Avec un article comme celui-ci, déjà cité par mon camarade Bartleby j’aurais pu exulter, sentir de longs frissonnements remonter le long de ma moelle pour provoquer un orgasme jaculatoire de la plus haute importance.
Mais je dois dire, qu’en dépit d’un côté franchement réac que j’affectionne tout particulièrement, c'est-à-dire une propension à voir le déclin un peu partout, tout en prônant une émulation culturelle et idéelle qui existe si on cherche bien et qui fait que je continue à croire en ce que je fais en pure aversion au bon sens, en dépit de tout ça, cet article m’a rendu mal à l’aise. Une fois de plus, une fois de trop, ce sont toujours les mêmes écrivains cités, comme s’il n’existait qu’eux. C’est beau de prôner la mort de la culture française, aussi me bornerais-je dans ces quelques lignes au champ littéraire, mais c’est en la présentant par les mêmes archétypes et les mêmes rengaines d’années en année qu’on ne risque pas d’y voir clair.
Le constat pourtant est simple. Il ne s’agit pas d’embrasser un nostalgisme moisi face à une grandeur perdue qu’il s’agirait à tout prix de reconquérir.
L’auteur de l’article évidemment les caciques de la littérature française, évoque l’autofiction comme s’il s’agissait de quelque chose qu’il ne fallait point blâmer (peut être estime-t-il que ce « genre » est tout à fait louable), et mieux que tout, évoque le prix de flore comme si de rien était, comme s’il s’agissait d’un vrai prix, sans attachement aucun à la valeur qui lui est accordée. Rien qu’à voire les trois dernières lauréates. On est servi. Double ration à la louche. Tout est vu dans l’optique américaine. Rien ne vient contrebalancer ce point de vue. On reste sur le point de vue littéraire de cet article au niveau du café du commerce du coin.
Bref, ne nous égarons pas dans une dénonciation calomnieuse même si jouissive, qui nous éloigne de notre propos de base, qui malgré tous les efforts mis en place par l’auteur de cette note, s’effiloche jusqu’à disparaître.
La faute à qui, donc ?
Loin d’accorder une responsabilité et une aura si grande à un seul et unique journaliste, à un seul et unique newsmagazine, aussi respectable que soit le Times, le fait de présenter ce qui se fait dans les lettre françaises par l’évocation de deux auteurs ou presque (Houellebecq, Angot) , et de montrer que les écrivains (même si je renâcle à employer ce mot pour ce qui suit ) français savent s’intéresser à quelque chose de plus large que leur nombril en évoquant la dernière offense de Yasmina Reza (peut être bientôt l’adaptation au festival d’Avignon !) ou la dernière larme juteuse d’Olivier Adam (sponsorisée par Kleenex et Xanax), je dois dire que ça c’est de la recherche journalistique. On a l’impression qu’il n’y a rien dans les lettres françaises alors que 700 bouquins sont sortis cette « rentrée » ! Et puis ne restons pas focalisés sur la « rentrée », embrassons l’année 2007 dans son intégralité. J’ai déjà parlé du Reinhardt et du Capron. On peut parler de Jauffret, de Chevillard,de Volodine… Mais bon, il aurait peut être été top dur et trop long, et surtout, en fin de compte contre productif d’essayer d’agrandir le spectre, de chercher dans le plus confidentiel et le non moins excellent. Si on parle de mort de la culture française et de la mort de la littérature c’est avant tout parce qu’on ne sait pas en parler ; parce que l’indifférence à ce qui se fait est de mise. On préfère nager en terrain connu plutôt que d’essayer de mettre en danger un système hiérarchique bien en place. Si si peu d’écrivains français sont traduits outre manche, alors que beaucoup mériteraient d’avoir une audience plus large que la maigreur de leur lectorat français, ne peut-on pas donner une part de responsabilité à l’édition américaine qui ne prend pas de risques en n’essayant pas de publier ce qui ne marche pas forcément le mieux ? Double frilosité des éditeurs français qui préfèrent jouer la sécurité et ne proposer que des ouvrages où il y a possibilité de faire un « coup » et des éditeurs américains qui pourraient aller chercher le talent là où il est. Et il existe. Ca n’a pas besoin d’être une tentative globale, une marche forcée, surtout pas. Mais cela serait bien qu’on y arrive. Un jour peut être. Plus de porosité, plus d’échange.
Dans l’état actuel des choses, il ne s’agit pas d’exporter le plus possible, mais d’exporter autre chose qu’un royaume des dieux ou qu’une métaphysique des tubes de crème hémorroïdale…
Ce n’est pas tant pour faire revivre une littérature française qui vit tant bien que mal que je dis tout cela, le succès à l’export n’est pas du tout ce que j’ai en tête. Lire et faire lire.
Mais bon, si déjà on arrivait à faire lire les français, ce serait déjà pas mal...
That’s all folks.