LE DOCTEUR HÉRACLIUS GLOSS
Le Docteur Gloss était un savant.
Il n’avait jamais rien écrit
Mais dans sa ville de Bélavan,
Il passait pour un grand érudit.
Comment et pourquoi Docteur ?
Nul ne put le dire. Dans sa famille,
On était tout simplement Docteur
De père en fils, de mère en fille.
Du reste, s’il n’avait aucun diplôme,
Il possédait tout du savant homme.
Chaque fois que le Recteur
Parlait du Docteur,
Il souriait avec mystère.
Des témoins racontèrent
Qu’ils avaient entendu
L’Archevêque dire de lui :
Parturant montes, nascitur ridiculus mus.
Les élites qui dinaient chez lui
N’ont jamais mis en doute
Qu’il était somme toute
Le plus savant des Bélavanais.
Au physique, Héraclius Gloss tenait
De la fouine, du basset et du rat.
Autrement dit, il était chercheur,
Chasseur et rongeur.
Il adorait l’opéra
Et les brochettes bien mitonnées.
Avant chaque diner,
Muni d’un gros bouquin,
Il descendait faire le tour de son jardin.
Tous les mardis, il se rendait
Rue Faraday
Chez le seul libraire du Bélavanais
Là, Héraclius Gloss perfectionnait
Ses connaissances sur les sectes du Nord
Et celles des sauvages du Sud. Or,
Plus il furetait
Moins il trouvait la Vérité.
Alors qu’il philosophait chez lui,
Il proclama: -On a raison de prétendre
Que la Vérité habite dans un puits.
Les seaux ne cessent d’y descendre
Mais n’arrivent à prendre
Que de l’eau claire.
On l’a ainsi entendu faire
Son unique calembour :
-Vous devinez comment j’écris le mot
Sots !
Seul, le Recteur applaudit à cet humour.
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La Vérité toute nue
Sortit un jour de son puits.
Jeunes et vieux fuyaient sa vue.
La pauvre Vérité restait là morfondue
Sans trouver un asile où pouvoir habiter.
Florian