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La planète des singes: les origines

Publié le 12 août 2011 par Flow

La planète des singes: les origines.

(réalisé par Rupert Wyatt)

Lève-toi et marche!

 

 

Il faut dire ce qui est: ceux qui ne connaissent pas bien l'univers de cette vieille saga SF qu'est La planète des singes (c'est mon cas) se moquaient pas mal de la sortie de ce préquel (mode hollywoodienne des plus harassantes) alors que les aficionados des poilus bourreaux des humains redoutaient ce projet comme une envie de gerber un lendemain de cuite. Résultat: le film est la plus grande surprise de l'été. Il s'inscrit dans la saga et s'en affranchit tout autant. Un blockbuster intelligent et divertissant.

 

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Le long-métrage raconte comment les singes (enfin un: César; puis plusieurs) développent une conscience individuelle, puis communautaire et décident de s'affranchir du monde des hommes. Ces derniers, entre soif de pouvoir, d'argent, de gloire et leurs rêves brisés apparaissent comme faibles et décadents. L'affrontement est inévitable...

Ce film est d'une richesse assez importante. En grand paresseux, j'ai décidé de faire simple en le découpant dimensions par dimensions afin d'étudier chaque point en détail.

Dimension entertainment: des singes plus vrais que nature.

Je ne comptais pas regarder ce film à la base. Comme je l'ai dit, je ne me suis jamais intéressé à cet univers et de plus, la bande annonce était vraiment calamiteuse. Seulement, j'ai lu l'interview, sur Mad Movies, du réalisateur Rupert Wyatt, cet inconnu ayant fait un seul film directement sorti en DVD par ici. Pour quoi un grand studio comme Fox confie t'elle son gros blockbuster estival à un inconnu, avec la bagatelle de 90 millions de dollars? Une avant-première ayant lieu le soir même, j'y suis allé..

Et je conseille à tous d'en faire autant. Le long-métrage est un pur divertissement, un spectacle de chaque instant. Une fois qu'on est emporté par l'histoire, on n'en sort plus. Cet investissement est rendu possible par l'empathie qu'on développe pour César puis pour les autres singes. Le travail effectué sur les effets spéciaux est réussi. Les singes semblent réellement humains. La technique de performance capture d'Avatar fait des merveilles. Ajoutez à cela de l'émotion, des relations intergénérationnelles intéressantes, un peu d'action dans le dernier acte, des séquences très maitrisées (l'ellipse lorsque César grandit, l'attaque du Golden Gate) et vous obtenez un film pour toute la famille.

Dimension SF: le sel de l'anticipation.

Évidemment, s'arrêter au premier niveau de lecture équivaut à se couper de la majeure partie de la richesse du film. Tout d'abord, évoquons la dimension SF. Sans s'inscrire totalement dans ce qui a été fait dans la franchise par le passé, l'œuvre de Wyatt se pose en digne héritière d'une certaine tranche de la science-fiction. Cinéma d'anticipation, on y voit une humanité décadente, obnubilée par l'argent et les découvertes scientifiques (pour de belles causes attention mais qui dans les faits sèment les graines de notre propre destruction), bientôt rattrapée par sa création. Et lorsque la créature est plus humaine que le créateur, il est temps de se poser les bonnes questions. Il est évident qu'on n'atteint pas le niveau d'un Battlestar Galactica ou d'un Blade Runner, je n'ai pas perdu l'esprit, on reste dans un blockbuster estival. Mais retrouver ce raisonnement dans ce genre de film fait plaisir à voir.

Dimension tragique: le syndrome Star Wars.

