les salles des Champs-Élysées.
Dans la petite salle 11 du George V, ils m’ont pris au piège ! J’étais là, enfoncé au centre de mon quatrième rang lorsque je me suis rendu compte que les deux couples qui m’entouraient à chaque bout de rang allaient peut-être bien me pourrir la projection. Le premier, à ma droite s’est montré tout de suite bruyant. Un homme et une femme ayant décidé de manger dans la salle, ouvrant leurs yaourts, rangeant leurs sacs plastiques, un désagrément qui aurait pu être unique et ponctuel, mais malheureusement les tourtereaux avaient aussi envie de commenter le film de temps en temps, à voix haute ou presque, à mon grand enchantement… Le deuxième couple, qui m’a fait me lever pour les laisser passer et se caler contre le mur alors que le film commençait (déjà ça j’adore, quand la salle fourmille de fauteuils libres), était constitué de deux mecs avec leur sac de sport encombrant. Ils n’étaient pas installés depuis cinq minutes qu’ils se léchaient goulûment la face, suffisamment pour que moi-même et le type assis le rang devant puissent profiter à l’oreille de leur joie de s’être trouvés un coin tranquille pour se bécoter.
Personnellement que des mecs, des filles ou des extraterrestres viennent se peloter au cinéma ne me gêne pas du moment qu’ils n’en font pas profiter tous les fauteuils alentours, mais malheureusement les deux mecs ici présents semblaient à peine se soucier de savoir si leur absence de discrétion allait me (nous) gêner. Au cas où cela n’aurait pas suffi, leurs discussions - pour lesquelles ils ne prenaient parfois pas la peine de franchement baisser la voix, eux non plus - a fini de m’agacer totalement. Ces deux-là n’étaient pas là pour le film, car leurs discussions ne semblaient pas tourner autour du film, ou si peu étant donné leurs étonnements occasionnels quant au film (« Ah c’est une fille en fait le garçon ? » bien après qu’on l’ait tous remarqué…).
Je n'aime pas les spectateurs des Champs-ElyséesEt pendant ce temps, moi au milieu, je me concentrais sur le film, essayant de ne pas laisser mon attention être détournée par les bruits des uns et les commentaires des autres. J’essayais de ne pas laisser mon attention se détourner de Laure, cette gamine qui se rêve garçon et se fait passer pour tel aux yeux de ses nouveaux amis, dans cet immeuble dans lequel elle vient d’emménager. J’essayais de me laisser emporter par la fougue de ces gamins, par les doutes et les hésitations identitaires, cet atermoiement des genres à un âge que l’on peut à peine qualifier d’adolescent. La justesse des mots et des êtres, la douceur de l’atmosphère, cet unique éclair musical (« Always »), ces regards et ces sourires ont fini de m’emporter malgré le parasitage ambiant. Je crois que je vais éviter l’UGC George V pendant un p’tit bout de temps… jusqu’à une autre circonstance imprévisible. La prochaine fois, je n’aurais peut-être pas la chance de parvenir à rester dans la bulle du film.

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