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Mâle de mer

Publié le 08 juin 2011 par Lorraine De Chezlo
MÂLE DE MERde Sorel et Villemin
Roman graphique - 155 pages
Editions Casterman - janvier 2009

Il y a l'orpheline Ephémère, qui ne voit que tristesse dans les yeux de son père marin, à Douëlan. A 29 ans, la belle s'exile pour les Etats-Unis avec son prince charmant. Mais elle en reviendra, car sa vie est près de la mer et de la rude vie, près de sa mère défunte et l'amer qu'elle a laissé. Il y a Gabin, le photographe qui passe aussi par Douëlan et Camaret, fasciné par les paysages de cette extrême Bretagne, par ces bateaux qui se meurent, par ce petit garçon qui vagabonde. Un petit bonhomme déjà fasciné par la mer, orphelin de père, fils d'une mère qui défie la chute. Coup de foudre, écrire, photographier. Des êtres en mal de père, en mal d'amour et de mère ne peuvent que s'attirer, se jeter dans le vide, se jeter à l'eau.

Un roman graphique très singulier. Un projet artistique exigeant, avec des dessins en noir et blanc, secs, aigus, qui savent laisser la place à la lumière maritime. Et il y a aussi des photos. Et surtout, il y a ce texte poétique qui rend les illustrations encore plus envoûtantes. Des bulles en vers. C'est déroutant mais c'est beau.

Extrait :
"Lorsque son Américain chercha à faire d'elle son Américaine, et que le jour en pleine nuit se remit de nouveau à l'élever, Ephémère quitta l'Amérique et ne devait plus jamais y retourner. Jamais de la vie, elle ne se serait laissée aller à vivre une vie ordinaire et délimitée par une plus ou moins forte monnaie. Pour elle, vivre et travailler en même temps, c'était pêcher. Oui, pour elle c'était pécher que de rester vivre aux côtés d'un homme qui gagnait si bien sa vie à l'enterrer."


La mer, son horizontalité, et puis le désir fou de verticalité, d'escalade, de ces personnages qui sont inconditionnellement ramenés au sol ou à la mer. La mer souvent présente a fait de ces femmes et ces hommes des orphelins, des écorchés, des mutiques mais des amoureux aussi, et des poètes. MÂLE DE MER

Extrait :
"Par delà le vert de ses yeux, elle avait souvent laissé la réalité devenir à la fois le poignard et la blessure de son intimité. A la mer comme à l'amer, elle se laissait aller à hisser son corps sans filet."

J'ai parcouru les pages complètement subjuguée, perdue aussi. Je ne faisais pas le lien entre les différents destins évoqués, les différentes histoires du présent et du passé. Mais l'ensorcellement avait opéré et j'ai relu l'album, toujours ensorcelée. Une expérience exigente mais passionnante pour qui aime la mélancolie, la poésie, l'esprit qui divague. A lire peut-être, à relire sûrement. .
L'avis d'Alain qui m'avait interpellée - La mer pour horizon

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