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L'homme de Londres : Simenon, Decoin et Béla Tarr

Par Sergeuleski

"Toute la vie durant, on ne fait qu'attendre ; attendre quelque chose qui va changer nos vies ; quelque chose qui nous rende meilleur aussi " - Béla Tarr

L'homme de Londres 1947.jpg

L'homme de Londres Decoin Suzy Prim Jules Berry.jpg

   L'homme de Londres de Georges Simenon - adaptation pour le cinéma d'Henri Decoin - 1943

  Maloin, homme marié, père de deux enfants, mène une vie simple, stable et monotone ; une vie sans but. Lorsqu'il devient témoin d'un meurtre et met la main sur une grosse somme d'argent, sa vie bascule : Maloin incarnera alors l'indestructible désir des êtres pour la vie, la dignité, la liberté et le bonheur.

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   Là où Henri Decoin a besoin de raconter une histoire pour faire son cinéma dans son adaptation du roman de Simenon en 1943, Béla Tarr, avec le même roman, n'aura besoin que de représenter un homme car, pour Bélar Tarr, faire un film ce n'est pas raconter une histoire mais... représenter quelque chose :

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   "Je déteste les histoires" précise-t-il. Quant à la réalité : "La réalité est difficilement saisissable (1) et donc... représentable ; je préfère l'imaginaire."

   Bélar Tarr n'a pas besoin d'acteurs non plus... mais de personnalités : " Je choisis des personnalités et des situations proches de leur vécu". 

  

   L'homme de Londres  - représentation de Béla Tarr pour le cinéma - 2007

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  A ceux qui doutent encore de la différence entre un réalisateur et un cinéaste-auteur, et qui plus est... cinéaste-artiste... il leur suffira, après lecture du roman de Simenon, et pour lever ce doute, de visualiser son adaptation par Decoin et sa représentation lancinante par Bélar Tarr.

   

   L'homme de Londres : un roman, deux films, deux maîtres d'oeuvre donc : l'un réalisateur, l'autre... cinéaste-artiste ; deux protagonistes qui, une fois encore, entre adaptation et représentation, posent la question du lien entre la littérature et le cinéma et de son traitement (2); et au-delà : la place de l'artiste.

  

Bélar Tarr - réalisateur hongrois.jpg
Béla Tarr apporte une réponse : le cinéma face au roman n'a qu'un rôle à jouer : sublimer ce roman qui viendra à son tour métamorphoser sa représentation cinématographique comme un effet boomerang - transcendance et transfiguration -, jusqu'à ce qu'il ne soit plus possible de ne pas (re)penser la lecture de l'un suite à la visualisation de l'autre ; et vice versa.  

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1 - Les frères Dardenne sont sans doute les seuls à y parvenir depuis 20 ans.

2 - La quasi totalité de la production cinématographique - même la meilleure -, a pour origine un texte - romans, nouvelles, théâtre, essais, BD... sans oublier le fait-divers ; ce qui pose la question de l'autonomie du 7è Art et de sa qualification en tant que discipline auto-génératrice d'un univers créatif artistique de premier plan. Et là encore, Béla Tarr apporte une réponse on ne peut plus convaincante.


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