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Réforme du droit de l'urbanisme : propositions le 27 mai

Publié le 19 mai 2011 par Arnaudgossement

conseil d'etat.jpgAlors que le projet d'ordonnance portant réforme du code de l'urbanisme est en cours d'élaboration, les ministres en charge de l'urbanisme devraient présenter, ce 27 mai, plusieurs propositions tendant à la simplification du droit de l'urbanisme. Brèves réflexions.


En tant qu'avocat, notamment d'opérateurs du secteur de l'énergie, je suis souvent confronté à la menace de recours ou aux risques liés à l'introduction tendant, par exemple, à l'annulation, soit d'un permis de construire, soit d'une autorisation d'exploiter délivrée au titre de la police des installations classées.

Il est trés difficile d'évaluer la part de ces recours qui ne relève que de la simple spéculation ou du chantage.

Face à cette situation dénoncée par de nombreux professionnels comme les promoteurs immobiliers ou les développeurs de projets d'installations de production d'énergie renouvelable, deux solutions sont envisageables : réduire l'accès au Juge ou réduire le délai d'instruction des recours. Ma préférence va à la seconde option.

Réduire l'accès au Juge ?

Le premier réflexe est bien souvent de réduire les possibilités de recours. C'est le choix opéré par le législateur au sein de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement. L'article 14 de cette loi précise en effet :

" Après l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 600-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 600-1-1. - Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. »

Ainsi, aux termes de ce texte, le législateur a tenté de restreindre l'accés au prétoire pour les associations "de circonstance". Il n'est pas certain que cette réforme ait eu un réel impact sur le nombre des recours jugés "abusifs". Par ailleurs, certaines associations peuvent avoir un objet réel alors même qu'elles seraient créées aprés affichage de la demande du pétitionnaire.

D'autres hypothèses de réduction du contentieux sont souvent évoquées  comme celle relative à l'augmentation des frais irrépétibles.

Toutefois, réduire l'accés au Juge administratif revient à remettre en cause l'objet même du procés administratif et plus particulièrement du contentieux de l'excés de pouvoir. Ainsi que le souligne le Professeur René Chapus dans son ouvrage de référence consacré au "Droit du contentieux administratif" :

"Le recours pour excés de pouvoir se présente d'abord comme un procés fait à un acte. L'expression est de Laferrière (Traité, 2ème éd., t2, p 561). Elle est excellente. Elle fait bien apparaître le caractère objectif du recours, traduisant ce qu'est la seule question posée au juge : l'acte attaqué est-il légal ? Il ne s'agit pour le juge de reconnaître que le requérant est titulaire d'un droit à l'encontre de l'administration, ou que cette dernière est tenue par une obligation à l'égard du requérant. Il s'agit de décider du sort de l'acte (de la décision, le plus normalement) contre quoi le recours est dirigé".

Il me semble indispensable d'avoir cette analyse bien à l'esprit au moment où il est question de réformer le droit de l'urbanisme et, notamment, de réduire le contentieux du permis de construire. Limiter les possibilités de recours, accroître le contrôle du Juge quant à l'intérêt à agir du requérant peuvent avoir des conséquences pour l'objet du procés administratif.

Le contrôle de l'intérêt à agir est en effet difficile. Il est toujours trés délicat pour un Juge d'apprécier, au vu des quelques pièces produites au dossier, si une association est une "vraie" ou une "fausse" association. Au surplus, il n'existe pas aujourd'hui de définition bien précise de ce qu'est une vraie association ou un recours non abusif.

Par ailleurs, ce sont aussi des recours trés utiles, notamment à la protection de l'environnement, qui pourraient être ainsi empêchés. L'équilibre entre, d'une part  la sécurité juridique dont doivent bénéficier les titulaires d'autorisations d'urbanisme et, d'autre part, le droit au Juge.

Réduire le délai d'instruction ?

Plutôt que de réduire l'accés au Juge, il est sans doute préférable d'agir sur les délais de procédure. Tel est déjà le cas. Il est un fait que les délais d'instruction des recours devant les juridictions administratif ont considérablement diminué. Un calendrier est même présenté aux parties en début de procédure, aprés introduction de la requête.

Peut être faut-il aller plus loin pour certains contentieux, comme celui relatif à l'urbanisme.

Sous réserce d'une mobilisation suffisante de moyens au bénéfice de la juridiction administrative, on peut imaginer qu'un délai d'instruction bref - de quelques mois - permettrait au titulaire d'un autorisation d'urbanisme d'être rapidement fixé sur le caractère définitif de celle-ci. Cela découragerait sans doute certains recours qui ne sont déposés que pour faire pendre une épée de Damoclès au dessus de la tête d'un promoteur ou d'un propriétaire, dans l'espoir d'obtenir une contrepartie financière.

Reste que la procédure ne peut pas non plus être éclair. Le respect des droits des parties, du contradictoire, suppose aussi du temps.  Il ne faudrait pas sombrer, ici comme ailleurs, à la dictature de l'urgence.


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