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Anthologie permanente : Volker Braun

Par Florence Trocmé

Demain, mercredi 15 juin, à l’institut Goethe à Paris, lecture bilingue par Volker Braun, Alain Lance et Jean-Paul Barbe ses traducteurs, d’extraits d’un livre tout juste paru aux éditions l’Oreille du Loup, une anthologie poétique, Le Massacre des Illusions, Das Massaker der Illusionen (édition bilingue) 
 
 
Les huîtres 
  
                                (À Alain Lance)  
 
Je vis rarement pour de vrai, toi depuis des heures 
Tu ouvres dans la cuisine des huîtres parvenues 
Jusqu’ici (munies de nombreux papiers) et 
La main endolorie dans le gant plastique 
 
Tu chantes. Les Wolf, eux, ne pensent plus 
Qu’à bâfrer, ce qu’ils font comme le reste, 
Avec sérieux. Voilà les êtres humains !  
Et moi, avec beaucoup de citron, j’anesthésie 
 
D’abord les bestioles nues puis mon palais 
Et j’avale sans vaillance, tandis que tu gobes 
Avec délice et répulsion deux douzaines 
De ces petites cramouilles de la mer. Tiens, dis-je,  
 
Laisser la vie sur la langue fondre 
Entre désir et dégoût, oui.  
 
|•| 
 
L’utopie 
 
Elle n’a rien de mieux à faire que rien 
Son boulot c’est la survie, au jour le jour 
Figure fantôme au chômage, surgie du futur 
Chantant à Soho ! Couchée sur des roses ! Un rêve diurnes 
De la marche verticale au cordon ombilical 
D’une bière en boîte. LE PROGRÈS RÉSIDE 
DANS LA CATASTROPHE. Il y a donc de l’espoir 
Pour la lèpre. C’est une danse au matin 
Avec l’âme du peuple, grands magasins incendiés 
Elle, la réprouvée, n’a rien d’autre à faire que du mieux 
 
 
 
Die Austern 
 
Ich lebe nicht oft wirklich, du seit Stunden 
In meiner Küche brichst die eingereisten 
(Mit viel Papieren) Austern auf, und mit 
Schmerzender Hand in dem Plasteschurz
 
Singst du. Und die Wolfs, an nichts mehr 
Denken die da als ans Fressen, was sie 
Wie alles, gründlich tun. Das sind noch Menschen. 
Und ich, mit viel Zitrone, betäube 
Die nackten Tierchen erst und meinen Gaumen
Und schlucke mutlos, während du zwei Dutzend
Schlürfst mit Wollust und Ekel, diese kleinen 
Fotzen der See. So, sage ich nun, das 
Leben zwischen Gier und Abscheu
Zergehen lassen auf der Zunge, ja. 
 
|•| 
 
Die Utopie 
 
Sie hat nichts Besseres zu tun als nichts 
Beschäftigt mit Überleben, von der Hand in den Mund 
Ein Gespenst aus der Zukunft arbeitslos 
Singend in Soho! Gebettet auf Rosen! Ein Tagtraum 
Vom aufrechten Gang an der Nabelschnur 
Des Büchsenbiers. DER FORTSCHRITT WOHNT 
IN DER KATASTROPHE; So ist doch Hoffnung 
Für den Aussatz. Ein Tanz am Vormittag 
Mit der Volkseele, die Kaufhallen angesteckt 
Die Verworfene, nichts hat sie zu tun als Besseres 
 
 
Volker Braun, Le Massacre des illusions, Das Massaker der Illusionen, anthologie poétique, traduction de l’allemand par Jean-Paul Barbe et Alain Lance, Editions l’Oreille du Loup, 2011, pp. 8 et 9 et pp. 98 et 99.  
 
Volker Braun dans Poezibao :  
Bio-bibliographie, extrait 1, extrait 2, extrait 3, Phrase sans fond (parution), extraits 4, extrait 5 
 
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