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Jacques Chessex, Le Dernier Crâne de M. De Sade

Par Alain Bagnoud

Chessex,  Le Dernier Crâne de M. De Sade A l'occasion de sa sortie en poche, on peut peut-être parler maintenant du Dernier Crâne de M. De Sade, débarrassé qu'il est de tout ce qu'il portait.

On se souvient en effet que Jacques Chessex était mort juste avant sa sortie, en public, pendant qu'il prenait la défense de Roman Polanski alors en prison à Zürich sous l'accusation de détournement de mineure.

Du coup, Le Dernier Crâne de M. De Sade était devenu, sous le poids des événements, comme une sorte de testament et un manifeste à la défense de la liberté d'expression et de mœurs.

Un autre livre de Jacques Chessex est paru depuis, un entretien avec lui-même, qui libère le roman dont je vais parler ici de sa fonction testamentaire.

Ce qui ne l'empêche pas d'être vendu dans les bibliothèques de Suisse romande sous cellophane. Mais autant le dire tout de suite à ceux pour qui ce serait un argument de vente: c'est un livre qui se lit à deux mains.

On a bien ça et là quelques scènes sado-masochistes, mais je défie quiconque d'en être émoustillé. Jacques Chessex a voulu choquer le bourgeois plutôt que l'exciter.

Le cellophane s'explique par l'âge de la partenaire de Sade, qu'il fouette, torture avec une épingle, par qui il se fait sodomiser avec des godemichés. Madeleine Leclerc, fille d'une infirmière de l'hospice de Charenton où est enfermé le vieux libertin de 74 a

Jacques Chessex
ns. Madeleine Leclerc a 15 ans. En notre période de fantasmes pédophiles, ça suffit pour expliquer le plastique.

Jacques Chessex, donc, raconte la fin du vieillard, documentée, et les péripéties de son crâne, qui le sont moins. Son récit n'échappe pas à quelques outrances, à force de vouloir faire de son personnage un saint de l'absolu: une aura phosphorescente s'élève autour de lui, il exhale une odeur de soufre ou prononce, bien opportunément pour l'auteur, des mots « incohérents »: « Mon dernier crâne! Mon dernier crâne! »

Au reste, le livre est intéressant à cause notamment de sa composition en facettes: il contient toutes sortes de petits récits, parfois parodiques comme le premier chapitre, ou qui forment des mini-romans. Lors des réapparitions du crâne, par exemple.

Cette composition très libre est un charme. Et puis on a le personnage du Marquis de Sade et l'écriture de Chessex, dont le talent n'est plus à démontrer. Le dernier crâne de M. De Sade n'est donc pas le brulot outrancier dénoncé quelquefois. Pas non plus le legs définitif d'un grand écrivain. Un roman intéressant qui se lit bien.


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