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Le "Patrimoine commun" : une notion clé pour l'avenir de l'environnement et de son droit

Publié le 14 juin 2011 par Arnaudgossement

Lors d'un récent débat, cette question m'a été posée : quelle est selon vous la notion clé pour l'avenir du droit de l'environnement et, partant, pour la planète, pour nous, pour les générations futures ? Si j'ai pourtant consacré quelques années de ma vie à écrire sur le principe de précaution, j'aimerai plaider pour la notion de "patrimoine commun". 


En relisant récemment l'ouvrage de Ricardo Petrella "Pour une nouvelle narration du monde", publié en 2007, il m'est apparu que ces notions de "patrimoine commun" ou de "biens communs" n'ont pas encore suscité, notamment de la part des juristes, l'attention qu'elles méritent. 

Réduite à tort à un simple slogan ou une déclaration d'intention, l'expression "patrimoine commun" émerge au même moment qu'une réflexion économique sur les limites actuelles du droit de propriété privée  - alors que les limites de la planète et de ses ressources sont désormais évidentes. 

Dans le champ économique, le patrimoine commun représente une tentative de penser la propriété au delà des limites des propriétés privée ou publique. Déjà des auteurs comme Jeremy Rifkin ont identifié les évolutions de la propriété, de celle de la chose vers celle de l'accés au savoir ou aux biens. Le mouvement écologiste défend dans sa large majorité un droit de propriété qui soit davantage celui de l'usage ou du service.  

La notion de patrimoine commun, proche de celle de biens communs a donc tout d'abord et sans doute été pensée dans le champs des autres sciences sociales que le droit. En droit, le principe 4 de la déclaration finale de la Conférence des Nations-Unies pour l'environnement de Stockholm en 1972 associe environnement et patrimoine

"Principe 4 

L'homme a une responsabilité particulière dans la sauvegarde et la sage gestion du patrimoine constitué par la flore et la faune sauvages et leur habitat, qui sont aujourd'hui gravement menacés par un concours de facteurs défavorables".

C'est en droit international de l'eau que l'on trouve consacrée cette notion de "patrimoine commun del'humanité". Il en va ainsi, pour le sol et le sous-sol des mers et océans, aux termes de la convention sur le droit de la mer de 1982.

En France, la loi "Barnier" du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement va modifier la rédactionde l'article L.110-1 du code de l'environnement, laquelle est désormais la suivante : 

"I. - Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l'air, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation".

On relèvera qu'il est ici question du patrimoine commun de la "nation". Pour sa part, la Charte de l’environnement, adossée à la Constitution par la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 va consacrer le patrimoine  : 

« Que l'environnement est le patrimoine commun des êtres humains ».

Les auteurs de la Charte n'ont peut être pas tous perçus l'importance de cette phrase, souvent réléguée au second plan, loin derrière la controverse relative au principe de précaution - inscrit mais pas cité dans la Charte. Au demeurant, à la lecture des débats parlementaires afférents au projet de loi de loi constitutionnelle, cette notion ne semble pas avoir focalisé l'attention et les passions. 

Du reste, les juristes de droit interne ne s'intéressent encore que peu à cette notion, exception faite à quelques articles, généralement civilistes. 

Pourtant, cette réflexion s'avère nécessaire. Lors de la controverse sur l'exploration et l'exploitation des gaz et huiles de schiste, l'un des leviers de la mobilisation a sans doute été le sentiment de dépossession, éprouvé tant par des particuliers que par des élus locaux à l'endroit de leurs territoires. J'ai à ce titre proposé que les ressources minières soient explicitement qualifiées d'élements du patrimoine commun de manière notamment à modifier les conditions d'accés aux permis exclusifs de recherche qui ne peuvent plus être réduites à un dialoque entre l'Etat et le futur concessionaire.

Je travaille actuellement sur un article de fond sur ce sujet. Je souhaitais cependant en faire état d'ores et déjà et ici. Je suis preneur de toute information, document, idée, dans l'entier champ des sciences sociales, relatif au "patrimoine commun" dans son volet environnemental. 

Ala frontière de toutes les sciences sociales, essentielle pour la définition d'un projet d'avenir, la notion de "patrimoine commun" mérite l'attention de toutes et tous.


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