Petit avant-propos rapide sur le cinéaste coréen. Je n’ai jamais été un fan inconditionnel de Kim Jee-woon. Je ne pense pas qu’on puisse dire qu’il fasse partie des cinéastes importants de la cinématographie sud-coréenne bien que certains de ses films sont pas mal voire intéressant (parfois). On dénotait un talent certain en visionnant son court-métrage Coming Out. J’ai beaucoup aimé ses divertissements tels que Foul King et Le Bon, la Brute et le Cinglé. Beaucoup moins des films que je trouve surfaits tels que The Quiet Family, 2 sœurs et A Bittersweet Life. Kim Jee-woon nous revient donc avec J’ai rencontré le Diable / Akmareul boatda (2010) alors qu’on le dit en partance pour les Etats-Unis et ce sacro-saint Hollywood. On a tout dit ou presque sur ce film. Interdiction aux mineurs en Corée du Sud, il est passé sur la table de la censure. Violent, outrancier et j’en passe. Mais ce film avait en ce qui me concerne un atout premier : la confrontation du trop rare à l’écran Choi Min-sik et la belle gueule Lee Byung-hun.
La femme d’un agent du NIS (National Intelligence Service) est sauvagement assassinée par un tueur en série. Son mari, aidé de son beau-père policier récolte, des fichiers sur des suspects. Il prend un congé de deux semaines et se met en chasse. Bientôt, il retrouve celui qui semble être le véritable assassin…
Noir c’est noir, ainsi pourrait être l’adage de J’ai rencontré le Diable. L’humour est noir. La vengeance est noire. Les personnages sont d’une obscurité peu commune, encore plus lorsqu’elle contamine celui qui est censé être le « héro ». L’homme à « la vengeance légitime ». Plus le film avance et plus les forces destructrices le rongent de l’intérieur jusqu’à faire éclater une rage et une haine qui n’a plus rien d’humain. Et les questions se posent alors : Est-ce que son action est légitime ? Doit-on accepter ses agissements ? On peut comprendre le désespoir de ce « héro » et cette soif de vengeance qui en découle. Ce désespoir qui l’emmène vers les limbes d’une vengeance personnelle qui entraîne indubitablement des victimes en parallèles. C’est humain de le comprendre. Et là où J’ai rencontré le Diable est intéressant car il nous montre la « contamination » de celui qui s’érigeait dans une certaine forme de « justice », la victime indirecte de ce meurtre. Intéressant de voir de quelle façon cet homme obscurcit sa personnalité en usant de stratagème qui le met au même niveau que l’homme qu’il traque. L’assassin justement. Que dire de la manière dont Kim Jee-woon l’emploie ? On ne pourra qu’éprouver un certain dégoût pour cette complaisance qu’apporte l’auteur au personnage du tueur en série. Sans ça, la performance de Choi Min-sik est bonne à l’image de celui qu’il affronte. On aurait tout de même pu s’attendre à beaucoup mieux de ces deux acteurs.
Là où J’ai rencontré le Diable pêche c’est dans son scénario. Rien d’original. Très classique. On a le sentiment de voir une mixture de thriller coréen en fait. La réalisation de Kim Jee-woon n’évite malheureusement pas à un côté tape à l’œil qui est de trop ici, bien que cela ne soit que ponctuel. Certains y verront des scènes qui n’apportent rien si ce n’est remplir un film déjà bien long. Chose que je rejoins par moment lorsqu’elles ne sont franchement pas ridicules (celle de la tête qui tombe et roule). On ne voit pas le temps passer et c’est un plus pour un film de cette durée. Beaucoup seront outrés par la surenchère de violence qui ne me pose personnellement pas de problème. Elle est sacrément présente c’est un fait, mais est loin d’être aussi choquante. J’aime assez par ailleurs la répétition de la vengeance qu’emploie Lee Byung-hun à l’encontre de Choi Min-sik. Si le film n’avait été que ça, j’aurais adoré. Maintenant ça donne aussi un côté quelque peu vain et qui aurait pu être bien mieux mis en scène et pensé scénaristiquement parlant. Il est fort dommage par ailleurs que le film n’est pas été mieux traiter notamment sur l’idée que nous avons tous « une part de diable » en nous. Tout ceci reste bien trop en surface.
J’ai rencontré le Diable est d’une froideur extrême. Un film glauque jusqu’au-boutisme et une question subsistera à l’issu du visionnage : qui est véritablement le diable ? Sans ça, Kim Jee-woon se sera fait plaisir avec ce film à l’image d’un John Woo qui signait son Hard Boiled aux Etats-Unis. Espérons pour lui qu’il puisse s’épanouir là-bas.
I.D.
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