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Ridiculous sublimous detail (4)

Publié le 18 juin 2011 par Hongkongfoufou

Par Hong Kong Fou-Fou

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Cette rubrique, désormais traduite en dix-sept langues et qui fait référence dans le monde de l'élégance et du bon goût, sera aujourd'hui consacrée à l'un des éléments les plus terrifiants du vestiaire masculin estival, rien qu'à la perspective de taper ce mot sur mon clavier j'ai les mains qui deviennent moites : le pantacourt.

Qu'est-ce qu'un pantacourt ? Deux écoles s'affrontent : pour certains, c'est un pantalon court, pour d'autres, c'est un short long. Dans les deux cas, c'est une belle connerie : comme leur nom l'indique, un pantalon, c'est long et un short, c'est court. Mais trêve de considérations linguistiques, qu'est-ce qu'un pantacourt, donc ? Par définition, c'est un type de vêtement entre le pantalon et le bermuda. On y revient. Un vêtement qui ne choisit pas son camp, quoi, un truc pour les indécis, les pleutres, les frileux (et quand on parle d'une fringue qui ne couvre pas entièrement les jambes, c'est un comble). Quelle que soit la matière qui le constitue, sa couleur, qu'il ait ou non des petits cordons de serrage qui pendouillent en bas, le pantacourt vous donne l'allure d'un vacancier légèrement beauf.

Mais mon propos n'est pas de vous convaincre que c'est moche. Si vous lisez cet article, vous devez probablement être d'accord avec moi. Ce qui me taraude, c'est cette question : qu'est-ce qui pousse un homme normal à s'acheter un jour un pantacourt ?

Imaginez un homme, normal donc. Dans son garage, une Triumph GT6 ou une Alfa GT Veloce. Dans sa bibliothèque, les oeuvres complètes des philosophes grecs côtoient les éditions originales de Spirou, les auteurs de la Pléiade tutoient les chantres de la ligne claire.

Sa femme, charmante, réussit parfaitement le veau Strogonoff. Ses enfants sont polis, se brossent les dents trois fois par jour et n'écoutent pas Tokio Hotel.

Il a tout pour être heureux. C'en est même scandaleux.

Pourtant, un matin au petit déj', sans trop savoir pourquoi, il prononce ces mots à son épouse encore ensommeillée : "Chérie, je me suis commandé un pantacourt à La Redoute".

La pauvre en renverse presque sa tasse de thé. Elle ne comprend pas. Forcément, au début, elle culpabilise. Qu'est-ce qu'elle a raté ? Et puis elle se rappelle de quelques signes qui auraient dû lui mettre la puce à l'oreille : la veille, elle a surpris son mari en train de sourire devant Pouch' le bouton de Vincent Lagaf'. La semaine précédente, il a ramené un catalogue VVF Villages pour les prochaines vacances. Il lui parle moins souvent de cette rubrique qu'il lit régulièrement sur internet, Si elle est dedans ou un truc comme ça.

Elle ne s'est pas alarmée, elle a mis ces dérapages sur le compte du surmenage.

Et voilà où ils en étaient, en cette belle matinée de printemps qui aurait pu être comme les autres mais qui allait devenir la Bérézina de leur famille.

Elle allait devoir expliquer aux enfants que leur père allait porter un pantacourt. Ils subiraient les railleries de leurs

pantacourt
camarades d'école. Elle-même devrait faire face aux regards gênés des autres mamans.

Je vous imagine en train de vous marrer. "Moi, porter un pantacourt ? Pas de risque !" Et pourtant, ça n'arrive pas qu'aux autres. Je ne parle pas des personnes qui au moindre rayon de soleil sortent les Crocs et le marcel, ceux-là sont déjà condamnés. Je m'adresse à ceux qui d'ordinaire soignent leur apparence mais qui peuvent basculer par négligence.

La seule occasion où le pantacourt est toléré, c'est lorsqu'il est assorti à une peau burinée, à un anneau dans l'oreille et à un sabre d'abordage. Vous commandez un boutre et vous vous livrez à la piraterie dans la mer Rouge ? Vous êtes le nouveau Sandokan ? Allez-y, portez un pantacourt ! Ce n'est pas moi, petit fonctionnaire veule et méprisable, qui vais vous dicter votre tenue vestimentaire !

Pour les autres, prudence ! Le pantacourt avilit l'homme, au même titre que les socquettes qui se veulent invisibles qu'on porte depuis quelques années avec des baskets. Ben désolé, un homme qui se respecte glisse ses pieds nus dans ses Spring Court. Tant pis si ça macère. Sinon, pour terminer sur une note culturelle, j'ai lu sur Wikipédia que "pantacourt", en anglais, ça se disait "Capri pants". Eh bien, suivez ce conseil : Capri, c'est fini. A la limite, allez vous perdre dans le triangle des bermudas, mais sinon, vraiment, cachez ce mollet que je ne saurais voir...


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