En mêlant habilement le point de vue documentaire à une mise en scène énergique, Julien Leclercq, fait de cette œuvre cinématographique, un très grand spectacle doublé d’un témoignage historique indéniable. Comme il est dit dans les bonus, de ce récit véridique, on ne connaissait alors que les très longues et monotones images rapportées par la télévision de l’époque. On n’y voyait pas grand-chose et seule l’attaque finale laisse entrevoir quelques scènes informatives.
Pour le hors-champ (préparation de l’assaut, tractations avec les terroristes..) voici donc l’histoire que nous conte très bien le cinéaste, avec en point d’appui le concours entier des membres du Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) (voir bonus).
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Ce qui atteste l’exactitude des faits et gestes rapportés avec un soin méticuleux par un réalisateur tout aussi attentif aux moindres détails. Ca peut en agacer quelques uns mais personnellement, j’y trouve tout l’intérêt du projet (quasiment rien ne nous échappe). Et pour lier la grande histoire, à ce fait divers tragique, l’utilisation judicieuse d’images d’archives est une bonne idée. Il y a aussi cet aspect plus romancé sur l’un des membres du GIGN, appelé à mener l’opération: Thierry, marié et père d’une toute petite fille.
Dès l’annonce de la prise d’otages sur le tarmac algérien, son épouse Claire (Marie Guillard ) sait que sa vie est en danger. Tout au cours du déroulement, elle est le témoin lambda des événements. Ce n’est pas forcément ce que Julien Leclercq maîtrise le mieux, mais le personnage permet de nous faire comprendre, sous un autre angle, ce que fut cette prise d’otages.
Chaque terroriste avait une fonction précise, auprès des passagers. La prière était au programme
Des coulisses gouvernementales aux tractations avec les terroristes, s’échafaude ainsi une reconstitution qui je pense est très proche de la réalité. Je suis un peu surpris par le rôle improvisé de l’émissaire française, une technocrate ambitieuse que joue fort bien Mélanie Bernier . Elle bouscule tout le monde, prend des initiatives sans en référer à sa hiérarchie, mais réussit très bien à faire monter la pression.
D’un camp à l’autre, la menace est palpable, et l’angoisse des voyageurs, grandissante au fur et à mesure des événements. Pour ne pas avoir suivi les instructions, pour un passeport compromettant, certains seront abattus. Jusqu’à l’assaut final, remarquablement filmé, un peu à la manière des GI’s débarquant sur les plages normandes. Mais ce n’est pas du cinéma, c’est ainsi que les hommes du GIGN ont approché l’avion : trois passerelles arrivant de front, à la hauteur de chaque porte. La suite, édifiante, est tout à fait véridique.
LES BONUS
Le making of
Dans un registre que l’on ne lui connaissait pas, Vincent Elbaz ,tient le rôle du capitaine Thierry, chargé de mener l’assaut. Il assume parfaitement son personnage, façonné pendant des semaines au contact des hommes du GIGN. On le voit à l’entraînement où il doit affronter l’épreuve de « la buse ». L’enfer, dit-il.
A ses côtés le général Favier, à l’époque des faits ,commandant du groupement d’intervention (Grégori Derangère ) explique sa collaboration avec l’équipe du film : « on ne peut apporter notre contribution dans un film de cette nature, et accepter qu’il ne soit pas parfait dans le domaine qui est le nôtre ». C’est pourquoi pendant toute la durée du projet le GIGN sera aux avant-postes, avec même la participation de gendarmes sur le tournage (notamment pour l’assaut final).
Certains d’entre eux témoignent,se remémorant seconde après seconde, les détails de l’intervention. Il est question, comme dans le film, de « la gestion familiale sur une telle affaire. Depuis , au sein du GIGN, il y a un avant et un après Marignane ».
La crise vue de la cellule familiale
Yasmina, une passagère apporte aussi son témoignage sur le déroulement de la prise d’otages . Pour le film, un airbus à l’abandon sera transporté de Bordeaux vers Melun, un tube de métal de 40 m de long, les images sont impressionnantes. Pour parcourir 700 km, il faudra onze jours.
Effets spéciaux, scènes de tournage, ambiance de répétitions, tout le reste est à l’avenant ; un excellent making of qui se termine par de sincères accolades et embrassades. Voir les quatre comédiens terroristes (Aymen Saïdi, Djanis Bouzyani, Chems Dahmanie et Mohid Abid ) se jeter dans les bras des autres comédiens , a quelque chose d’émouvant …
Histoire secrète d’un détournement
C’est le volet historique de ce dvd, diffusé par France 2 et qui évoque très nettement « l’opération suicide sur Paris (…) les terroristes souhaitant faire exploser l’avion au dessus de la capitale ». Les prémices du 11 septembre, on le dit et on le répète dans cet excellent documentaire qui voit défiler les protagonistes de l’époque, dont Omar Chikhi, l’un des fondateurs du GIA (groupe islamique armé) à l’origine du détournement de l’avion.
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Édouard Balladur alors premier ministre revient lui aussi dans le détail sur la manière dont il a géré la crise (avec l’ordre d’abattre l’avion s’il repartait pour Paris). Les relations entre la France et l’Algérie sont très tendues, les enjeux politiques de l’affaire n’échappant à personne.
Là encore des témoignages de membres du GIGN éclairent parfaitement les tenants et les aboutissants du détournement, alors qu’une hôtesse de l’air relate la manière dont elle a vécu ces deux jours au contact des terroristes. On n’est plus très loin du syndrome de Stockholm..