Hauts, bas, fragiles

A propos de La guerre est déclarée de et avec Valérie Donzelli 2.5 out of 5 stars

Jérémie Elkaïm, Valérie Donzelli

A Paris, Juliette tombe amoureuse d’un garçon prénommé vraiment Roméo, a un enfant avec lui, un fils Adam. Mais le bébé est atteint d’une tumeur au cerveau. Le film, largement autobiographique et raconté en flashbacks, raconte le combat sur plusieurs années d’un couple pour sauver leur enfant…

Pour son second film en tant que réalisatrice, Valérie Donzelli a de nouveau puisé dans sa vie personnelle pour construire la trame de son film. Dans La reine des pommes, Donzelli revenait sur une rupture douloureuse qu’elle avait connue et la dépression qui s’en était suivie. Cette fois, elle s’est attaquée à un drame et une épreuve autrement plus éprouvants, du moins difficiles à raconter : le combat d’un couple contre le cancer de leur bébé.

Ce couple, c’est Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm, autrefois ensemble dans la vie et de nouveau réuni à l’écran pour raconter sans fard l’épreuve qu’ils ont eu à affronter ensemble.

La guerre est déclarée s’ouvre sur un plan où Juliette est avec son enfant, alors âgé de 7 ou 8 ans. Adam est en train de passer un IRM de contrôle. Ce qui induit implicitement qu’il s’en est sorti. Il n’y aura donc pas de prise d’otage du spectateur ni de quelconque idée d’une œuvre cathartique. La guerre est déclarée se veut résolument documentaire, autobiographique certes, mais réaliste avant tout.

Mais quelque chose cloche dans le procédé filmique de cette oeuvre réalisée (hormis le plan final en 35 mm) à l’aide d’un appareil photo. Si Donzelli confirme ses talents d’actrice, Elkaïm est un ton en dessous et moins convaincant en tant qu’acteur, la faute notamment à un ton et une voix mielleuse pour ne pas dire agaçante. Les scènes d’amour chantées au milieu du film tombent aussi tout à fait à plat.

Mais ce n’est pas tellement le problème de fond du film. Ce qui ne va pas, c’est la voix-off du film, Trois personnes différentes interviennent pour raconter la chronologique des évènements, l’agitation, la fatigue, l’usure puis l’isolement dans lequel le couple s’enferme peu à peu pour tenir l’épreuve. Seul hic, c’est que les images racontent déjà une histoire. La voix-off, redondante ici (est-ce voulu ?), ne dit rien de plus, n’ajoute rien. C’est comme si Donzelli ne faisait pas assez confiance au pouvoir des images, à leur capacité à raconter à elles seules une histoire. Béquille inutile, la voix-off gâche peu à peu le film et affaiblit sa capacité à émouvoir, son pouvoir d’évocation, sa puissance dramatique, narrative, etc…

Au lieu de « sur-raconter » l’histoire, on aurait aimé que la réalisatrice fouille davantage dans la relation qui lie Roméo à Juliette, comment cette relation évolue, du coup de foudre aux habitudes de la vie en couple puis au pacte qu’ils scellent autour de leur fils. Le détachement amoureux progressif qui en découle. On aurait aimé que Donzelli décrive davantage les hauts et les bas du couple, comment ils ont vécu l’épreuve. On aurait aimé qu’elle décrive plus en profondeur les sentiments intimes qui l’ont habité comme ceux de son mari, comment ils passent de l’espoir au désespoir, de l’énergie à l’usure, comment ils ont vécu et tenu à deux dans ce drame. C’est de cela qu’il manque malgré une complicité évidente mais trop détachée entre les deux acteurs.

Cela n’empêche pas le film d’être prenant, émouvant, truffé d’un humour étrangement décalé et qui crée pour le spectateur une distance déconcertante avec le drame. Comment un tel sujet pourrait laisser indifférent ? Le plan final, en ralentis, est magnifique. Où l’on sent que Donzelli s’est libérée des formes contraignantes de son procédé filmique. Pour toucher à une vraie beauté formelle…

www.youtube.com/watch?v=fQ8vBnlHjPw

Film français de Valérie Donzelli Avec Valérie Donzelli, Jérémie et Elkaïm. (1 h 40).

Scénario : 2.5 out of 5 stars

Mise en scène : 2.5 out of 5 stars

Acteurs : 3 out of 5 stars

Dialogues : 2 out of 5 stars