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La Balade Sauvage, Terrence Malick à ses débuts

Par Tred @limpossibleblog
La Balade Sauvage, Terrence Malick à ses débutsCette balade-là, je ne l’avais plus parcourue depuis 1999, lorsque je découvrais le film de Terrence Malick pour la première fois. C’était au moment de la sortie de La ligne rouge après vingt ans d’absence pour le cinéaste américain, et quelques cinémas en avaient profité pour programmer Badlands – La Balade Sauvage et Les moissons du ciel, les deux films réalisés par Malick dans les années 70. Je crois me souvenir que j’avais vu La balade sauvage dans la petite salle du Ciné 104 de Pantin, mais je ne parierais pas trop cher sur ce souvenir non plus. En l’espace de quelques semaines donc, je rentrais en contact avec trois films de Terrence Malick, et le choc cinématographique fut grand.
Depuis ces semaines profanes de 1999, j’ai revu plusieurs fois La ligne rouge et Les Moissons du ciel, ce dernier notamment lors d’une belle ressortie en copie neuve l’année dernière. Mais je n’avais jamais revu La balade sauvage, le premier long-métrage réalisé par Malick. Un an après Les moissons du ciel, le voici heureusement qui ressort dans les salles françaises en copie neuve lui aussi, s’affichant en grand sur des écrans aussi beaux que ceux du Max Linder Panorama ou de l’Arlequin. Pour changer, c’est ce dernier qui a eu ma préférence, m’étant tenu sans raison particulière à l’écart de sa salle 1 pendant de trop nombreuses années.
La Balade Sauvage, Terrence Malick à ses débutsEn fin d’après-midi un jour de semaine, huit jours après sa ressortie, j’avais presque la grande salle de l’Arlequin pour moi seul, les quelques rares autres spectateurs présents étant tous hors de mon champs de vision, dans les rangs derrière moi (et pourtant j’ai été sage et me suis installé au 7ème rang seulement !). Revoir La balade sauvage quelques jours après avoir vu et revu The Tree of Life est un voyage étrangement apaisant. Après les discussions intenses autour de sa récente Palme d’Or, retrouver un Malick épuré nous renvoie aux bases de son cinéma.
En 1973, Malick suivait alors le parcours d’un jeune couple d’américains entre le Dakota du Sud et le Montana dans les années 50. Kit a 25 ans, Holly n’en a que 15. Son père à elle désapprouvait leur relation, Kit l’a abattu sans remord. Commence une fuite sans but, à travers la nature, entre les hommes, contre les obstacles, avec déraison, vers un ailleurs bien flou pour eux. Holly nous raconte son histoire en voix-off, comme la petite sœur dans Les moissons du ciel, comme une vraie narratrice, pour accompagner le récit. La voix off chez Malick n’a pas encore tout à fait pris cette tournure introspective qui se détache d’une forme narrative classique pour devenir les échos des pensées des personnages.
La Balade Sauvage, Terrence Malick à ses débutsMais déjà, le regard du cinéaste s’intéresse tout particulièrement à la nature. Celle de l’homme lui-même, qui se laisse emporter par des pulsions inexplicables et meurtrières, et celle qui nous entoure, ce cadre époustouflant entre les champs, les rivières, les montagnes, le ciel et les animaux. Déjà, Malick laissait sa caméra glisser sur la beauté de la nature en utilisant une musique la magnifiant, ici notamment « Gassenhauer » de Carl Orff. Malick s’intéressait et s’interrogeait sur la perte de l’innocence, celle d’un garçon qui se choisit la voie d’un criminel sans trop vraiment la comprendre, et celle d’une fille qui va assister à la violence sans la réprimer ni la comprendre elle non plus. Comme il le montrera dans chacun des films suivants, Malick est un cinéaste qui observe le doute et le ressent lui-même. Il n’était en revanche pas aussi timide et discret qu’aujourd’hui, et il apparaissait lui-même à l’écran, le temps d’une scène, homme de passage frappant à la porte et échangeant quelques phrases avec ce magnétique Martin Sheen. Cette scène laisse un sentiment amusé et fasciné. Alors le voilà enfin, Terrence Malick. Il faut remonter le temps pour le voir en grand jeune homme pataud qui allait devenir ce cinéaste légendaire et invisible.
La fin du générique nous révèle qu’à l’époque, Badlands avait été classé PG par la commission de censure américaine, soit un simple avertissement pour les jeunes enfants, malgré un décompte de morts ostensibles. Quand on voit avec quelle facilité cette même commission distribue des PG-13 (moins de 13 ans fortement déconseillés) voire des R (interdits aux moins de 17 ans non accompagnés) alors qu’on ne voit rien de particulier à l’écran, on se dit que l’Amérique est devenue plus prude, du moins ses représentants.

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