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Jadis, les Masters of horror, et le quatuor Romero, Argento, Craven et Carpenter, faisaient trembler les salles. Aujourd’hui, leurs films ne passent même plus par la case ciné, relégués à des sorties confidentielles, directement en DVD. C’est le cas de Giallo, My Soul to Take, Survival of the dead, et très certainement de ce The Ward-ci. Arf, les temps ont changé. Big John pour les intimes (Halloween, Christine, The Thing) a mis dix années avant de pointer à nouveau le bout de son nez derrière une caméra. Le résultat ? Pas si mal, si l’on aime le film d’épouvante classique, mené à l’ancienne, à coup de jump scare joliment désuets et d’ambiance 60’s. Pas facile d’ailleurs pour Carpenter d’apparaître novateur en implantant le décor de son nouveau film dans un asile psychiatrique. Sucker Punch (pour la bande de nanas) et Shutter Island (pour le reste) étant déjà passés par là, il fallait trouver de quoi retenir l’attention. Le début, prometteur, y parvient haut la main, rappelant en quelques très beaux plans la maîtrise du cinéaste. La suite, moins impressionnante, reste linéaire et sans surprise, mêlant classicisme revendiqué et refus du gore à outrance.
Comment alors expliquer le réel enthousiasme à la fin de The Ward ? Un nom d’abord : Amber Heard. Nouvelle scream queen et égérie d’un certain cinéma fauché (Mandy Lane, And soon the darkness), l’actrice, en Jamie Lee Curtis des temps modernes, insuffle une profondeur inattendue à son personnage, donnant corps à l’intime, au souffle et à la chair. Carpenter, lui, excelle à filmer ces jeunes filles (Lyndsy Fonseca de Kick-Ass, Danielle Panabaker de The Crazies et de Vendredi 13), s’attarde sur leurs jeux harmonieux à l’écran, prend le temps d’esthétiser l’horreur en cours, féminisant ses plans, optimisant ainsi le huis clos. L’histoire (un fantôme revient tourmenter le groupe) ? Finalement, on s’en fout ! L’essentiel est ailleurs : dans l’atmosphère vieillotte mais ultra travaillée, dans les paradoxes du film (schématique mais jamais ennuyeux), dans le rendu mélancolique très yurei eiga, qui séduit par son élan véritablement nostalgique, et donc, un peu rebelle.