On retrouve également dans cette Planète des singes tout ce qui faisait le sel de La revanche des siths. On suit l'épopée d'un être hors du commun et on sait avant que l'histoire ne commence où tout cela va nous emmener. Seulement, on s'attache à ce personnage et on voudrait qu'il prenne une bifurcation et ne finisse pas là où il doit finir. Mais c'est impossible. Alors lorsqu'on assiste aux évènements qui peu à peu le font basculer, on ressent de la frustration. Alors qu'Anakin Skywalker sombrait peu à peu dans le côté obscur de la force devant notre regard impuissant, César est forcé par les évènements à s'opposer à l'humanité. On occupe la même place que dans une tragédie grecque. On connait la fin et on est impuissant face au poids du «destin». Enfin une utilité aux préquels?

Dimension politique: naissance d'un leader.

La planète des singes: les origines raconte la naissance d'un leader politique: César. C'est pour cette raison que la bande-annonce est trompeuse. Alors que l'on s'attendait à un gros film d'action mettant en scène la prise de pouvoir des singes, il n'en est rien. On suit le cheminement du personnage. Tout d'abord inconscient politiquement parlant (il vit dans sa bulle), il découvre petit à petit l'étendue des sévices subies par son espèce. Il rentre donc en politique et ses revendications sont simples, il veut s'émanciper et permettre à ses semblables d'en faire autant. Sans violence. Un blockbuster intelligent, donc, à des années lumières de ce qu'en aurait fait un gars comme Bay (des singes affrontant des tanks et des robots tant qu'on y est ça vous dit?).

Dimension philosophique: lève-toi et marche!

En regardant le film, j'ai repensé à un texte de Hegel que j'avais commenté en terminale:

«En ce qui concerne le maintien du corps, ce qui s'offre au premier coup d'œil c'est la station droite de l'homme. Le corps animal court parallèlement au sol. La gueule et l'œil suivent la même direction que l'échine. L'animal ne peut de lui-même faire cesser ce rapport avec la pesanteur, qui le distingue. L'opposé a lieu chez l'homme, puisque l'œil regardant en avant, dans sa direction naturelle, fait un angle droit avec la ligne de la pesanteur et du corps. L'homme peut aussi, à la vérité, marcher à quatre pattes, et c'est ce que font les enfants. Mais, aussitôt que la conscience commence à s'éveiller, il rompt le lien animal qui l'attache au sol, il se tient droit et libre. Se tenir droit est un effet de la volonté. Car si nous cessons de vouloir, notre corps se laissera aller et retombera sur le sol. Par cela seul, la station droite exprime déjà une signification spirituelle. Le fait de se lever sur le sol, étant lié à la volonté, dépend de l'esprit et indique la liberté. Aussi a-t-on coutume de dire d'un homme qui a un caractère indépendant, qui ne soumet pas ses sentiments, ses opinions, ses projets et ses desseins à ceux d'autrui, qu'il se tient ferme sur ses jambes.»

Ce texte est, à mon avis, assez représentatif de ce qu'a essayé de mettre en image Rupert Wyatt. César passe par tous ces stades. Enfant, il marche à quatre pattes, puis à mesure que sa conscience s'éveille au monde, il affirme sa volonté et se lève. La position du corps étant une métaphore de ce qui se passe dans sa tête. Il développe sa capacité de langage afin de communiquer (son premier mot est un grand moment). Pour finir, il devient un animal social. Il a besoin, comme tout être conscient, de combattre sa solitude. Il transmet à son espèce sa conscience. La fin du film correspond à la naissance du sentiment d'appartenance, d'une conscience collective. Le film ne réussit rien de mieux que de décrire la naissance de cette nouvelle espèce intelligente.

Une réussite. Ça faisait longtemps qu'un film ne m'avait pas fait abandonner mon regard critique froid et détaché. Impliqué à fond, j'ai ressenti chaque moment. Et rien que pour ce fait rare, je tire mon chapeau à ce préquel sorti de nulle part mais avec lequel il faudra compter.

 

 

Les +

- César et son cheminement.

- Beaucoup de facettes pour un simple blockbuster.

- C'est bon d'être surpris par un film.

Les moins

- Certains plans larges donnent un aperçu de la limite des effets spéciaux.

- Hélas, il va y avoir des suites.

Note:

Pastèque royale


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