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La huitième gorgée - Valérie Carreau

Par Venise19 @VeniseLandry
La huitième gorgée - Valérie CarreauRésumons ! * Si vous aimez recevoir des nouvelles de femmes fortes, en voici dix, brèves, des portraits d’actions de femmes, modernes et sans complexes, derrière lesquelles se profilent aussi des compagnons de vie. Pour neuf des nouvelles, les hommes restent en arrière-plan, se superposent à l’action principale, excepté « À un cheveu » où c’est carrément l’inverse.
Ces femmes ont des besoins à combler : de sexe, d’enfants à porter, de nourriture, ce qui expliquerait l’allusion au « besoin des femmes d’être pleines » lu en quatrième de couverture. Le fruit de leurs entrailles occupe une place prédominante. À côté de la femme esclave parce que contrôleuse (« De biais ») à la femme rageuse devant les pleurs du nourrisson porté comme un lourd fardeau (« Le potage aux poireaux ») à une femme prête à tout pour être engrossé (« Le géniteur »), on trouve des femmes enclines sur la chose sexuelle, plus que leurs maris dans « L’en-cas » et la « Petite mort ».
Valérie Carreau aborde aussi les fins de vie : celui d’une femme libérée jusqu’à sa dernière minute (« Un bouquet de glaïeuls »), d’un homme nourri du passé et dorloté par une aidante (« À sa mémoire »). La nouvelle des « Bulles » fait l’apologie du mensonge et de la grossesse. « De toute cœur » termine par une fin, là où une femme médecin dévouée doit intervenir.
L'opinion ! * Ce n’est pas tant le désir de la gent féminine de se sentir rempli que j’ai retenu de ces dix nouvelles que la maitrise, l’aplomb, le contrôle qu’exercent ces femmes sur leur entourage et leur destin. Un mari froid et indifférent ? On s’auto-satisfait ou l’on se paye, littéralement parlant, un amant efficace, évitant ainsi des demandes inopportunes au mari. Dans la littérature (et dans la vie ?), les rôles sont souvent inversés, l’homme accordant « le privilège » à sa femme d’être tiède ou d’avoir mal à la tête. Audacieux ou précurseur ? Difficile de trancher, mais ces nouvelles peuvent assurément être appréciées pour leur modernisme.
Le mâle n’occupe définitivement pas le haut du pavé, excepté dans « À un cheveu » où il vole la vedette. J’ai été jusqu’à me demander : pour que la femme prenne sa place, est-ce qu’il faut nécessairement que l’homme soit effacé, réservé ou indifférent ? C’est une question un brin philosophique pour de la littérature si bien tournée, j’en conviens ! Voyons-le plutôt comme une suite de photographies de femmes aux contours nets, avec une option assumée de l’auteure de garder l’homme à l’arrière-plan. Le style, en maître absolu, nous renvoie des phrases sûres, placardées comme des vérités assumées, que je me suis souvent arrêtée pour admirer. Une belle constance que l’on ne retrouve pas si souvent dans les recueils de nouvelles, une unité dans le style, permis sans l’ennui qui va de pair avec l’homogénéité, considérant la variété des portraits et des situations.
Les deux nouvelles sur les personnes âgées m’ont enchantée. J’avais le fond de la gorge étranglée à ma relecture d’Un bouquet de glaïeuls, parce que oui, je l’ai relue, celle-là et plusieurs autres. La deuxième nouvelle sur la fin de la trajectoire « vie » nous présente un homme vieilli et dépendant et, en définitive, le seul homme aimant de ces histoires, d’une vulnérabilité attendrissante, devant une femme généreuse qui vient pallier ses carences avec une infinie délicatesse. Mine de rien, une autre femme ayant le dessus sur l’homme !
Dix nouvelles efficaces qui s’avalent et s’absorbent rapidement, par une auteure qui, ma foi, a tous les atouts en mains pour se démarquer dans cette jungle littéraire.
* J'ai séparé mon opinion du résumé, ce que je ne fais pas habituellement, parce qu'il est question de La Recrue du mois et j'étais en charge du résumé pour tous, ou pour être plus juste, pour toutes !
Qui a bu boira - Anick Arsenault
Le goût de vivre - Mylène Durand
De la voracité des femmes - Caroline Verstaen
La face cachée des femmes - Julie Tetrault
Ne manquez pas le questionnaire afin de connaître cette auteure très prometteuse : Valérie Carreau - La huitième gorgée, Éditions Marchand de feuilles 2010, 112 p.

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