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Les Compagnons menuisiers du Devoir de Liberté

Par Jean-Michel Mathonière

Dans la Société des menuisiers du Devoir de Liberté, dit les Gavots, il y a trois ordres de Compagnons, savoir : premier ordre ou Compagnons reçus ; deuxième ordre ou Compagnons finis ; troisième ordre ou Compagnons initiés. Il y a en outre la classe de ceux qui ne sont pas encore reçus et que l'on nomme Affiliés. Quand un jeune homme se présente et demande à être membre de la Société, on interroge ses sentiments ; s'il fait des réponses satisfaisantes, on l'embauche. A la première assemblée générale, on le fait monter en chambre, et, en présence de tous les Compagnons et de tous les Affiliés, on lui fait quelques questions pour savoir s'il ne s'est pas trompé, si c'est bien dans cette Société et non dans une autre qu'il a voulu entrer; car, comme on le lui fait observer, il y en a plusieurs, et chacun est libre dans son choix. Enfin, on lui fait lecture du règlement auquel tout Compagnon, tout Affilié doivent se soumettre ; on lui demande s'il peut s'y conformer : s'il répondait non, il pourrait se retirer ; s'il répond oui, il est Affilié et placé à son rang de salle. S'il est honnête et intelligent, il arrivera successivement à tous les ordres du Compagnonnage et à tous les emplois de la Société.

Les Compagnons menuisiers du Devoir de Liberté

Les Compagnons se parent de petites cannes et de rubans bleus et blancs qu'ils attachent à la boutonnière de l'habit, et qu'ils font flotter au côté gauche. Le chef de la Société est nommé premier Compagnon, s'il est du second ordre, et Dignitaire, s'il est du troisième. Dans le premier cas, ses rubans, qu'il porte comme les autres Compagnons, sont embellis de franges en or ; il est paré, les jours de fête et de cérémonie, d'un bouquet à deux épis dorés : dans le second, il est décoré d'une écharpe bleue, passant sur l'épaule droite et pendant au côté gauche, ornée sur la poitrine d'une équerre et d'un compas entrelacés, et à ses extrémités inférieures, de franges en or.

Les Compagnons menuisiers du Devoir de Liberté

Suite:

La Société change de chef deux fois par an ; tous les Compagnons, tous les Affiliés concourent à l'élection ; le vote est par bulletin. Le candidat qui obtient la majorité des suffrages est proclamé Premier Compagnon ou Dignitaire, selon l'ordre auquel il appartient; on le pare des insignes de sa nouvelle dignité, et il est pendant six mois à la tête de la Société. Il accueille les arrivants, dispose du Rouleur à son gré ; il fait embaucher, lever les acquits ; il convoque les assemblées. Mais il a des devoirs à remplir et a besoin de marcher droit pour n'être pas révoqué. Il y a un Secrétaire et des Anciens chargés de surveiller journellement la direction des affaires. A la Société appartient le contrôle de toute chose. On voit qu’une hiérarchie est établie dans cette Société, ce qui néanmoins n'en exclut pas l'égalité entre tous ses membres. Les Compagnons et les Affiliés sont mêlés dans les ateliers, dans les chambrées et aux mêmes tables ; ils se réunissent aux mêmes assemblées. Un Compagnon n'a pas plus de pouvoir sur un Affilié que celui-ci n'en a sur un Compagnon. Le règlement étant positif et les droits étant communs, on peut se prendre réciproquement en défaut. Un chef de la Société pris en défaut subit double peine, et cela pour lui rappeler qu'il doit servir d'exemple à tous. Les lois de la Société défendent le topage. Ces deux mots vous et toi, ont paru se faire la grimace; il en fallait proscrire un, on a proscrit le toi. Tous les membres de la Société, jeunes et vieux, doivent se dire réciproquement vous. La propreté et le respect sont de rigueur. Les Compagnons portent des surnoms tels que ceux-ci : Languedoc La Prudence, Bordelais La Rose, etc. ; le mot Pays est à la place du mot Monsieur ; on ne connaît pas les hurlements.

Notice d'Agricol Perdiguier extraite du Livre du Compagnonnage (2e édition, 1841). Figures extraites des quatre planches lithographiées publiées par Agricol Perdiguier vers 1862, Le Compagnonnage illustré.

Les Compagnons menuisiers du Devoir de Liberté

L'homme pense parce qu'il a une main. Anaxagore (500-428 av. J.-C.)


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