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UN AMOUR DE JEUNESSE de Mia Hansen-Løve

Par Celine_diane
UN AMOUR DE JEUNESSE de Mia Hansen-Løve
C’est une histoire en trois temps : 1999, 2003, 2007. Celle d’une jeune fille, Camille (incroyable Lola Creton !), hantée par un amour obsessionnel, fou, impérissable. Celle d’une ado pleine d’idéaux, qui se mue en jeune femme. Celle d’un deuil : l’enfance laissée derrière soi. Son Sullivan (Sebastian Urzendowsky), ombre récurrente qui plane sur toutes ses années, est à lui seul le symbole d’une candeur sacrifiée, piétinée par la lourdeur du temps qui passe, de ces secondes qui défilent, implacables, qui transforment les envies d’absolu en résignation mature. Cet abandon, d’un garçon, d’une parenthèse passée, Mia Hansen-Løve le capte avec beaucoup d’élégance, à l’aise tant au niveau spatial que temporel. L’espace, elle le comble sans cesse, s’en sert également de contrepoint, aux états éphémères, aux émotions de passage. Des chambres aux rues de Paris, des routes de campagne aux maisons de glace du Danemark, ses personnages se construisent comme des lieux. A découvrir, à (re)construire, à laisser derrière soi, à inventer. Pas étonnant donc que la jeune héroïne du film se rêve architecte, l’architecture comme possibilité de construction, d’alternative au soi. Pas étonnant non plus qu’elle s’entiche de son professeur (Magne Havard Brekke), le maître à penser, maître de ses sentiments.
Le temps, ensuite, la cinéaste ne cherche pas à le remplir. Au contraire, elle le contemple, le laisse s’écouler, cruellement, lentement. Cette langueur est nécessaire, mélancolique, miroir du poids des années sur des protagonistes vieillissants. Heures et murs à l’unisson pour dire l’amour, à la place de mots qui n’ont de toute façon pas de sens, qui sont trop faibles, pour exprimer les troubles de l’âme. " Je t’aime ", dit Sullivan à Camille. "C’est tout ?", lui répond-t-elle. Il y a aussi beaucoup de patience dans le troisième film de Mia Hansen Løve (après Tout est pardonné et Le Père de mes enfants), et un mélange atypique d’intellectualisation extrême (caméra chaste, dialogues existentiels et absence d’humour au programme) et de sensibilité à fleur de peau. Ce concept, qui maintient le spectateur d’abord à distance, finit par envoûter, et marquer le cœur d’un spleen entêtant. Devant Un Amour de jeunesse, on est dès lors tout entier happé, à l’instar des universels Sullivan et Camille, par un même spectre : l’image à tout jamais figée, morte, enterrée, des promesses naïves de l’innocence.
UN AMOUR DE JEUNESSE de Mia Hansen-Løve

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