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Les journalistes doivent-ils tweeter ?

Publié le 31 mai 2011 par Davidme
Les journalistes doivent-ils tweeter ?Nouveau petit retour sur l'affaire DSK et sur l'explosion de Twitter pour le grand public. Un débat a éclos au sein de la profession et il peut se résumer de la façon suivante : un journaliste qui est reportage sur le terrain doit-il tweeter sous son nom, sous celui de son média, voire pas du tout ? Lors de l'affaire DSK et des tweets sortis tout droit de la salle d'audience cités à l'antenne (voir mon propre article Twitter 1  Médias 0 et aussi celui de Vincent Dujardin- "Twitter ou l'entrée du journalisme dans le loft" - sur le blog Bminded), le groupe Canal + a « interdit » à sa correspondante Laurence Haïm de tweetter depuis le tribunal. A la place celle-ci envoyait des SMS à sa rédaction en chef qui restituait ou non les différentes informations. Rodolphe Belmer, le patron de la chaîne s'en explique sur le blog de mon confrère du Point Emmanuel Berretta. « J'ai pris cette décision. Pour deux raisons. D'abord, les journalistes professionnels doivent leurs infos à leur public, à leur média. Ensuite, je pense que les grands médias ont tout intérêt à assurer les règles de contrôle de l'information. Une chaîne comme Canal+ ou I>télé doit pouvoir maîtriser sa ligne éditoriale et non reprendre à son compte des twitts sensationnalistes quand ils ne sont pas erronés », explique-t-il. Et il ajoute : « Dans ce monde totalement "désintermédié", la cohérence et la rigueur de l'information sont encore plus importantes. Avant, les médias vendaient de l'info. Dans le monde actuel, l'info en soi n'a plus de valeur. Ce qui prend de la valeur, c'est l'information vérifiée, classée, hiérarchisée et analysée ». Les journalistes doivent-ils tweeter ?Le point de vue est intéressant mais soulève à mes yeux trois interrogations majeures. D'abord, la position de Rodolphe Belmer n'est pas sans rappeler celle -finalement assez peu tenable – du patron de médias qui considère que ses journalistes doivent publier leurs infos dans leurs médias plutôt que dans des livres. Or, dans les faits, cela n'est que très peu respecté. De même, cette « interdiction » légitime édictée par Canal + pose la question de la compréhension par les patrons de médias en général de ce qu'est Twitter. Twitter n'est pas une source d'information ou un média à proprement parlé, mais plutôt une source d'alerte. Une fois l'alerte reçue, le journaliste vérifie, recoupe, analyse et décrypte avant de publier. Twitter lui permet juste d'avoir accès en temps réel à une ambiance ou à une réalité à laquelle il ne peut accéder. Dans le cas de la désormais fameuse salle d'audience new-yorkaise, ce sont une petite dizaine de journalistes (de l'AFP, d'Europe1 ou de Radio France) qui ont écrit en temps réel, ce qu'ils auraient mis dans leur médias quelques minutes plus tard. Ainsi, le journaliste de l'AFP nous aurait donné les conditions de la libération de DSK, puis les mots de l'accusation, puis enfin le bisou envoyé à Anne Sinclair. Ceux d'Europe 1 et de Radio France auraient fait de même à l'antenne. Pas de sensationnalisme donc comme le déclarent certains, mais plutôt un « direct écrit ». La troisième interrogation qui sous-tend la réaction de Canal + est celle de savoir si c'est le journaliste qui fait le média ou l'inverse. Sur Twitter, c'est le journaliste de Canal +, d'Europe1 ou de CB News qui parle en son nom. Mais ne nous leurrons pas, chers confrères, si nous avons des followers c'est aussi en notre qualité de journaliste de tel ou tel média. Au final, la réaction de Rodolphe Belmer n'augure-t-elle pas une nouvelle ère ? Celle où les journalistes twitteront mais sur le compte de leur média et nom plus vraiment en leur nom propre. Le tout pour valoriser encore plus les fameuses « marques médias ». Il est possible que nous en arrivions là.

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