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La photo de famille était réussie. La conférence internationale « pour le soutien à Libye nouvelle » qui s’est tenue cette semaine à Paris rassemblait certes une cinquantaine d’États autour des membres désignés du Conseil National de Transition. « Pour la première fois depuis 1949, l'Otan s'est mise au service d'une coalition emmenée par deux pays européens déterminés, la France et le Royaume-Uni » s’est félicité le chef de l’État à la traditionnelle conférence des Ambassadeurs. Pourtant, le cliché comme la déclaration présidentielle ne doivent pas faire illusion.
Dans ce conflit, l’Europe a, en premier lieu, étalé ses divergences : les initiateurs de la coalition n’ont pas été en mesure de convaincre une majorité de partenaires européens de prendre part à la « campagne de Libye ». La Norvège a même procédé au retrait de ses chasseurs F-16 à un moment où la coalition craignait l’enlisement du conflit. La mise en exergue par Nicolas Sarkozy du tandem franco-britannique dans cette opération ne doit pas ensuite occulter les réticences ancestrales de Londres à promouvoir une défense commune avec la France et son attachement viscéral à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord et à l’Amérique : on se souvient d’ailleurs, quelques jours après le début des combats, de la polémique sur la question de l’instance qui serait chargée du commandement de cette opération. La France parle Europe de la défense quand Londres préfère évoquer la défense de l’Europe. Enfin, malgré les propos du Président de la république sur le « retrait américain », le discret « push » final des États-Unis n’aura sans doute pas été de trop pour aider les « rebelles » à se rapprocher de Tripoli.
L’Europe ne sort pas non plus grandie par le comportement de son voisin outre-Rhin : opposé à la participation de Berlin, le Ministre allemand des affaires étrangères Guido Westerwelle pourrait y laisser son portefeuille. Cela n’empêche pas l’Allemagne de réclamer une part dans le processus de reconstruction inversement proportionnelle à celle de l’intervention de la Bundeswehr. Désunie en temps de guerre, l’Europe se déchire avant même l’annonce de la paix : par la voix de son Ministre des affaires étrangères Franco Frattini, l’Italie a averti la France qu’elle entendait rester « le partenaire privilégié de Tripoli » et ne pas abandonner les milliards d’euros investis sous l’ancien régime. La Russie, la Chine et le Qatar lorgnent aussi sur les ressources énergétiques.
Entre Rome qui redoute une islamisation de la Libye, Paris qui souhaite en faire un modèle d’intervention contre d’autres dictatures -Syrie ? Iran ?- Washington qui, selon une analyse du International Herald Tribune, devrait désormais s’intéresser davantage à ce pays et Moscou qui critique vertement la poursuite des opérations militaires mais s’empresse de reconnaître le CNT à la recherche de contrats, sceller la réconciliation du peuple libyen sous les auspices de ses libérateurs ne sera peut-être pas une sinécure. Sans doute en raison des libérateurs eux-mêmes.
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