À la poursuite du Mal !
Fervents adeptes du one-shot, Antoine Ozanam et le label KSTR proposent cette fois une série en trois tomes. « Les âmes sèches » est une trilogie dessinée par trois auteurs différents et dont les tomes sont parus à quelques semaines d’intervalle.
L’intrigue de ce premier volet, qui se déroule au début du vingtième siècle, non loin de San Francisco, invite à suivre l’histoire de Conrad Horswooth, un jeune homme qui entre au service de Lord Fairchild, un bourgeois dont le fils, atteint d’une mystérieuse maladie, est maintenu en quarantaine. Au programme de ce récit qui mêle fantastique et polar : un manoir rempli de mystères et de secrets familiaux, une cabane isolée au fond du domaine, où s’est retirée une femme (Pandora) souffrant d’un étrange mal, mais surtout un jeune homme fort curieux et à l’âme romantique, qui, tout comme le lecteur, cherche à connaître le fin mot de toutes ces énigmes.
C’est le frère de Conrad qui, par le biais de lettres qu’il a reçu, nous raconte cette étrange histoire qui mêle histoire d’amour, malédictions, sciences occultes, malheurs familiaux et pouvoirs occultes. Une longue narration en voix-off qui s’avère un brin trop lente et parfois légèrement redondante, mais qui au final, parvient à tenir le lecteur en haleine jusqu’au final très surprenant de cette très bonne mise en place.
Au niveau du graphisme, Alberto Pagliaro livre de l’excellent travail. À l’aide d’un dessin torturé et d’une colorisation adéquate (mais peut-être parfois un peu trop sombre), il installe une ambiance horrifique très efficace. Ses planches mêlant réalité et fantastique, lors de manifestations maléfiques, sont une belle réussite et permettent d’imbiber ces événements étranges d’une certaine crédibilité.
Un excellent tome de mise en place, parfois un peu lent, mais riche en rebondissements et servi par une ambiance envoûtante très efficace.
Le deuxième tome de cette trilogie débute treize ans après la fin du premier volet, en compagnie d’Israël Horswooth.C’est à nouveau le frère de Conrad Horswooth qui alimente cette longue narration en voix-off, mais il ne s’attèle plus à raconter les péripéties de son frère, mais bel et bien sa propre aventure. Antoine Ozanam délaisse en effet le sinistre manoir pour proposer un road-movie aux allures de western, racontant la quête d’Israël, lancé à la poursuite du Mal et de toutes forces occultes. Ce voyage solitaire parsemé d’embûches et de surprises, permet de faire plus ample connaissance avec le narrateur du premier tome. C’est avec grand intérêt que le lecteur suit le parcours de cet homme qui affronte les manifestations maléfiques qui tourmentent les gens qu’il croise, mais qui doit également affronter ses propres démons. Le rythme est légèrement plus soutenu que lors de la mise en place et le suspense monte en puissance jusqu’à ce final qui donne une nouvelle fois envie de vite découvrir la suite.
Au niveau du graphisme, le dessin de Connor Willumsen est légèrement moins hachuré et moins séduisant que celui d’Alberto Pagliaro, mais la transition entre ces deux styles qui opèrent dans le même registre est finalement assez fluide. Le changement radical de décor et le renouvellement du casting sont d’ailleurs là pour faciliter la transition graphique entre les deux dessinateurs. Et au niveau de l’atmosphère, le lecteur ressort une nouvelle fois ravi de cette lecture.
Après la chasse au Mal du tome précédent, le lecteur a tout d’abord droit à la confrontation tant attendue entre Israël Horswooth et Pandora. Si le début de la confrontation tient toutes ses promesses et propulse le narrateur de cette saga au cœur même du monde de sa maléfique opposante, la suite devient malheureusement plus brouillonne. En mêlant dimensions parallèles, ectoplasmes, doubles/reflets, changements d’époque et failles temporelles, Antoine Ozanam semble vouloir en faire de trop et, si Israël Horswooth commence à douter de sa propre réalité, le lecteur, lui, a du mal à tenir le fil de l’histoire. Si je n’ai pas su apprécier cette recrudescence du fantastique et cette complexification de l’intrigue, je ne suis pas non plus fan de la conclusion. Vraiment dommage !Au niveau du graphisme, on a de nouveau droit à un changement de décor et de dessinateur. C’est cette fois Bandini, déjà associé à Ozanam sur « Face contre ciel » qui s’occupe du dessin, dans un style graphique qui se marie en douceur avec celui de son prédécesseur et avec quelques belles trouvailles au niveau des changements d’apparences.
Bref, première petite déception sur un scénario d’Ozanam lors de cette conclusion. Mais comme j’ai apprécié le reste de la saga, je me réjouis tout de même de l’annonce d’un deuxième cycle de trois tomes.